Editorial


Par MELHEM KARAM

I- HARIRI... LA CGTL ET LES SABLES MOUVANTS

II- AVEC PATRICIA KAS OU AVEC JACQUES CHIRAC?

Photo Melhem Karam
- I - Avec douleur et bien que cela indispose le Docteur Abou-Baha, porteur du Doctorat “honoris causa” que lui a décerné la doyenne de l’université d’Ottawa, élargissant son savoir et l’amenant à faire des calculs tous erronés, nous continuerons à dire les vérités en toute simplicité. Les élections de la CGTL étaient un jeu périlleux pour l’Etat, enlaidissant son image aux yeux des citoyens, tous les citoyens; même de ceux que l’échec d’Elias Abou-Rizk a réjoui. Au lieu d’affaiblir Abou-Rizk et ses frères, l’Etat les a renforcés, les présentant en tant que leaders du mouvement syndical au Liban. Que signifie pour le gouvernement de reconnaître ou ne pas reconnaître? Le critère et l’action sont dans la rue, non dans un autre endroit. Que signifie l’appel de la “Confédération” à une grève, auquel personne ne répond et l’appel de la partie non reconnue suivi par tous? La valeur locale n’est pas la grande, mais plutôt la reconnaissance des organismes internationaux et arabes. Que signifie l’appel de ces derniers à une grève qui ébranle le pays et l’exécute, pour trancher entre quiconque a tort ou raison et quiconque a falsifié ou est sincère? Ce qui s’est passé est une honte pour le gouvernement que l’Histoire enregistrera à son encontre. S’il veut être aimé, le gouvernement doit changer les Libanais, car avec cette fraction de Libanais et ce genre de citoyens, il ne peut réaliser aucun acquis, ni aucune victoire pour atteindre les cœurs. Tel est le fait. Rafic Hariri a causé beaucoup de tort au gouvernement et lui a valu une mauvaise réputation; on le montre du doigt comme étant le maître de la répression et de l’atteinte aux droits; maître de l’action visant à attenter aux volontés et éloigné du baptême populaire qui se déroule contre son intérêt. En quoi profite à tout gouvernement, s’il est élu par les militaires et boycotté par les gens? A propos de militaires, il y a lieu de signaler que ceux-ci ont refusé d’être les parrains d’une opération de falsification. Aussi, ont-ils quitté la place où ils s’étaient déployés pour protéger les électeurs véritables et légaux, avant de recevoir l’ordre de se retirer pour la céder aux politiciens. Le jugement porté sur ces derniers ou certains d’entre eux a constitué une condamnation cinglante. Puis, que veut Rafic Hariri? Transformer tous les gens en esclaves? Et que le critère du nationalisme pour tout citoyen, soit de jouir des bonnes grâces de Hariri? Pourquoi certains de ses partisans ont-ils honte de se réclamer de cette catégorie de gens? Pour qu’ils ne soient pas montrés du doigt et qu’on ne dise pas qu’ils ont agi contre leurs convictions, dans l’intérêt d’autres convictions? Ce qui s’est passé aux dernières élections syndicales, a valu au gouvernement la réputation la plus laide, montrant que ceux qui en font partie ne lisent pas l’Histoire, parient sur l’oubli et croient que les gens sont stupides. Tout cela témoigne contre Rafic Hariri, lequel est excédé par l’expression “fin du mandat gouvernemental”, car il veut rendre immortel ce mandat et gouverner contre la volonté des gens, avec une majorité de sa création. Mais tous ces rêves tombent devant la réalité, laquelle prouve que les gens ne peuvent être convaincus que par le dialogue et la douceur, l’arrogance se retournant contre ses héros. Etant entendu que l’héroïsme consiste à être puissant par votre force, non par la force du pouvoir. La victoire ne se mesure pas au nombre des rounds remportés, mais à votre capacité de remporter le round final sans perdre le souffle. La manière de distribuer les nouvelles, de propager les mensonges et d’empêcher la vérité de se répandre est maintenant révolue. Il n’est plus possible, de notre temps, de falsifier les faits. Avec l’argent, vous ne pouvez acquérir que les services; quant au cœur, son prix est un cœur similaire. De même que la raison et la conviction. L’affaire de la CGTL est un incinérateur et des sables mouvants dont le Dr Hariri paiera très cher le prix. Hariri est appelé à un face-à-face avec sa conscience et à une auto-critique, pour prendre ensuite un congé dont il a besoin et que les gens méritent. Et à bientôt pour un second mandat, ô “Docteur” Abou-Baha.
