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EMPOIGNADES ET BAVURES MADE IN USA |
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Depuis
la fin de la guerre froide entre les Etats-Unis et l’Union soviétique
et leurs satellites, la politique étrangère américaine,
perturbée par les bavures et les empoignades entre Maison-Blanche
et Congrès, ressemble à une mauvaise pièce boulevardière,
où le ridicule le dispute à l’inconsistant. L’opinion mondiale
scandalisée s’interroge: où va l’Amérique clintonienne?
Frustrée par la décision française de soutenir la compagnie Total dans son investissement en Iran, l’administration américaine montre ses griffes, sommant d’appliquer l’étrange loi d’Amato (2) qui prévoit la pénalisation de toute entreprise américaine ou autre, investissant dans le secteur énergétique irano-irako-libyen. “Casus belli” s’écrie Madeleine Albrigt. “Les lois américaines s’appliquent à l’Amérique”, conteste Lionel Jospin, et Boris Eltsine de renchérir: “la Russie, la France et l’Iran, sont des pays indépendants et ne reçoivent des ordres de personne.” Toutefois, l’affaire Total n’est qu’un incident parmi tant d’autres. Partout où l’on regarde, les bavures le cèdent aux controverses. Une fois la diplomatie américaine saute sur les mines antipersonnel après avoir annoncé “Urbi et Orbi” que “les enfants américains méritent de circuler en toute sécurité, à l’abri de tout danger d’où qu’il vienne”, Bill Clinton sous la pression de ses cassandres et de sa parentale politique refuse finalement de signer ledit traité. Quelques temps après, le même Bill Clinton déclare sans équivoque que les Etats-Unis sont prêts à payer les arriérés dus à l’ONU, ce qu’il avait déjà promis durant son premier mandat, promesse dit-on, jusqu’à présent non tenue. Dans les couloirs du Congrès américain, les phénomènes les plus étranges se manifestent au quotidien. En voici quelques specimens: Un congressman de New Jersey, ennemi juré de l’avortement, vient de tout bloquer, en ajoutant un amendement déniant toute aide américaine aux organisations soutenant l’interruption volontaire de la grossesse. On a vu, tout récemment, le président de la commission des Affaires étrangères du Sénat, “l’atra-bilaire” Jess Helms, clouer le bec à ses collègues voulant auditionner le candidat de la Maison-Blanche au poste d’ambassadeur au Mexique, lequel ne cache pas d’ailleurs sa répugnance pour l’ONU. Pour sa part, le secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan, lors de sa première visite au Congrès, s’est avoué stupéfait en écoutant les aveux paranoïaques de certains sénateurs. Encore ne s’agit-il ici que des ratés de circonstances. Car si l’on voulait citer toutes les incartades on n’en finirait jamais! Au niveau de la zizanie, les Etats-Unis ont pratiquement troqué
leur rôle de leader mondial contre celui de boss international, mettant
le monde à sa remorque. Exemple récent de ce rôle de
“boss”: l’élargissement de l’OTAN, la loi d’Amato et son équivalent
pour Cuba, avalisées par la Maison-Blanche sans ignorer, bien sûr,
l’éviction arrogante de Boutros Ghali à la tête de
l’ONU.
La démocratie américaine telle que pratiquée aujourd’hui,
survivra-t-elle à l’an 2000? Poser la question, sonne comme une
provocation. Nous avons toujours cru à la démocratie. Nous
sommes persuadés qu’elle est le meilleur moyen pour régler
l’horloge mondiale, à condition de limiter le pouvoir impérial
qui refait surface, en multipliant les pôles régulateurs à
l’échelle mondiale, en veillant surtout et d’abord, à éviter
toute éventuelle collusion entre eux. Comprendre les règles
du jeu du nouvel ordre mondial, c’est être en mesure non de lutter
arbitrairement contre lui, mais de sauver ce qui peut et doit l’être
de l’idée de liberté.
(1) Ancien doyen de “Sloane school”, la plus prestigieuse école
de “management” des Etats-Unis.
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![]() “Ayant perdu l’autorité morale que leur confère leur rôle de dépositaires de la démocratie, manipulés par des intérêts malsonnants, les Etats-Unis sont de plus en plus soupçonnés de ne condamner les bavures et les corruptions que pour protéger ce qui leur reste de pouvoir.” Lester Thurow (1).
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