AYANT EU LIEU HIER DANS UNE ATMOSPHÈRE SURVOLTÉE
LES ÉLECTIONS DE LA CGTL CONSACRENT LA SCISSION DU MOUVEMENT SYNDICAL


M. Elias Abou-Rizk haranguant ses supporters; près de lui: MM. Ammar Moussawi, député de Baalbeck, et Melhem Karam, président de l’Ordre des journalistes.


M. Ghoneim Zoghbi, chef de la seconde liste; à sa gauche, M. Antoine Béchara.


MM. Najah Wakim , Moustapha Saad et Zaher el-Khatib (de dos), députés respectivement de Beyrouth, de Saïda et du Chouf, devant le siège de la CGTL.

Jamais élections syndicales ne s’étaient déroulées et, pour cause, dans une atmosphère aussi survoltée: il s’agit de celles ayant eu lieu hier jeudi, au siège de la Confédération générale des travailleurs du Liban (CGTL), en vue du renouvellement de son conseil exécutif. Comme il fallait s’y attendre et suite à l’intervention, à peine voilée, du Pouvoir, - bien que le ministre du Travail ait prétendu se soucier, uniquement, d’appliquer la loi - le mouvement syndical s’est scindé en deux et, depuis le 24 avril, il existe chez nous deux conseils exécutifs de la centrale ouvrière. Ceci nécessitera, sans doute, l’arbitrage du Conseil d’Etat qui aura à statuer sur les résultats du scrutin et à se prononcer sur leur légitimité.

DEUX LISTES EN LICE...
Deux listes étaient en lice: l’une ayant à sa tête M. Elias Abou-Rizk, président sortant de la centrale syndicale; l’autre par M. Ghoneim Zoghbi, secrétaire de la fédération des offices autonomes. La première était soutenue par l’Opposition, alors que la seconde bénéficiait de l’appui (inavoué) du Pouvoir et, spécialement, du chef du gouvernement. Ce fait est corroboré par la décision du ministère du Travail d’admettre cinq nouvelles fédérations - moins de cinq jours avant le scrutin - ajoutant à la liste des électeurs dix nouvelles voix toutes hostiles au chef de la CGTL. Aussi, et tout en prétendant se soucier, uniquement, de faire respecter la loi, le ministère du Travail a confié aux FSI et à l’armée la tâche de maintenir l’ordre autour du siège de la centrale ouvrière et, partant, de s’assurer de la présence des seuls syndicalistes autorisés à pénétrer dans les locaux de la CGTL où devait avoir lieu l’opération électorale. Les observateurs objectifs n’écartaient pas le risque pour le mouvement syndical d’être scindé par la formation de deux conseils exécutifs de la CGTL qui se dénieraient, mutuellement, toute légitimité. Les “sages” proposaient donc le report du scrutin en attendant l’arrêt du Conseil d’Etat auquel les deux parties s’engageraient à souscrire... La proposition n’a pas été retenue.

ÉLECTION D’ABOU-RIZK ET DE... ZOGHBI
En présence de vingt-quatre syndicalistes légalement inscrits, il a été procédé vers 10h30, à une première opération électorale, ayant débouché sur l’élection de toute la liste de M. Elias Abou-Rizk. Il y avait là, le secrétaire général de la Fédération des ouvriers arabes, le secrétaire général de la Fédération internationale des ouvriers; MM. Zaher Khatib, Najah Wakim, Moustapha Saad et Hajj Hassan Ammar Moussawi, députés. Ensuite un second scrutin devait avoir lieu, à l’issue duquel Ghoneim Zoghbi a annoncé sa... “victoire” avec ses colistiers... Voici la constitution des deux listes; Première liste: Elias Abou-Rizk, président; Khaled el-Assad, Sleiman Hmaidane, Georges Alam, vice-présidents; Yasser Nehmé, secrétaire général; Abdel-Amir Najdi, secrétaire pour les relations extérieures; Pierre Abou-Fayçal, secrétaire pour les relations publiques; Moursel Hassan, secrétaire pour les relations arabes; Halim Matar, secrétaire pour les affaires administratives; Jihad Moallem, secrétaire pour l’information; Joe Berbéri, trésorier; Nicolas Géha, comptable. Seconde liste: Trente-cinq syndicalistes (sur un total de 54, d’après la liste établie par le ministère du Travail) ont participé à l’élection de la seconde liste, ainsi constituée: Ghoneim Zoghbi, président; Riad Saab, Walid Jouaidy et Georges Hajj, vice-présidents; Saadeddine Hmaidy Sacr, secrétaire général; Boutros Saad, Ali Houmani, Georges Abou-Haïdar, Abdel-Ghani Issa, Antoine Béchara, Béchara Chaya et Mohamed Issa, membres du bureau.

POUR UNE SOLUTION DE COMPROMIS?
La conclusion à tirer est la suivante: l’ingérence de l’Etat dans les élections de la centrale ouvrière a eu pour conséquence de scinder le mouvement syndical au Liban, ce qui ne contribue nullement, comme on s’en doute, à préserver la paix civile. Le Pouvoir a donc obtenu un résultat contraire à celui qu’il voulait atteindre. Le Liban étant, comme chacun le sait, le pays du compromis et de la conciliation, cette crise dont la gravité n’échappe à personne, ne peut être résolue que par la recherche d’une solution d’entente, de nature à mettre d’accord les parties antagonistes et, partant, à prévenir l’éclatement de la CGTL. A bon entendeur, salut!

KARAM INTERVIENT EN FORCE…
Alerté par les reporters de presse et les photographes chargés de couvrir ces élections, M. Melhem Karam, président de l’Ordre des journalistes, s’est rendu sur place et a mis en garde les FSI contre toute tentative d’appréhender les représentants des médias, ce qui provoquerait une violente confrontation comme ce fut le cas, dernièrement, à Saïda. Les FSI ont renoncé à user de la manière forte; elles n’ont pas eu tort… A 6 heures du matin, des éléments des Forces de sécurité intérieure avaient investi le siège de la CGTL, sis à la rue Badaro et l’ont saccagé, détruisant tout sur les lieux, y compris le computer. De même, ils ont empêché M. Elias Habre, doyen d’âge, de proclamer les résultats du scrutin. M. Abou-Rizk s’est donc chargé d’annoncer l’élection de sa liste.
JAMMAM: “QUEL SCANDALE!”
Commentant les élections de la CGTL, M. Hassan Jammam, président de la Fédération internationale des syndicats arabes, a fait la déclaration suivante: “Nous sommes venus avec mes collègues en tant qu’observateurs et nous avons été empêchés par les forces de l’ordre de pénétrer au siège de la Centrale ouvrière. “Nous déplorons une telle immixtion de la part de l’Autorité dont nous n’avons pas connu de pareille durant vingt-cinq ans de vie. Ceci nous paraît étrange et disloque le mouvement syndical au Liban. “En tant que fédération, nous ne reconnaissons que le conseil exécutif de la CGTL présidé par Elias Abou-Rizk. Nous transmettrons au secrétariat général une image claire de ce qui s’est passé, dès notre retour au Caire.”

ABOU-RIZK DÉNONCE...
Quant à M. Abou-Rizk, il a dénoncé l’intervention de l’Autorité dans les élections syndicales et rejeté les résultats du scrutin qui s’est déroulé en présence des représentants du Pouvoir...


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