Cannes 97
l’année faste du cinquantenaire


Le premier palais des festivals qui a connu son heure de gloire.


Le nouveau palais surnommé “le bunker” par la presse, pour ses formes massives.


Le site unique de la baie de Cannes et sa célèbre Croisette ont beaucoup aidé à l’essor du Festival International du Film depuis sa fondation.

L’année du cinquantenaire tant attendue des cinéphiles et festivaliers est arrivée! Le célèbre Festival International du Film de Cannes boucle le demi-siècle. Un bel âge et une riche histoire que nous allons vous conter par l’écriture avant que la rétrospective ne soit portée sur les écrans.


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1- A Cannes, le festival-sur-mer a tous ses attraits.

2- Ce document date du premier Festival en 1946 et montre Michèle Morgan s’ébattant sur le sable fin de la Croisette.

3- L’affiche du premier Festival International du Film de Cannes qui devait avoir lieu en 1939 et dont le déroulement a été stoppé par la Deuxième Guerre mondiale.

4- 1953: une jeune starlette inconnue nommée Brigitte Bardot.

5- 1954: la première starlette aux seins nus Vera Silva provoque un beau scandale en se faisant photographier “topless” dans les bras de Robert Mitchum; elle est chassée de Cannes.

6- Les attroupements sont nombreux sur les plages de la Croisette où les “paparazzi” font la chasse aux starlettes.

LA PALME DES PALMES
Pour célébrer ce cinquantenaire, Cannes sera plus que jamais, du 7 au 18 mai, la métropole du cinéma mondial, mais cette année 97 sera exceptionnelle. Ce sera une grande fête du cinéma comme jamais vue auparavant avec, en premier lieu, la participation des plus grandes vedettes du Septième art qui, durant leur carrière, ont glané les honneurs et les récompenses de la plus prestigieuse compétition cinématographique de la planète. On a aussi institué pour ce cinquantenaire «la Palme des Palmes d’Or» qui couronnera une autre compétition, celle des films primés depuis l’existence du festival. Une projection qui sera suivie avec le plus grand intérêt. C’est dire combien ce grand rendez-vous annuel de Cannes sera cette fois-ci particulièrement attractif. D’ailleurs, on prévoit une affluence record. Déjà tous les hôtels affichent complet sur plusieurs kilomètres à la ronde. On s’attend à recevoir plus de 100.000 participants: professionnels du cinéma, techniciens, journalistes ou tout simplement des amoureux du Septième art qui viennent chaque année, début mai, tâter le pouls de la production mondiale. Cette fois-ci, ils viendront à la fête et pourront participer à tout un programme de festivités dans une ambiance exceptionnelle comme seule sait la créer Cannes et sa célèbre Croisette. Ainsi, pour ce cinquantenaire, les feux de l’actualité seront braqués avec un éclat tout particulier sur Cannes qui, plus que jamais, sera un pôle attractif de première grandeur!

un faux-départ en 1939 L’aventure du Festival de Cannes - c’en était une à l’époque - a commencé en 1939 par un… faux-départ dû au déclenchement de la Seconde Guerre mondiale. Effectivement, c’est le premier septembre 1939 qu’aurait dû naître le Festival. Ce sont les frères Lumière qui l’ont voulu et conçu pour concurrencer la «Mostra» de Venise qui avait déjà sept ans d’existence mais était devenue une manifestation à la solde du régime fasciste où les productions italiennes et allemandes étaient systématiquement favorisées. Il semble que ce soit les Américains eux-mêmes qui aient encouragé la France à mettre en place en Europe une organisation concurrente. C’est au plus haut niveau que l’entreprise est alors engagée avec deux villes en compétition: Biarritz et Cannes. La seconde l’emporte. Louis Lumière accepte d’assumer la présidence du Festival dont la date est fixée au 1er septembre 1939. Fin août, après que 2000 invitations eurent été lancées, nombre de vedettes débarquent sur la Croisette dont Gary Cooper, Tyrone Power, Annabella, Georges Raft, etc… lorsque le coup de théâtre se produisit: Hitler envahit la Pologne. La Seconde Guerre mondiale vient de commencer. Le Festival est mort-né. Il faudra attendre sept ans encore pour un nouveau départ, le bon celui-là. Il est porté sur les fonts baptismaux par Philippe Erlanger en qualité de délégué général assisté de Robert Favre LeBret.

un premier festival avec onze pays En effet, c’est le 20 septembre 1946 que s’ouvre le premier Festival de Cannes et devient aussitôt la première grande manifestation cinématographique de l’après-guerre. Une nouvelle fois, l’histoire joue un vilain tour au cinéma: Raimu le plus grand acteur français décède le jour même de l’ouverture! Mais ce premier vrai Festival put avoir lieu sur la Croisette avec la participation de onze pays. Ce fut un festival bon enfant, un peu chaotique et improvisé (bobines de films interverties, films étrangers non sous-titrés, arrivée impromptue de vedettes...). Les premiers chefs - d’œuvre dont ceux du néo-réalisme italien comme “Rome ville ouverte” passent totalement inaperçus.

