Chronique


Par José M. LABAKI.

UNE PAIX FAUSSÉE AU DÉPART

De ta bouche je te condamne ô Israël». D’une guerre à l’autre, ainsi va le Proche-Orient. L’espoir d’une paix israélo-arabe, née des accords d’Oslo, s’évapore dans l’incertitude et le désarroi. Le manque de précision des textes et les tapageuses rencontres entre les ennemis jurés d’hier n’arrivent plus à dissimuler ni la réalité des rapports de force, ni la détermination du gouvernement Netanyahu de maintenir sine die l’occupation de larges parties de la Cisjordanie et Gaza, faisant échouer toute tentative d’autodétermination du peuple palestinien dispersé dans le monde. Quatre ans après la spectaculaire poignée de main entre Yitzhak Rabin et Yasser Arafat à Washington, les négociations israélo-arabes sont dans l’impasse. La rencontre probable Netanyahu-Arafat et Hussein de Jordanie, après celle de Nabil Chaat, ministre palestinien de la Coopération internationale et David Lévy, ministre israélien des A.E., à Jérusalem sous l’égide de l’infatigable émissaire de l’Union Européenne, Miguel Angel Aratimos, l’initiative franco-européenne, que le président Jacques Chirac rendra publique incessamment à partir de Bruxelles, vont-elles pouvoir résoudre un problème aussi aigu, vieux de plus d’un siècle? Puissent ces rencontres être un effort sérieux pour une nouvelle définition de la paix au Proche-Orient. Les accords d’Oslo sur les arrangements intérimaires d’autonomie palestinienne à géométrie limitée, signé le 13 septembre 93 entre Yitzhak Rabin et Yasser Arafat, sont-ils désormais caducs?

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Effectivement et comme c’était prévu, il s’agis-sait d’une période intérimaire de cinq ans (1994-1999) pour mettre en place un autogouvernement palestinien présidé par Yasser Arafat, pour négocier par la suite sur le statut définitif de la Cisjordanie et de Gaza; le statut de Jérusalem, le plus épineux entre tous, la définition des frontières des colonies israéliennes; enfin, le sort de la diaspora palestinienne, toujours en suspens, en attendant l’accord final. Cette thématique établie dans des condi-tions assez défavorables aux Palestiniens devait, d’emblée, reconnaître l’Etat d’Israël, sans pour autant reconnaître le droit des Palestiniens à un Etat indépendant et souverain. Toutes les résolutions onusiennes relatives au peuple et à la terre n’étant pas mentionnées, même la résolution 181 prônant le partage de la Palestine en deux Etats l’un israélien, l’autre palestinien, est tombée dans les oubliettes. Les Etats-Unis qui s’étaient engagés durant la guerre du Golfe à appliquer une même règle pour les affaires internationales et l’abandon du principe de deux poids et deux mesures, ont trahi leur promesse. Il aurait fallu au départ édifier une paix juste et durable, étape par étape, une confiance mutuelle de la part des deux partenaires, basée sur une dynamique de la paix et non sur une logique guerrière. Il aurait fallu, surtout, qu’Israël en échange de son intégration dans le contexte proche-oriental, reconnaisse la légitimité des revendi-cations palestiniennes. Il aurait fallu, enfin et surtout, que l’arbitrage américain soit juste, équitable et intègre.

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Devoir est de constater que, quatre ans après les fameux accords d’Oslo, les fondements mêmes de la paix, fragilisés au quotidien, sont à refaire. Si le gouvernement Netanyahu a accéléré les malentendus et les tensions, le gouvernement travailliste, lui, a mal interprété les accords conclus, ce qui a rendu l’entente encore plus compliquée. Depuis 1993, les gouvernements successifs israéliens ainsi que l’opinion publique israélienne n’auraient dé-duit des interminables négociations avec les Pales-tiniens qu’il n’était pas possible d’aboutir à une paix honorable, sans en acquitter le prix. Bien au contraire, la violence bat son plein, les relations avec les Arabes ne sont pas à leur zénith, Israël ne renonçant jamais à sa mentalité hégémonique et ce, au grand dam des résolutions onusiennes condamnant la construction de colonies israéliennes à Jérusalem et dans le reste des territoires occupés. Reste alors, à s’engager sur une autre voie que celle fixée à Oslo, sinon, la paix restera à jamais une pure utopie. Une nouvelle approche du conflit israélo-arabe n’est possible que si l’on sort le plus tôt des principes flous définis par les accords d’Oslo, le retour à ceux déjà fixés par la communauté internationale, à savoir: le retrait inconditionnel d’Israël de la Cisjordanie et de Gaza, de Jérusalem-Est, du Golan et du Liban, le droit du peuple palestinien à l’autodétermination, le droit d’Israël de vivre en paix et en sécurité, dans les frontières internationalement reconnues. C’est à ces seules conditions que les tractations pourraient être, sérieusement, reprises. Les absur-dités et les agressions israéliennes commises au quotidien, ne font que rallumer une poudrière reconnue comme étant la plus dangereuse du monde. Entre temps, Ariel Sharon, le plus rapace des faucons du Likoud, parle de forcer une destitution de Ben-jamin Netanyahu. Serait-ce pour sauver le processus de paix ou sa propre peau? Mission impossible? L’ave-nir nous le dira!


«Il est facile, mais il est surtout absurde d’établir une paix à la lumière d’une logique de guerre.»

(Shimon Pérès à Jean Daniel du Nouvel Observateur)


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