LES NEUF HEURES DU PRÉSIDENT DU CONSEIL ITALIEN PRODI AU LIBAN |
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LE PROGRAMME DU PRÉSIDENT PRODI A leur arrivée à 11 heures, à l’AIB, le président Prodi, son épouse et la délégation italienne ont été reçus par le Premier ministre Hariri - reçu lui-même à Rome quelques semaines plus tôt. Aussitôt, les présidents Prodi et Hariri se rendaient au Sérail gouver-nemental de Sanayeh pour y tenir une réunion, tandis que des entretiens se déroulaient au siège du CCIB (Chambre de Commerce et d’Industrie de Beyrouth), entre le groupe des trente hommes d’affaires et chefs d’entreprises italiens avec les respon-sables des organismes économiques locaux. Dès 13h, le président Prodi rejoi-gnait le siège du parlement, place de l’Etoile pour une heure d’entretien avec le président de la Chambre M. Nabih Berri, concernant le processus de paix du Proche- Orient et la situa-tion au Liban-Sud. M. Prodi était, ensuite, reçu en compagnie de la délégation italienne et de nombreuses personnalités des mondes politique, diplomatique et des affaires, à déjeuner, au domicile du président Hariri à Koraytem. Suivait une brève visite à Solidere, agrémentée d’une présentation de la maquette des projets par le vice-président de la société, Maher Bey-doun et d’une tournée au Centre-Ville, tandis que douze représentants de banques italiennes (dont Commerciale Italiana, Banca di Roma, Nazionale del Lavoro, Credito Italiano) s’entre-tenaient avec le gouverneur de la Banque Centrale, M. Riad Salameh - sur les réglementations du secteur bancaire en vigueur au Liban. En début de soirée, M. Prodi partait rencontrer au palais de Baabda le président Hraoui, avec lequel il passait en revue les relations bilatérales économique et politique. Il tenait, enfin, à 20h30, avant son départ pour Rome, une conférence de presse au palais du gouvernement de Sanayeh, en présence de M. Hariri.
LES PROJETS ÉCONOMIQUES Parmi les projets économiques proposés par la délégation italienne, on retiendra au bénéfice du gouvernement libanais, la volonté de “délocalisation” émise par certaines industries ita-liennes désireuses de s’implanter au Liban pour bénéficier d’un accès plus facile aux marchés régionaux. Cette initiative pourrait, alors, entraîner une importante création d’emplois dans le pays et profiter à de nombreux parte-naires libanais, en cas d’apparition de sociétés mixtes. L’intérêt italien serait de trouver les partenaires appropriés dans les domaines comme la technologie et les télécommunications. Signalons, en outre, que les so-ciétés italiennes sont les principales intéressées, parmi nos partenaires européens, à la création des projets “BOT”, “Build Operate and Trans-fer” au Liban. Pour soutenir ces opérations, un accord bilatéral sur la promotion et la protection des investissements a déjà reçu ses premiers paraphes au ministère des Finances, lors de l’arrivée d’une autre délégation italienne cette semaine. Notons, par ailleurs, qu’un pro-gramme de coopération pour contribuer à la reconstruction du Liban a déjà été mis en place (la signature d’un accord portant sur des prêts bonifiés d’un montant de soixante-neuf millions de dollars avait été prévue pour 96) et qu’un don de sept millions de dollars relevant d’un accord bilatéral dans le domaine de la santé, entraînera l’arrivée d’une première tranche de fournitures fin mars. Quant à l’étude de la possibilité d’achat de produits libanais pour équilibrer la balance commerciale entre les deux pays (en 96, les exportations italiennes au Liban ont atteint 915 millions de dollars U.S. contre trente-neuf millions de dollars d’exportations libanaises en Italie), elle apparaît comme une première en qualité de stratégie commerciale. “Nous désirons que l’Italie joue un rôle de premier plan pour soutenir notre économie”, a déclaré le président Hariri. Le Premier ministre a, en outre, fait appel à l’appui de Rome pour la concrétisation de l’accord de partena-riat euro-méditerranéen, insistant pour l’obtention d’un délai de grâce de cinq ans, avant la levée progressive des barrières douanières (suivant la situation de chaque secteur industriel ou agricole). Sur ce seul point, il est apparu, néanmoins, que la réponse du président du Conseil italien s’aligne-rait sur la stratégie globale définie par l’Union européenne. LES POINTS POLITIQUES Abordant le volet politique, le président Hariri a pressé le gouver-nement italien de centrer ses efforts dans le cadre de l’Union européenne pour relancer les pourparlers syro-israéliens. Se référant, ensuite, à la recru-descence de la violence au Proche-Orient, son homologue italien a condamné la construction d’un quartier juif à Jérusalem-Est: “La politique d’implantation de l’Etat hébreu à Jérusalem a détruit les espoirs qu’avait suscités la signature, le 15 janvier, de l’accord sur Hébron”, a-t-il déclaré. “Nous devons faire quelque chose maintenant pour le processus de paix, sinon la paix sera très lointaine.” Définissant la politique étrangère italienne, le président Prodi s’est prononcé en ces termes: “Notre poli-tique étrangère s’articule autour de deux axes, à savoir les pays de l’ex-Europe de l’est communiste, ainsi que le Proche-Orient... L’Europe se doit d’établir un équilibre dans ses rapports avec le Sud et le Nord... Notre poli-tique dans le bassin méditerranéen constitue l’une des pierres angulaires de notre politique étrangère.” POURQUOI MISE-T-ON SUR BEYROUTH? On serait, alors, désireux de com-prendre pourquoi l’on mise sur Beyrouth. Les raisons jaillissent, logiques et nombreuses... Economi-ques, d’abord, puisque “les Libanais ont d’importants atouts pour conquérir les marchés proche-orientaux” de par “leur économie libérale et le cadre favorable à l’investissement dont ils jouissent,” soulignés par M. Adnan Kassar, président du CCIB. Pour un souci de sécurité de l’Union européenne qui vise à assurer la stabilité des pays du sud de la Méditerranée en favorisant leur développement socio-économique. Pour des raisons de tempérament, enfin, de caractère méditerranéen commun et de liens séculaires, car comme l’a dit M. Prodi, “nos deux pays ont offert à l’humanité un cadeau commun dans le domaine des activités commerciales et des arts. Depuis la Rome antique, en passant par Flo-rence et Venise jusqu’à l’Italie mo-derne, nos deux pays ont toujours été étroitement liés. C’est pourquoi, l’Italie est le premier partenaire commercial du Liban. Vous avez la volonté, l’énergie et la capacité de réussir la reconstruction. Le gouver-nement italien et les entreprises industrielles et commerciales sont pleinement engagés dans ce proces-sus. Ou aussi: “Le Liban illustre une expérience vitale, celle de la coexis-tence entre les religions et les ethnies diverses. Il représente donc un exemple de modération et de coexis-tence. Il ne saurait y avoir de plan ou de projet pour l’avenir du bassin méditerranéen sans que le Liban ne soit pris en considération. Si le Liban en tant que symbole disparaît, c’est l’espoir en la coexistence qui disparaîtra avec lui.” Simplement, selon M. Prodi, le Liban n’est pas exempt des conditions qui établissent la force et la durée d’un pays, car “ni l’aide étrangère, ni les circonstances internationales ne peuvent remplacer la véritable force capable de réaliser le développement. A savoir, l’existence des institutions fondamentales qui forment l’Etat: un gouvernement fort, un système légis-latif moderne, une régulation du secteur bancaire sur laquelle on peut compter et un service public compé-tent. Si ces éléments sont en place, la prospérité suivra.” NADA SKAFF |