XVe CONGRÈS DU PARTI COMMUNISTE ET AMBITIONS DE LA CHINE POUR DOMINER LE XXIe SIÈCLE 

Le Premier ministre Li Peng annonce l’ouverture  du XVe congrès. A ses côtés, le président Jiang Zemin. 

Premier congrès depuis la disparition, en février dernier, de Deng Xiaoping, le dernier datant de 1992, le XVe congrès du Parti communiste chinois tenu dans l’immense Palais du Peuple de Pékin, en présence de 2.048 délégués choisis parmi 58 millions de membres du parti, du 12 au 18 septembre, a entamé ses travaux dans la solennité et la pompe inhérentes au système. Il avait été précédé d’une grande offensive médiatique qui a atteint son point culminant avec l’exclusion du PCC et la prochaine mise en justice de Chen Xitong, ancien maire de Pékin et chef du PC de Pékin dont la disgrâce en avril 1995 avait touché quarante-cinq employés de la municipalité, responsables de détournements de fonds publics de l’ordre de trois milliards de dollars. L’opération, placée dans le contexte de la lutte contre la corruption, était destinée à embellir l’image des dirigeants auprès du peuple qui dénonce cette corruption. Le congrès a suscité des espoirs auprès de certains intellectuels et dissidents. L’un de ceux-ci, dans une lettre ouverte au congrès, a espéré que cet événement “marquera un tournant qui engagera la Chine sur la voie de la démocratie, de la liberté et le respect des droits de l’homme”. Vœux pieux ou espoirs réels?

Délégués de l’Armée de libération du peuple
arrivant au Palais du Peuple à Pékin,
à l’occasion du XVe congrès du PC chinois.

UNE AUTRE NOTION DE LA DÉMOCRATIE
Ceux qui espéraient que les réformes économiques seraient accompagnées de réformes politiques ont été déjà frustrés par les déclarations faites, la veille de l’ouverture, par le porte-parole du congrès, M. Xu affirmant que “la Chine ne copiera jamais le système démocratique occidental” et que ce qu’on appelle privatisation ne peut être confondu avec “un système d’actionnariat” que la Chine va devoir développer au niveau des entreprises. Celles-ci, au nombre de 88.000, représentant 55% de la production nationale, sont grevées de dettes, mais contribuent à une croissance annuelle de 10%. Ceci accélère la montée en puissance de la Chine qui ambitionne, dès aujourd’hui, d’occuper la première place au milieu du XXIe siècle. Privatisations ou pas, les réformes économiques en cours, quels que soient les bouleversements qu’elles entraînent dans la vie d’un milliard deux cents mille hommes, devront permettre à terme un changement de société qui s’effectue déjà dans l’amélioration du niveau de vie, bien que soixante millions de Chinois ne mangent toujours pas à leur faim - la transformation du paysage et l’afflux des paysans vers les villes. Dans son discours inaugural de deux heures et demie, le président Jiang Zemin, 71 ans, en même temps chef du parti et de l’armée, qui tente d’assurer, définitivement, son emprise sur l’ensemble de l’appareil de l’Etat, a indiqué qu’il fallait “ouvrir de nouvelles voies au lieu de suivre les sentiers battus” et que par contre “les conclusions tirées des expériences passées démontrent que seul le Parti communiste peut conduire le peuple à la victoire et améliorer son niveau de vie”. Hommage rendu à Deng Xiaoping dont la pensée rejoint, désormais, celle de Marx, Lénine et Mao Tsétoung, une certaine ouverture au niveau des libertés avec la possibilité d’appliquer au niveau des villes le mode d’élection démocratique des représentants, mais durcissement au niveau de l’information avec un contrôle accru des médias. Et une initiative spectaculaire: la réduction avant l’an deux mille de 500.000 soldats de l’armée qui en compte trois millions.

NOMINATIONS ET CHANGEMENTS
On attend du congrès des décisions majeures, au niveau du partage des responsabilités notamment. La Constitution ne permet pas au Premier ministre Li Peng, 68 ans, de solliciter un troisième mandat. Il devrait céder sa place à Zhu Rongji, 68 ans, artisan des réformes économiques et assumer en principe la présidence de l’Assemblée nationale. Mais Qiao Shi, 73 ans, qui occupe ce poste, ne peut pas partir sans recevoir de compensations. Une partie de chaises musicales difficile et délicate pour le chef d’orchestre Jiang Zemin qui voudrait écarter de la scène politique ses principaux rivaux. Très attendue, l’élection des cent quatre-vingt-huit membres du Comité central. Celui-ci, aussitôt formé, devra tenir son premier Plénum en vue de procéder à des nominations majeures: celles des vingt-et-un membres du Bureau politique, des sept membres de la Commission permanente du Bureau politique, du secrétaire général et de la Commission militaire centrale. Le puzzle définitif de la nouvelle direction du régime communiste ne sera achevé qu’en mars 1998 où sera formé, à l’occasion de la prochaine session parlementaire, le nouveau gouvernement. Mais cette nouvelle direction sera annoncée à la fin du congrès, confirmant l’autorité de Jiang Zemin qui, tout en n’ayant pas le charisme de ses prédécesseurs, n’en nourrit pas moins de grandes ambitions pour son destin personnel et celui de l’immense pays. EVELYNE MASSOUD


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