
«Avant de restructurer Télé-Liban,
il faut définir son
identité et son statut juridique».
PAS DE STATUT DÉFINITIF POUR L’AUDIOVISUEL
- Peut-on savoir où en est exactement le dossier de l’audio-visuel,
à la lumière des informations ayant circulé là-dessus
et des différents délais accordés aux médias
afin qu’ils légalisent leur situation?
S’oriente-t-on vers un statut stable de l’audiovisuel?
“Nous ne pouvons pas parler d’un statut stable, car la loi sur l’audio-visuel
ne le prévoit pas. Ce dossier est, en effet, ouvert et sujet à
la discussion à n’importe quel moment, conformément aux textes
de la loi, eu égard aux données techniques et aux critères
professionnels délimitant son cadre. “En ce qui concerne les licences
de fonctionnement à accorder aux médias, nous avons déjà
parcouru la moitié du chemin et espérons achever la seconde
moitié, en coopération avec le Conseil national de l’information
qui a achevé l’étude d’une bonne partie des demandes et devrait
la clôturer incessamment. Nous lui avons, également, soumis
de nouveaux dossiers et le Conseil national de l’audiovisuel prendra en
considération le délai légal. Le ministère
de l’Information transmettra, ensuite, le dossier au Conseil des ministres
qui prendra à son sujet, les décisions adéquates”.
UNE NOUVELLE EXPÉRIENCE
- Pourquoi tout ce retard à trancher le dossier?
“La loi ne fixe pas de délai pour la présentation des
nouvelles demandes. Nous vivons, en tout cas, une nouvelle expérience,
celle de l’audiovisuel et de la nouvelle législation qui le régit.
Celle-ci rend impératif un examen méticuleux par le Conseil
national de l’audiovisuel de chaque demande. Le Conseil se prononcera,
en définitive, sur cette base et accordera ou non l’autorisation
requise”.
- Ce dossier pourra-t-il être remis, ultérieurement,
en question par le fait d’éventuels facteurs politiques?
“Nous œuvrons en faveur d’une dissociation de la politique du paysage audiovisuel
privé et avons franchi des pas importants sur cette voie. A mon
avis, le Conseil national se base dans l’examen des dossiers sur des critères
purement scientifiques et juridiques, avant d’émettre son jugement
et de soumettre au Conseil des ministres toutes ses recommandations aux-quelles
il devra souscrire”.
NOS PRIORITÉS
- Quelle est l’autre priorité dans votre action ministérielle
après l’audiovisuel?
“Au ministère de l’Information, notre action s’exerce conformément
à quatre axes majeurs: le premier concerne l’audiovisuel et l’aboutisse-ment
de ce dossier à une solution définitive. Le second concerne
la réévaluation de la situation à Télé-Liban;
la recherche d’un mécanisme juridique et administratif pour son
fonctionnement. Le troisième axe est celui de la réhabilitation
des respon-sabilités et prérogatives information-nelles au
sein du ministère de l’Information, surtout en ce qui a trait à
Radio-Liban et à l’Agence nationale d’information. “A ce propos,
le ministère de l’Information dispose d’un plan de restructuration
de Radio-Liban afin qu’elle puisse jouer un rôle efficace dans l’orientation
de l’information nationale. Il en est de même de l’Agence nationale
d’information. Elle devra se mettre au même diapason que celui de
ses pairs arabes, dans le but de côtoyer le progrès et l’évolution.
“Le quatrième axe, enfin, concerne l’organisation administrative
du mi-nistère, laquelle se fera conformément aux rapports
établis dans ce sens par les gouvernements précédents,
en coordination avec le ministère de la Réforme administrative”.
- Le rôle du ministère de l’Infor-mation semble régresser
dans le monde à l’avantage de la radio ou de la T.V. nationale,
en tant qu’insti-tution et, aussi, que “porte-parole” officiel.
“Au Liban, il existe une interféren-ce entre l’information officielle
et privée et non une information offi-cielle à l’image de
celle qui prévaut dans les régimes non-démocratiques.
“Une telle information au Liban traduit et exprime l’esprit démocra-tique
dans toutes ses tendances et ses orientations. Cela est aussi vrai pour
Radio-Liban, l’ANI et même Télé-Liban. «Nous
devons, par conséquent, stimuler cette orientation, car elle confère
à l’information officielle une dimension nationale. Le Liban a franchi
des pas importants sur cette voie. Il est vrai que certains pays nous ont
devancés dans ce domaine, mais nous sommes encore au début
du parcours. Nous nous trouvons, pour la première fois, en face
d’une législa-tion qui régit véritablement l’ensem-ble
du paysage audiovisuel privé. Cette phase transitoire nous est nécessaire».
LA PRIVATISATION À LONG TERME?
- Y a-t-il en perspective un projet pour la privatisation de Radio-Liban?
«Il faudrait savoir, avant de répondre à cette
question, si l’Etat a réellement besoin de tracer une politique
informationnelle à l’échel-le nationale. Dans l’affirmative,
force est de constater qu’il ne peut se passer de moyens pouvant et devant
refléter sa vitalité et son dynamisme au service de la chose
publique. A mon sens, l’Etat ressent le besoin de suivre une politique
informationnelle bien définie. A partir de cette vérité,
la privatisation des moyens officiels de l’infor-mation peut être
envisagée à long terme, sous réserve pour l’Etat de
ne pas re-noncer à son droit de dé-finir et de tracer lui-même
cette politique».
- Qu’est-il advenu du grand projet de Radio-Liban et quand le poste-relais
d’Amchit sera-t-il remis en service?
