Editorial


Par MELHEM KARAM 

 

... JUSQU’À SON DÉPART OU AU NÔTRE

La politique n’est pas telle que l’a définie Machiavel ou d’autres opportunistes et arrivistes, ni les lâches ayant craint d’assumer la responsabilité de cette définition. Aussi, ont-ils hésité et se sont montrés perplexes, ne sachant quelle position adopter. La politique n’est pas la science des moyens, ni l’art du possible; encore moins la duplicité et le pari sur l’ignorance des gens. La politique est la franchise, la droiture et la transpa-rence. La définition de ce temps suppose plus de moralité, de droiture et de transparence qui demeurent, plus que d’autres, les éléments faisant acquérir au gouvernant sa crédibilité. “Crédibilité” n’est pas la traduction exacte. Disons “crédibilité”, car le terme est français à l’origine et a été traduit, par erreur, selon l’acception turque. Le Pouvoir n’est ni la tromperie, ni la tergiversa-tion, ni la loquacité, ni l’exploitation de l’autorité pour se venger des gens et les attaquer; encore moins de les marginaliser, en essayant de les éliminer et de leur causer du tort. Ce n’est pas, non plus, de l’envie. Il n’est pas permis au gouvernant d’empêcher le bien, d’œuvrer à l’effet de provoquer la faillite des gens et, partant, d’accaparer leurs fortunes pour réaliser un acquis, alors qu’il se fait passer pour un homme probe ayant fait vœu de chasteté, cette dernière n’étant pas l’une de ses qualités. Au contraire, il est connu par sa faiblesse vis-à-vis de ceux qui lui procurent le bien-être... sous toutes ses formes. Redisons-le encore une fois: le pouvoir n’est pas une tentative de réduire les gens à la faillite pour s’emparer de leurs biens ou se les approprier à un prix modique. Le pouvoir n’est pas non plus l’avilis-sement, le commandement étant profondément ancré au sol, n’ayant pas des racines à fleur de terre. Puis, il n’est pas un déni de signature, ni un pari sur l’ignorance des gens, sur leur faiblesse et leur faculté d’oubli. Le pouvoir n’est ni immixtion, ni falsifica-tion, ni hégémonie ou de l’argent mal acquis, par lequel nous tentons de compenser ce que nous avons perdu ça et là, où la falsification est inutile et où on ne peut exercer de mainmise. Si Dieu vous a donné d’être un gouvernant, c’est une grâce dont la récompense consiste à être juste, non à voler et à vous enrichir. La gloire ne doit pas vous inciter à payer son tribut en sanction; autrement dit, à vous venger et à vous réjouir, quand vous voyez les gens se mettre à genoux, supplier et perdre du sang. Le pouvoir n’est ni accaparement, ni une aubaine qui vous pousse à commettre le mal, encore moins à être le maître absolu, vous habilitant à vous immiscer en toute chose. Le pouvoir et la charge directoriale ne sont pas de l’arrogance, ni de la sournoiserie, ni des transactions à entreprendre en catimini; encore moins à promettre une chose et à en exécuter une autre. Ce n’est ni de la hâblerie, ni de la falsification ou la persistance dans l’erreur en refusant d’y renoncer par outrecuidance et orgueil. L’important est moins que les gens acceptent malgré eux nos comportements, mais qu’ils ne nous maudissent pas en leur for intérieur, vivant avec nous à contre-cœur et contraints de tolérer l’étouffement des volontés. Le pouvoir ne consiste pas à occulter tout le monde et à faire reluire notre seule image. Ni à monter les gens contre nous; ou à entasser les inimitiés, à ignorer les accusations et à les passer sous silence, comme si les gens étaient ignares et ne comprenaient pas. Le pouvoir ne consiste pas à tout accaparer, à prendre seul les décisions pour les imposer de force aux autres, à faire sentir aux gens que leur rôle secondaire et marginal en fait “Mister yes” et quiconque ne se soumet pas, n’a pas de place dans nos rangs. Cette façon de penser est révolue et cette logique est rejetée. Des gens du refus sont censés être en permanence parmi nous; ce sont eux qui nous avertissent sur les erreurs, sur leur gravité et leur répercussion sur les gens. Sinon comment expliquer que le courant ne passe pas entre nous et les gens ou que les grands murs et les hauts barrages demeurent infranchissables? De ce fait, nous n’atteignons pas les cœurs, alors que nous prétendons accomplir des miracles. Et quels miracles! Tout cela est prétentions, mensonges et incohérences. Ce genre de pouvoir engendre chaque jour de la rancune et suscite une vague de mécontentement que nous transmettons à nos camarades au niveau de l’autorité, en en rejetant la faute à Taëf et à tous les gens du pouvoir. Au lieu de leur procurer le soutien populaire et l’affection des masses, nous incitons à la rancune contre eux, à les haïr, à renier le pouvoir et ses significations. De cette façon, nous portons les gens à désespérer de cette sorte de pratiques. Un pareil pouvoir, les gens ne lui pardonnent pas, ni ne l’acceptent tant que nous avons nos plumes, notre lutte et tant qu’il existe une Presse honnête qui reste le seul recours, l’unique refuge, la force étant celle du verbe, la force de la Presse libre, laquelle est le critère de la paix et du bien au Liban. Un sondage de “Sofres”, “Ifop” et de tout organisme spécialisé dans les sondages d’opinion, nous indiquera que le pouvoir ne bénéficie pas de l’appui de dix pour cent, ceux qui l’appuient le faisant par intérêt, non par conviction de sa grandeur et de l’utilité de ce qu’il entreprend. Un gouvernant non valable, arrogant et affligé du complexe de supériorité, nous ne l’admettrons pas, quel qu’il soit... Nous continuerons à le combattre avec férocité... jusqu’à ce qu’il s’en aille ou que nous partions.

Photo Melhem Karam


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