- II - Pourquoi Chirac a-t-il agi “avec précipitation” et pourquoi a-t-il dissous l’Assemblée nationale? Les réponses à cette double question sont nombreuses, la plus frappante étant la montée du Front national, après la victoire de Le Pen dans trois circonscriptions, toutes douloureuses pour Jacques Chirac. Il y a, aussi, l’obsession des élections ayant eu lieu dans le passé, au temps du président François Mitterrand et qui ont donné la victoire à la droite, ce qui a contraint Mitterrand à passer des années avec la “cohabitation”: il était le président, mais le Cabinet gouvernait. Ceci l’a forcé à accorder bien des concessions à Chirac qui l’accompagnait et prenait place à ses côtés dans les premiers rangs aux conférences au sommet, ainsi que l’exigeait le changement survenu au niveau du pouvoir. A cela s’ajoute la proche échéance de la monnaie européenne unique. Puis, la crainte d’Alain Juppé d’affronter une fronde s’il entreprend des réformes, par lesquelles il se soucie moins de renforcer sa popularité que de réaliser ses desseins et sa conception du pouvoir. Ce qui s’est passé en 1992 rapprochait le “Rassemblement pour la République” et son allié l’Union pour la démocratie” dont le président est l’ami François Léotard. La relation entre Alain Juppé et le président Chirac n’est pas pareille au lien ayant existé entre Mitterrand et Jacques Chirac. C’est une relation d’amis et de membres de parti. Alain Juppé et Seguin sont restés avec Chirac le jour où tous l’avaient abandonné, y compris Charles Pasqua, Sarkozy et Simone Veil qui se sont rangés du côté de Balladur contre Chirac. Puis, il est le secrétaire du parti. Charles Pasqua s’est prononcé contre la dissolution de l’Assemblée nationale et l’appel à des élections anticipées. “Si, dit-il, Chirac gagne, ce sera un acte important. Mais s’il venait à perdre, il devrait démissionner”, alors qu’il persiste dans sa bataille contre la monnaie unique et contre l’Europe. Par ailleurs, le temps n’était pas propice à la publication des “Mémoires” de Jacques Chaban Delmas, Premier ministre de Georges Pompidou, ayant pour titre: “Mémoires pour demain”. Il y écrit que Jacques Chirac l’avait leurré aux élections de 1974, en menant la bataille présidentielle dans l’intérêt de Valéry Giscard d’Estaing. Ceci est apparu dans la signature par 43 membres du parti d’une déclaration d’appui à d’Estaing contre Chaban Delmas, qui ajoute dans son livre, que Chirac lui avait juré fidélité et soutien cinq jours avant de rendre publique la déclaration d’appui à d’Estaing. Beaucoup considèrent que ceux qui entouraient Jacques Chirac l’avaient soumis à un lavage de cerveau et contraint à procéder à des élections anticipées, parce que les sondages d’opinion donnent une majorité à la droite, la gauche étant éparpillée. Cependant, il fait face, signe de courage, à une part d’aventure. Et nombreux sont ceux qui craignent qu’il n’ait pas tenu compte des risques ou qu’il ait effectué de faux calculs, d’autant que le manque de popularité du gouvernement peut jouer contre lui. Jacques Chirac n’engage pas à la légère son parti et sa popularité est en jeu; la bataille paraît comme s’il s’agit d’une nouvelle élection présidentielle pour Jacques Chirac. S’il venait à la perdre, cela constituerait une atteinte à sa présidence. En dépit de cela, le président mobilise beaucoup de son prestige pour la gagner. Etant donné que le peuple occidental est sujet à des sautes d’humeur, la chute de Churchill et de George Bush en sont deux preuves. Il va sans dire que le fait de minimiser les adversaires conduit toujours à la perte. Dire que Daniel Jospin est peu dangereux, n’est admis par personne, les vents pourraient souffler à tout moment pour ramener les socialistes au pouvoir. Et comme l’écrit la Presse française, tout est prêt pour la victoire, mais le spectacle pourrait faire chuter l’un de ses alliés au dernier moment et provoquer sa propre chute. Ainsi se perdent les efforts déployés par le scénariste, le superviseur des séances d’entraînement avant l’ouverture. L’un des papiers du souffleur pourrait se perdre ou l’acteur serait atteint de surdité, ce qui contraindrait le souffleur à monter sur scène et tout serait connu. Mais dans des cas pareils, ainsi que l’observe Laurent Fabius, ancien président du Conseil socialiste français, “le président n’a aucune fois perdu les élections en France après la dissolution de l’Assemblée; sa victoire est garantie, car les vents soufflent dans son intérêt après la dissolution”. Les Français ont besoin de respirer, surtout pour s’assurer un emploi, combattre le chômage, relever leur niveau de vie et pour toute chose, surtout pour la volonté de changement. Les partisans de Chirac pensent qu’il s’est engagé et a approfondi son engagement dans la bataille, mais non au point de placer ses charges de chef de l’Etat dans la balance. S’il ne s’agit pas d’une décision non calculée, il peut rester, comme le dit un député plaisant. Quant à Chirac, il garantit le succès, parce qu’il est le maître du jeu et en plus de son prestige, il jouit d’un charisme qui confirme sa victoire. Il reste une simple marge pour les revers qui inquiètent Chirac le portant à répéter avec la chanteuse française Patricia Kas: “J’ai peur; oui, j’ai peur de toute chose”, surtout après l’affaire de Jean Tiberi, son successeur à la mairie de Paris, autour duquel et de sa famille bien des points d’interrogation ont été posés. Ce qu’il appréhende le plus, c’est de perdre les élections législatives. Mais tout à l’horizon prouve le contraire. Félicitations à Chirac et à ses partisans pour une nouvelle législature.


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