L’EXHORTATION APOSTOLIQUE A-T-ELLE COMMENCÉ À PORTER SES FRUITS? |
La visite au Liban de S.S. Jean-Paul II et son exhortation apostolique semblent devoir porter leurs fruits plus tôt que prévu. En effet, on relève déjà un changement de ton au niveau officiel et un discours tout à fait différent - du moins dans la forme et en apparence - que celui que les responsables avaient l’habitude de tenir en public! Qui sait ce qu’ils se racontent entre quatre murs? Ainsi, en posant dimanche la première pierre de l’hôpital gouvernemental de Zahlé et en inaugurant le lendemain une conférence (sur l’Internet) chez les Antonins, le chef de l’Etat a usé d’un ton qu’on ne lui connaissait pas jusqu’ici et développé des thèmes auxquels il était resté peu réceptif depuis le début de son sexennat. Les Libanais bien pensants, soucieux du bien-être de leur peuple et de l’avenir de leur pays, se sont égosillés depuis longtemps - et les médias avec eux - à préconiser la mise sur pied d’un Cabinet d’entente (ou de salut public), ainsi que le recommande, d’ailleurs l’accord de Taëf, sans frapper d’exclusion une certaine classe politique. Leurs appels réitérés se sont perdus comme autant de cris dans le désert. C’est la “politique du rouleau compresseur” qui a prévalu jusqu’à ce jour. Il a fallu la venue du Souverain Pontife et la publication de l’exhortation apostolique, pour qu’on commence à déceler un début de changement dans les sphères officielles. Qu’a dit le président de la République dimanche et lundi derniers? Ceci en substance à Zahlé: “Le Liban se relèvera grâce à la solidarité, l’action et à la complémentarité de ses fils... Les Libanais, toutes confessions confondues, de la manière dont ils ont accueilli le Saint-Père, ont démenti tous les mensonges tissés autour d’eux. Ils ont montré le véritable visage du Liban uni; du Liban de la concorde, de la paix opposé à tout confessionnalisme; du Liban épris de liberté, attaché à la démocratie, œuvrant pour le développement équilibré, pour la libération de sa terre (au Sud et dans la Békaa ouest, naturellement); du Liban de Cana, chef de file des Arabes”... Chez les Antonins, il a dit:... “Quinconque milite en faveur de la démocratie et se soucie de la protéger, ne pratique pas l’hégémonisme, lequel et quel que soit celui qui le pratique, est un complot contre la patrie et le processus de paix... LA SOLUTION EST DANS L’EGALITE DES DROITS ET DES CHANCES POUR TOUS LES CITOYENS. De même que dans leur participation à tout dialogue ouvert au sein et en dehors des institutions”... Invité à porter un jugement sur l’exhortation apostolique, le chef du gouvernement tenait les mêmes propos, à quelques variantes près, disant que “Sa Sainteté a appelé les Libanais à rester solidaires et à œuvrer ensemble dans l’intérêt de la patrie; à soutenir le projet de l’Etat et à se prêter à l’interaction avec le monde arabe.” Tout cela est fort beau et édifiant. Mais n’y a-t-il pas lieu de craindre que le nouveau discours officiel, donnant du Pouvoir une image inédite, faite d’ouverture, de compréhension, d’esprit de tolérance et de coopération, se volatilise à plus ou moins brève échéance? Ce qui porterait les citoyens à répéter le dicton populaire: “Ecoutez et vous vous réjouissez, mais à l’essai vous devenez morose”! Le chef de l’Eglise catholique nous a prodigué ses recommandations et a regagné Rome. Maintenant, c’est l’étape de l’application de son exhortation; à nous incombe la responsabilité de mettre ses conseils en application. La classe dirigeante s’exécutera-t-elle ou laissera-t-elle passer une autre occasion qui ne se représentera plus, car “l’homme en blanc” ne retournera pas de sitôt sur nos rivages? |