LIBAN DIPLO
AMBASSADEUR DE TUNISIE A BEYROUTH
MOHAMED HACHANA:
“LE GOUVERNEMENT TUNISIEN A ELABORE UN PLAN DE RELEVEMENT SOCIO-ECONOMIQUE AMBITIEUX EN PREVISION DU TROISIEME MILLENAIRE”
Né en 1954 à Kasr el-Hilal, M. Mohamed Najib Hachana, nouvel ambassadeur de Tunisie au Liban - il a présenté ses lettres de créance en septembre dernier - est diplômé en sciences économiques de la Faculté de droit, des sciences économiques et politiques de Tunis. Il est, également, titulaire de la maîtrise de l’Institut supérieur d’Administration publique, du diplôme des statistiques appliquées de l’université du Colorado (USA) et du certificat de l’Ecole nationale de la défense. Il a occupé plusieurs postes avant de faire partie du corps diplomatique: conseiller des services pour les affaires socio-économiques relevant de la présidence du Conseil; conseiller pour la coopération internationale au ministère tunisien des Affaires étrangères (1980-82), chef de la Division des relations bilatérales pour les pays d’Asie et d’Amérique; directeur de la Coopération multilatérale pour les continents africain, européen et asiatique (1986-88). Les charges qu’il a assumées en tant que diplomate sont les suivantes: second secrétaire à l’ambassade de Washington (1988-92), chargé d’Affaires à Koweit (1992-94); puis, ambassadeur dans ce pays (1995); directeur de la Division du monde arabe au ministère des Affaires étrangères (1996), avant d’être nommé ambassadeur à Beyrouth en septembre de la même année. Marié et père de deux enfants (Mariam et Youssef), M. Hachana est décoré de la médaille de l’Ordre de la République. En plus de l’arabe, il possède les langues française et anglaise.
ENTRE TYR ET CARTHAGE
- Comment qualifiez-vous les relations libano-tunisiennes et existe-t-il un contentieux, de quelque nature que ce soit, entre Beyrouth et Tunis?
“Les relations tuniso-libanaises sont aussi anciennes que l’histoire et la géographie. On rapporte que fort probablement, si ce n’est certain, la première trirème phénicienne ayant quitté Jbeil, Saïda ou Tyr, avait jeté l’ancre dans les eaux tunisiennes. L’histoire d’amour entre Tyr et Carthage remonte à plus de 3000 ans. “Depuis ces temps, les relations entre la Tunisie et le Liban se développent en parfaite harmonie, ce qui a permis de tisser des liens fraternels exemplaires entre les peuples tunisien et libanais. “La Tunisie et le Liban partagent un héritage culturel parmi les plus riches de l’Histoire humaine fait de civisme, de tolérance, d’attachement aux principes de liberté, de justice sociale et de respect de l’être humain. “Cette vision commune s’est, d’ailleurs, consolidée avec l’arrivée au Pouvoir du président Zein el-Abidine Ben Ali le 7 novembre 1987. “La Décoration qu’il a décernée (première copie de la médaille d’or du 7 novembre) au président de l’Ordre des journalistes libanais, Melhem Karam, durant son récent séjour à Tunis, n’est qu’une des multiples marques de l’amitié et du respect que voue la Tunisie, son président et son peuple, au Liban frère. “C’est dire que les relations tuniso-libanaises sont excellentes et seront davantage renforcées à l’avenir”.
APPUI AU LIBAN
- La Tunisie peut-elle contribuer à la reconstruction des régions libanaises dévastées par la guerre, de quelle façon et dans quel domaine?