1946: PREMIER PALMARÈS
Le premier palmarès de 1946 attribue le “Prix du Jury International” à “La Bataille du Rail” réalisé par René Clément (France). Le “Grand Prix International de la Mise en Scène” est décerné aussi à René Clément; les prix d’interprétations féminines et masculines reviennent respectivement à Michèle Morgan (France) dans “La Symphonie Pastorale” réalisé par Jean Delanoy, et à Ray Milland (Etats-Unis), dans “The Last Week-End” réalisé par Billy Wilder. Il faudra attendre l’année 1955 pour voir instituée la célèbre “Palme d’Or”, récompense suprême du Festival. Jusque - là, c’était un “Grand prix du Festival International du Film” qui était décerné. En cinquante ans d’existence du Festival, trois années seulement, le palmarès ne sera pas proclamé: en 1948, en 1950 et en 1968 (à cause des événements de mai). Suite à l’effondrement d’une partie du palais fin 1947, le festival de 1948 n’a pu avoir lieu et en 1949 pour la reprise, il est inauguré officiellement par un jeune sous-secrétaire d’Etat à la présidence de la République, du nom de François Mitterrand! Autre étape marquante du Festival, c’est en février 1950 qu’il a été décidé que le prochain festival aurait lieu en mai pour des raisons climatiques (au lieu de septembre) mais aussi d’harmonisation avec le Festival de Venise (se déroulant début août). La Fédération internationale des producteurs est, également, constituée. La compétition ne reprend donc qu’au mois de mai 1951.

DES FIGURES MARQUANTES
L’histoire du Festival est jalonnée de figures marquantes qui ont laissé une trace indélébile dans l’histoire du cinéma tout entier. Parmi les présidents du jury: Jean Cocteau (à trois reprises: en 1953, 1954 et 1957), Pagnol (1955), Marcel Achard (1958 et 1959), Simenon (1960). Au nombre des réalisateurs: outre René Clément et Jacques Becker, Billy Wilder, Vincente Minelli, Vittorio de Sica, Luis Bunuel, Orson Welles, André Cayatte, William Wyler, Elia Kazan, Georges Clouzot, Jules Dassin, Jean-Yves Cousteau, Louis Malle, Robert Bresson, Fellini, Ingmar Bergmann, Marcel Camus, François Truffaut, Anatole Litvak, Michelangelo Antonioni, Luchino Visconti, Marco Ferreri, Jacques Demy, Larry Peerce, Joseph Losey, Costa-Gavras, Robert Altman, Ettore Scola, Francesco Rosi, Maurice Pialat, Paolo Pasolini, Lakhdar Hamina, Werner Herzog, Bob Fosse, Martin Scorcese, Dino Risi, Al Hasby, Claude Chabrol, Paolo et Vittorio Taviani, Fernando Rey, Bernardo Bertolucci, Claude Goretta, Wim Wenders, Emir Kusturica, Alan Parker, Andrjej Zulawski, etc... Quant aux films-fétiche, il faut citer: “Le Troisième Homme” (1949), “Nous sommes tous des assassins” (1952), “Le Salaire de la peur” (1953), “Tant qu’il y aura des hommes” (1954), “Le monde du silence” (1956), “Quand passent les cigognes’”(1958), “Les quatre cents coups” (1959), “La Dolce vita” (1960), “Le Guépard” (1963), “Les parapluies de Cherbourg” (1964), “Un homme et une femme” (1966), “Blow Up” (1967), “MASH” (1970), “Mort à Venise” (1971), “Missing” (1984), etc... Enfin, tous les grands acteurs et actrices sont venus à Cannes qui a aussi servi de tremplin à plusieurs interprètes telles que Martine Carol, Brigitte Bardot, Françoise Arnoul, Kim Novak, Sylvia Kristel, Isabelle Adjani... qui va d’ailleurs présider le jury de ce Festival du cinquantenaire.

LE LIBAN ET LE FESTIVAL DE CANNES
Si le premier film libanais présenté à Cannes était “Ila Ayn” (1958) produit par Malek Basbous et réalisé par Georges Nasser suivi du “Petit Etranger” (1962) du même réalisateur, par contre le seul long métrage libanais primé dans l’histoire du Festival est “Hors La Vie” du regretté cinéaste Maroun Bagdadi qui a remporté le Prix Spécial du Jury de Cannes en 1991. Toutefois dans les annales du Festival, la présence libanaise figure par contre dès le début de son inauguration en 1946, grâce au fondateur de “La Revue du Liban”, Emile Maklouf, festivalier de la première heure. A sa mort, le signataire de ces lignes a pris le relais, de 1970 à 1978 et continue annuellement à en faire la relation. Quant à notre caricaturiste Stavro, il boucle cette année son quart de siècle de présence à Cannes, depuis 1972.

1997: VINGT-TROIS FILMS EN COMPÉTITION OFFICIELLE
Cette cinquantième édition du Festival International du Film de Cannes dont le jury sera présidé par Isabelle Adjani, comprendra vingt-trois films en compétition officielle. Au cours de la soirée inaugurale, sera projeté le film de Luc Besson “Le 5ème élément” tandis qu’“Absolute Power” de Clint Eastwood fera la clôture. D’autres titres, tels que “Les assassins de Mathieu” (de Kassowitz), “Artemisia” (d’Agnès Merlet), “Hamlet” (de Kenneth Branagh), “La Trêve” (de Francesco Rosi), “The Black Out” (d’Abel Ferrara), “Paradise Road” (de Bruce Berestford). “Touch” (de Paul Schrader), “Copland” (de James Mangold), “Unagi” (de Shoei Imamura), figurent en bonne place dans la sélection officielle. Enfin, le cadeau du cinquantenaire sera offert par Michael Jackson sous forme d’un clip de 30 minutes qu’il présentera lui-même à son arrivée le 8 mai à minuit, à Cannes et qui a coûté la bagatelle de 14 millions de dollars! Le producteur de ce clip n’est autre que l’émir Al Walid Ben Talal, fils de la libanaise Mona Solh. Les irréductibles du Liban-partout pavoiseront.

JEAN DIAB


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