Pourtant, on découvre toujours dans la personnalité de
cet écrivain au physique juvénile, dans la profondeur de
sa réflexion, dans ses yeux au regard à la fois tendre et
perçant, un étonnant mélange de rigueur, de sensibilité
et un désir toujours inassouvi de défendre l’Etat de droit,
en tant qu’avocat, le Liban meurtri, dans ses poèmes et ses écrits;
enfin, Galilée, que “l’Astronome” réhabilite.
Car “l’Astronome” est une longue plaidoierie en faveur d’un Galilée
jalousé, incompris, “affublé” de tous les défauts:
l’égocentrisme, l’entêtement, l’arrivisme, la recherche de
la gloire personnelle. Cet homme, assure l’auteur, travaille toute
sa vie pour la science et la vérité au mépris de douleurs
atroces qui lui transpercent le corps, alors que lui, inlassable essaie
de percer les secrets de l’Univers.
GALILÉE BLANCHI
Point par point, dans un style qui n’est plus à présenter,
l’auteur réfute les accusations portées contre son personnage
et le blanchit totalement: plus que grand savant, Galilée est un
grand homme.
Mais, d’abord, comment est né ce roman dont Galilée est
le héros, du temps ou l’émir Fakhreddine II résidait
à la Cour de Florence sous le règne des Médicis, sur
fond d’idylle entre un disciple de Galilée et une jeune Libanaise
de la suite de Fakhreddine?
Dans sa conférence à la Salle Ernest Renan (au salon
“Lire en Francais et en Musique 97”) en présence, notamment de M.
Jouanneau, ambassadeur de France et de son épouse ainsi que de nombreuses
personnalités, Me Najjar déclare que son livre est né
d’une interrogation: Qu’a donc bien pu faire un émir libanais (en
l’occurrence Fakhreddine II), contraint à s’exiler en Toscane (après
l’invasion du Liban par les Ottomans), sur une terre qui lui était
totalement inconnue, dont les mœurs étaient si différentes
de celles qu’il connaissait?”
FAKHREDDINE II À FLORENCE
“En fait, indique l’auteur, Fakhreddine passait son temps à
visiter les merveilles et les musées de Florence et à essayer
de convaincre le Grand duc de Toscane de la nécessité d’un
débarquement au Liban pour le libérer.
“Une autre question s’est, alors, imposée: A l’époque
où les Médicis régnaient sur Florence avec l’affluence
de savants et d’artistes de l’époque que cela suppose, est-il
possible que l’émir n’ait pas rencontré nombre d’entre eux
dont Galilée?”
Mais Galilée et Fakhreddine se sont-ils vraiment rencontrés?
Le conférencier estime “qu’un romancier peut faire en sorte que
deux lignes parallèles se rencontrent et peut combler par le fruit
de son imagination les lacunes de l’Histoire”. Il énumère
les “rayons” de ce faisceau d’indices auquel recourent les avocats pour
établir une certitude: Fakhreddine et Galilée étaient
tous deux les protégés du Grand duc; ils étaient conviés
aux mêmes festivités mais, surtout, se trouvaient à
la même époque à la Cour du même roi. De plus,
Fakhreddine était passionné par l’astronomie, ce qui conforte
la présomption d’une rencontre.
Mais là n’est pas la question: Galilée, jalousé
et accusé d’hérésie, tombe dans le piège du
débat théologique et est contraint d’abjurer, devant ses
juges, toutes les idées qu’il a jusque-là professées...
“Et pourtant elle tourne” dira-t-il, faisant allusion à la Terre
et à sa rotation autour du soleil.
Considéré comme un héros jusqu’au XIXème
siècle par les romantiques notamment, Galilée se trouve,
au XXème siècle, une fois de plus condamné à
titre posthume cette fois, par des écrivains tels que Bertold Brecht
dans “la Vie de Galilée” et Arthur Koestler, dans “Les Somnambules”
qui jettent le discrédit sur ce grand savant et le démythifient.
Me Najjar reprend la tradition des romantiques, convaincu, dit-il,
que “la grandeur d’un homme ne se mesure pas à ses actes politiques
militaires... ou autres mais à son parcours en tant qu’homme.” “Or,
Galilée était tout cela: son combat contre la douleur, son
amour de la vie, de la science, de la poésie, son obstination à
accéder à la vérité, son combat contre les
ténèbres organisées et l’obscurantisme sont un exemple
pour tous, en particulier, pour nous Libanais dans notre lutte en faveur
d’un Etat de droit”.
VIE AFFECTIVE
Seule ombre à ce tableau presque parfait qu’il dépeint:
la vie privée de Galilée qui, ayant eu maritalement trois
enfants d’une femme de condition inférieure à la sienne,
est pressé par sa mère de la quitter avant de partir pour
Florence.
A partir de ce jour, sa vie affective ne sera plus qu’un “désert”.
Au seuil de la mort, aveugle et paralysé, il réalise enfin
l’importance de l’amour. Mais il est trop tard.
Dans “L’Astronome”, François qui est le disciple de Galilée,
admire et imite son maître en tous points, sauf en amour. Prenant
conscience de son importance (l’amour), il s’embarque dans une relation
amoureuse passionnée avec Najla, une jeune Libanaise venue avec
Fakhreddine en Italie. Mais le destin va s’opposer à leur idylle
Najla étant obligée de réintégrer le Liban
avec ses compatriotes. François restera, cependant, fidèle
à son souvenir. Il ira se recueillir à l’ombre du Cèdre,
témoin et symbole de la pérennité de leur amour...
En 1992, le Pape Jean-Paul II avait, en quelque sorte, réhabilité
Galilée, en niant que son conflit avec l’Eglise soit autre chose
qu’une “tragique incompréhension réciproque” et qu’il ne
doit pas être considéré comme la preuve d’une incompatibilité
entre la foi et la science ou du refus par l’Eglise du progrès scientifique.
En 1997, Alexandre Najjar veut réhabiliter un Galilée
“incompris”.
Encore un procès de gagné avec “L’Astronome” qui est
un hymne à la Vérité et à l’Amour.
Alexandre Najjar.
Né à Beyrouth le 5 février 1967. Avocat au Barreau de Beyrouth. Auteur, entre autres, de:
Prix obtenus:
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