“La Tunisie, par la voix la plus autorisée celle de son président a, à maintes reprises, affirmé son désir de voir le Liban retrouver sa place après la rude épreuve d’une guerre qui a trop duré. Elle salue le peuple libanais pour son attachement à son pays et son degré de civisme avec lequel il a pu relever tous les défis. “En rappelant le soutien indéfectible de mon pays au Liban durant la guerre, le président Ben Ali exprime son entière disposition à contribuer à la reconstruction des régions dévastées par la guerre. “Ceci dépend, évidemment, des capacités de mon pays et de la nature des demandes du gouvernement libanais. La Tunisie a acquis une expérience dans le domaine du développement intégral et son expertise, reconnue mondialement, est toujours à la disposition du Liban, cher à tous les Tunisiens. Cette expertise couvre, pratiquement, tous les domaines: santé, enseignement, secteur hydraulique, agriculture, canalisation, électricité, hôtellerie, etc... “Puis, pourquoi ne pas former des entreprises mixtes ou en partenariat pour la construction de gros œuvres et des infrastructures de base? La Tunisie produit du ciment, du fer, des produits finis et semi-finis de haute qualité, ce qui lui a permis d’être le premier pays méditerranéen à conclure un accord de partenariat avec l’Union Européenne”.
VERS L’INTENSIFICATION DES ECHANGES
- Quels produits (industriels, agricoles ou autres) font l’objet d’échanges entre les deux pays?
“En ce qui concerne les échanges commerciaux entre la Tunisie et le Liban, le volume est réellement en-deça des espérances et, surtout, des possibilités offertes. “Nous allons œuvrer en vue de remédier à cette situation et d’intensifier le courant d’échanges. “Nous allons procéder à la révision des certains accords bilatéraux pour les adapter à la situation actuelle, car aussi bien la Tunisie que le Liban, ont réalisé depuis un certain temps des performances très respectables dans les secteurs industriel, agricole, commercial et autres. Parmi les accords à réviser figure l’accord commercial signé en 1972”.
- Quelle a été la réaction tunisienne au double plan officiel et populaire à la suite des remous survenus en Cisjordanie et à Gaza?
Le ministre tunisien des Affaires étrangères, Ben Yéhia, avait appelé la communauté internationale à intensifier ses efforts en vue d’obtenir le retrait israélien des territoires arabes occupés. Le gouvernement tunisien entreprend-il une action d’envergure pour atteindre cet objectif? “A propos de ce qui se passe au Proche-Orient et du processus de paix, en particulier, la Tunisie adopte une position de principe et constitue, d’ailleurs, une constante dans sa politique étrangère. “La légalité internationale et l’application des résolutions (338, 242 et 425), du Conseil de sécurité, notamment, le retrait d’Israël de tous les territoires arabes occupés et le principe de la Terre contre la paix, une paix juste, équitable et durable. “La Tunisie n’a jamais manqué de déployer des efforts inlassables et de prendre des initiatives aux plans, bilatéral, régional et multilatéral”.
POLITIQUE FINANCIERE EQUILIBREE
- Le gouvernement de Tunis a décidé de hausser les prix du pain, de la graine de semoul et des pâtes, sans susciter des réactions violentes au niveau de la rue, comme ce fut le cas, dernièrement, en Jordanie. Comment expliquez-vous ce phénomène? Est-ce parce qu’il a majoré, en même temps, le salaire minimum?
“Pour ce qui est de la politique de soutien, la Tunisie applique une démarche rationnelle pour préserver son équilibre financier. La subvention est toujours maintenue pour les produits de première nécessité le pain, notamment, dont le prix est parfois relevé dans des proportions acceptables. Ceci ne suscite pas des réactions pour les raisons suivantes: - La distribution équitable de la richesse nationale, partant de notre souci constant d’instaurer la justice sociale. - La revalorisation des salaires, grâce à une politique de cohésion nationale entre tous les partenaires sociaux. - La rigueur de la politique en ce qui concerne le contrôle des prix pour empêcher leur hausse. - La concertation nationale au plan du développement économique et social, en plus des études stratégiques dans les secteurs économique et social. - Les programmes spéciaux de développement et de promotion des régions relativement défavorisées pour assurer des revenus respectables aux habitants.