«Je ne voudrais pas m’en-gager dans la controverse soulevée
autour du grand projet de Radio-Liban au cours des derniers mois. L’important,
en définitive, est que le Liban soit doté d’une radio officielle
et que celle-ci soit présente au sein de la communauté libanaise
d’une manière intense, tant à l’intérieur du Liban
que dans les pays d’émigration. Nous disposons, à cet effet,
d’un plan directeur que nous annoncerons très bientôt.»
TÉLÉ-LIBAN: UNE QUESTION D’IDENTITÉ
- Le Conseil des ministres vous a confié la mission de réhabiliter
et de restructurer Télé-Liban. Comment se présente
votre plan d’action?
Pensez-vous que la station officielle pourra concurrencer les stations
privées?
«Il ne faut pas envisager le problème de Télé-Liban
vis-à-vis des autres T.V. privées sous l’angle de la concurrence;
c’est plutôt une question d’identité et de rôle. «Si
nous voulons que Télé-Liban soit à l’image des T.V.
privées, mieux vaut qu’elle disparaisse. «Si nous souhaitons,
par contre, qu’elle soit à l’image du pays tout entier, c’est-à-dire
véritablement représentative de la population au point de
refléter son dynamisme aux plans culturel, intellectuel, pédago-gique
et social, cela confèrera à Télé-Liban un rôle
fondamental qui la privilégie dans le domaine culturel et non commercial.
«La concurrence commerciale est posée entre les T.V. privées
elles-mêmes, non entre ces dernières et la T.V. nationale.
A partir de là, notre recherche s’accentue autour d’une définition
du statut juridique de Télé-Liban. Ensuite, nous dégagerons
son identité. «Nous attendons le rapport du Conseil d’administration
de la Compagnie nationale à la lumière duquel sera définie
son identité juridique. Nous passerons, alors, aux étapes
ultérieures, à savoir: la situation administrative, financière
et la programmation.»
LE RÉÉQUIPEMENT DE RADIO-LIBAN
- Certaines informations font état d’un «scandale financier»
survenu suite à l’adjudication, remportée par la société
améri-caine «Continental» pour le rééqui-pement
de Radio-Liban. Est-ce exact ou ne s’agit-il que de ru-meurs?
«En fait, des appels d’offre en vue d’une adju-dication relative
au rééquipement de Radio-Liban avaient eu lieu sous le précédent
gouvernement. A mon arrivée au ministère, j’ai examiné
le dossier et demandé son blocage, en attendant de trouver les moyens
susceptibles de financer l’opération, sans que cela représente
un fardeau pour le Trésor. Je dispose, à cet effet, d’un
plan de rechange de nature à alléger au minimum les frais
découlant de cette transaction».
- En quoi consiste ce plan?
«Il se base, essentiellement, sur un système d’auto-financement,
à partir des prévisions budgétaires du mi-nistère
de l’Information et des assis-tances et prêts qui lui sont accordés
par le Conseil du développement et de la reconstruction.»
LE PROTOCOLE FRANCO-LIBANAIS
- Le ministère de l’Information a conclu avec la France un
protocole de coopération infor-mationnelle. Mais des lacunes ont
entravé quelque peu son appli-cation. Quel est votre avis à
ce sujet?
«Nous entretenons les meilleures relations avec la France et
sommes soucieux d’établir des liens étroits avec cet Etat
ami. Si le protocole en question pêche par certaines la-cunes, cela
peut faire l’objet de pourparlers avec la partie française dans
le but d’aboutir à des dénomi-nateurs communs, à partir
desquels le Liban devra tracer claire-ment sa politi-que infoma-tionnelle
au plan national. «Cependant, si des parties dé-terminées
tien-nent un langage de nature à por-ter atteinte à la politique
natio-nale de la défen-se ou même à l’intégrité
territoriale et à la souveraineté libanaise, nous devons
nous saisir de ce dossier afin de prévenir tout ce qui pourrait
nuire aux intérêts nationaux ou d’entraver, par voie de conséquence,
les relations franco-libanaises».
JE NE SUIS PAS OPTIMISTE PAR RAPPORT À LA PAIX
- Comment concevez-vous, en tant que journaliste, le processus de paix
dans la région?
«Je ne suis pas optimiste en ce qui concerne l’instauration d’une
paix juste et globale dans la région, con-trairement à toutes
les spéculations de ces dernières années. «En
effet, le Proche-Orient est confronté à une nouvelle phase
politique depuis l’accession au pou-voir en Israël de Benjamin Netanyahu.
La nouvelle conjoncture a placé le processus de paix devant l’inconnu
dont on ignore complètement l’issue. «Certains même
vont jusqu’à affirmer que ce processus est dans l’impas-se, du fait
des agissements d’Israël, Netanyahu l’ayant ramené à
zéro. «Tous les volets des négociations risquent de
s’effondrer, y compris le volet palestino-israélien. Des acquis
ont été, certes, enregistrés sur la voie de la paix,
mais ils sont remis en question suite à la politique suivie par
Tel-Aviv, preuve en sont les secousses quotidiennes signalées un
peu partout dans les territoires occupés menaçant d’une nouvelle
Intifada palestinienne. Ceci replace le Proche-Orient au point où
il se trouvait avant la conférence de Madrid. «Aujourd’hui,
la paix est sérieuse-ment menacée et Israël assume la
responsabilité de l’impasse actuelle. De même, les Etats-Unis
assument une grande part de responsabilité, car ils sont tenus de
jouer un rôle beaucoup plus efficace. «Ils doivent se démarquer
des autres parties, en tant que co-parrain dans la recherche d’une solution
au conflit. «Malgré notre respect pour le mécanisme
établi par l’adminis-tration américaine, nous constatons
que l’action des USA s’avère inopé-rante.»
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