LES  ÉTATS-UNIS ET LES ÉCHÉANCES MANQUÉES


Déclaration de Bill Clinton au sujet des mines antipersonnel. 
A gauche, Madeleine Albright, à droite William Cohen.
Les Etats-Unis sont-ils susceptibles d’infléchir leur position, de se rallier finalement au processus d’Ottawa, qui devra trouver sa consécration en décembre prochain par la signature du traité d’interdiction des mines antipersonnel pour lequel la princesse Diana avait ardemment milité et que sa mort tragique a, en quelque sorte dynamisé?
Le président Clinton, contraint de dire “non” au traité en raison “d’impératifs planétaires”, est pourtant pressé de se montrer flexible et de dire “oui” par Hillary et Chelsea; sa petite cellule familiale; par les vétérans du Vietnam, une majorité de parlementaires au Congrès, le général Norman Schwarzkopf et le “New York Times”. C’est fortement embarrassé, qu’il a annoncé la décision américaine allant à l’encontre des quatre-vingt dix pays signataires du traité.
 
Nouveau détecteur de mines donné 
à ses soldats par le président du Honduras, 
Carlos Roberto Reina, dans le cadre 
d’une opération de déminage baptisée 
du nom de la princesse Diana.
 
Robert Frowick, chef de l’OSCE, 
réuni avec Biljana Plavsic à l’issue 
des élections municipales.
 
 

FACE À LA CHINE ET À LA RUSSIE
Rejoignant sur le tard la conférence d’Oslo (1-19 septembre), les Américains ont tenté d’obtenir des exemptions pour leur pays: un sursis de neuf ans et le maintien de plus d’un million de mines antipersonnel sur la DMZ qui sépare les deux Corées, le long de laquelle stationnent 37.000 soldats américains et que pourraient menacer les 900.000 soldats de l’armée nord-coréenne. Le président Clinton a, à cette fin, sollicité les dirigeants de la planète, essuyant un refus poli de leur part: Comment l’Amérique pouvait-elle présenter au monde l’image indiscutable de défenseur des droits de l’homme alors qu’elle était sur le point de les bafouer ostensiblement? Mais comment en revanche rallier le mouvement alors que la Chine et la Russie en sont absents, de même que l’Irak, la Libye, la Corée du Nord qui peuvent impunément narguer le monde?
Les stratèges du Pentagone veulent, avant tout, défendre les intérêts américains et la sécurité des GI’s lancés dans des missions périlleuses. Tant que leurs fils sont impliqués quelque part dans des zones chaudes du monde, les Américains peuvent à tout instant exercer des pressions décisives sur l’opinion publique et la retourner contre leurs dirigeants. Leur isolationnisme les rend peu sensibles aux conflits internationaux qui ne mettent pas en péril leur propre sécurité.
Pour se racheter quelque peu devant l’opinion internationale ayant accueilli avec soulagement le texte du traité - qui interdit la fabrication, le stockage, l’exportation et l’utilisation des mines antipersonnel dont 110 millions sont aujourd’hui dispersées dans 64 pays et qui font chaque année 26.000 victimes - le président Clinton a promis l’élimination des mines de l’équipement militaire américain avant l’an 2006 et la mise en place de structures pour en interdire l’exportation.

INCERTITUDES SUR LA PRÉSENCE DES TROUPES AMÉRICAINES EN BOSNIE AU-DELÀ DE JUIN 1998
Autre incertitude: le maintien du contingent américain en Bosnie au-delà de juin 1998. Le discours que tiennent la Maison-Blanche et le Département d’Etat n’a guère varié quant au départ des “boys” à la date prévue. Et pourtant, des voix discordantes se font entendre et sèment la confusion auprès des partenaires européens, notamment les Français et les Anglais qui annoncent leur éventuel départ, en même temps que celui des Américains et reconnaissent que ce départ est prématuré. Car rien n’est réglé sur le terrain, l’application des accords de Dayton étant restée théorique. Ceux-ci ont ramené la paix en territoire bosniaque, sans parvenir à faire cœxister les ethnies départagées par le sang et les larmes.
Initialement, fin 1995, le contingent américain s’élevait à 20.000 hommes opérant au sein des 37.000 éléments de la Sfor (Force de stabilisation de l’Otan). Cette présence est à présent réduite à 8000 hommes dont la mission devait s’achever en douze mois mais qui a été prolongée jusqu’à ce jour.
Un éventuel départ de la Sfor en juin 1998 est considéré comme une catastrophe par Carlos Westendorp, haut représentant civil en Bosnie, de même que par le secrétaire général de l’Otan, Javier Solana. Les Américains savent bien que la paix est loin d’être institutionnalisée en Bosnie et que leur départ est perçu comme un «désastre pour l’Occident». Le secrétaire à la Défense, William Cohen estime que la question du départ n’est pas encore «réglée» et que «si nous nous en allons (les autres) s’en iront aussi et la guerre pourrait reprendre».
De crainte de s’enliser dans les sables mouvants de la Bosnie, les Américains accentuent les pressions sur les protagonistes afin de hâter l’application des accords de Dayton. Ils ont exprimé leur satisfaction, par le truchement de l’OSCE, à l’issue du scrutin municipal pacifique qui s’est déroulé en Bosnie, mais a ramené sur le terrain les mêmes protagonistes sans espoir de les voir s’entendre réellement au sein d’un pays impossible à unifier.
Entre-temps, les ennuis ne manquent pas pour Bill Clinton qui vient d’accompagner sa fille Chelsea à l’université de Stanford.
Le Département de la justice a annoncé l’ouverture d’une enquête préliminaire sur le financement de la campagne électorale des démocrates aux Etats-Unis. Al Gore à qui on reproche d’avoir donné 81 coups de fil à partir de la Maison-Blanche - ce qui est interdit à des fins électorales-est déjà dans le collimateur. Les républicains entendent lui barrer la route des présidentielles de l’an deux mille pour lesquelles il part favori.


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