SOLIDARITE NATIONALE
«Le meilleur exemple étant le programme de solidarité nationale en Tunisie, élaboré à l’initiative personnelle du président Ben Ali, après le 7 novembre. C’est pour nous un sujet de fierté. «Ce programme dont le financement est assuré par des contributions volontaires nationales, est conçu pour éradiquer la pauvreté dans certaines zones, pour ne laisser de place à aucune marginalisation du citoyen tunisien qui est la finalité de tout le processus de développement. Les résultats sur le terrain en sont la meilleure preuve. «L’Etat tunisien veille donc avec une attention soutenue à l’aspect social avant de prendre ses décisions sur le plan économique. Notre politique est basée sur un consensus national sans exclusion. Le président Ben Ali l’avait bien indiqué dans la déclaration du 7 novembre 1987: «Il n’y aura pas de progrès sans la paix, sociale, seule garantie de la stabilité interne».
“Le président Zein el-Abidine Ben Ali est disposé à faire contribuer la Tunisie à la reconstruction du Liban”, confie M. Hachana à Jeanne Massaad.
EN PREVISION DU TROISIEME MILLENAIRE
- A quels problèmes le gouvernement tunisien est-il actuellement confronté et consacre-t-il ses efforts pour les résoudre à titre prioritaire?
«La Tunisie n’a pas de problèmes, mais doit relever le défi du développement intégral et d’adaptation à la mondialisation de son économie. «Après la création de l’organisation Mondiale du Commerce, notre adhésion à cette organisation et la signature de l’accord de partenariat avec l’Union Européenne, notre pays a entrepris un programme vaste et ambitieux, mais réaliste, en vue de la réactivation de toutes ses institutions publiques et privées, afin de garantir sa place au sein de l’économie mondiale et d’être compétitif, sur tous les plans pour ne pas être ignoré et donc marginalisé. «Notre pays se prépare grâce à ce programme, à aborder le XXIème siècle qui s’annonce difficile avec toutes les garanties de progrès et de stabilité.
- Quelles sont vos premières impressions quant à la situation générale au Liban?
«La situation s’améliore, sur tous les plans. Mes impressions confirment l’idée que je me suis toujours faite sur le Liban: dynamisme, tolérance, ouverture de la société Libanaise, capacité de créativité et d’adaptation du citoyen Libanais à toutes les situations. Ceci constitue, à mon avis, une source de grande fierté pour la société libanaise. Le Liban mérite le titre de perle du Proche-Orient. «Nous avons un capital de sympathie entre nos deux peuples, malheureusement, sur le plan de l’action concrète, nous devons déployer plus d’efforts pour traduire sur le terrain cette affection réciproque entre Libanais et Tunisiens. Et ce, en développant les visites de responsables des deux pays. Il me semble qu’il est grand temps de promouvoir les autres aspects des relations bilatérales aux plans médiatique et culturel. «Nous allons œuvrer en vue d’élaborer le cadre juridique permettant une coopération institutionnelle entre les médias des deux pays - sous différentes formes: échange de programmes, production télévisée mixte, échange de documentaires sur la vie sociale, économique et culturelle. «Sur le plan culturel, à mon avis, il n’est pas permis à nos deux pays de ne pas exploiter leur richesse culturelle et de la mettre au service du renforcement de nos liens».
- Quel est votre meilleur souvenir de diplomate?
«Mon meilleur-souvenir en tant que diplomate consiste en la confiance placée par S.E. le président de la République en ma personne en m’accréditant en tant qu’ambassadeur de Tunisie au Koweit et au Liban».
Mme HACHANA DALENDA: “NOUS AVONS LA CHANCE D’ETRE A BEYROUTH” Mme Hachana Dalenda, épouse de l’ambassadeur de Tunisie, ne cache pas sa satisfaction de se trouver à Beyrouth, capitale de la “perle du Proche-Orient” que les Tunisiens éprouvent un immense plaisir à visiter. Sa première constatation: la cuisine libanaise a beaucoup de ressemblance avec la cuisine tunisienne qui est très appréciée, notamment: le couscous à la viande, au poulet ou aux poissons; les briks, le tajen, la soupe et la salade “méchoui”, sans oublier les pâtisseries. “Je m’abstiens, dit-elle, de fournir des détails sur nos plats nationaux, en attendant de les faire goûter aux représentants de la Presse libanaise que je me propose d’inviter incessamment”. |
JEANNE MASSAAD