Editorial


Par MELHEM KARAM 

 
NETANYAHU ET SON AVENIR ANGOISSÉ  

Pauvre Netanya-hu, il traverse la pire phase de son règne. La duplici-té, le compromis, les transactions et l’affaire de Bar On; puis, la négligence dans l’en-quête sur l’assassinat de Rabin et l’erreur ayant consisté à char-ger le “Mossad“ de liquider Khaled Ma-chaal, secrétaire gé-néral de “Hamas“, en Jordanie, ce qui l’a contraint à se prêter à des compromissions et à accorder des concessions pour le circonscrire... voilà autant de scandales qui se sont amoncelés pour faire de Netanyahu une victime prête à tomber. 
Au cours d’un périple l’ayant mené de Londres aux Etats-Unis, il n’a pas entendu ce qu’il voulait entendre, ni de Tony Blair, ni de Madeleine Albright. De même, il n’espère pas avoir la faveur des USA et du président Bill Clinton, en personne, qui a hésité à le recevoir. Ce qui lui fait sentir son grand isolement, d’autant qu’un mouvement de dissidence se manifeste au sein du Likoud, tendant à la formation d’un parti autre que celui dont Netanyahu est le leader, groupant de grandes têtes de cette formation politique. 
L’isolement, Netanyahu le ressent chaque jour davantage, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur. Les résultats de sa visite aux USA après la Grande-Bretagne qu’il a planifiée et organisée, peuvent être décisifs par rapport à son avenir politique. Il pourrait être exclu du pouvoir ou être porté à s’en éloigner. Il serait amené à résigner ses charges officielles avant que la base du parti l’en évince, après que les gens aient réalisé que tout chef de gouvernement se disant criminel et instigateur à l’assassinat, ne mérite pas ce titre, en un temps où s’accroît chez les gens bons et honnêtes, le sentiment humain et où ils vibrent avec les droits de l’homme. 
Bien que le programme de la visite ne prévoit pas une rencontre avec le président américain, Israël en a annoncé, à l’avance et unilatéralement, la date, pour placer Clinton devant le fait accompli avec une outrecuidance peu commune. Ceci a suscité une tension dans les relations entre les deux pays. Netanyahu a agi de la sorte, partant de sa conviction que si la rencontre n’avait pas lieu, il serait le premier chef de gouvernement israélien à être boycotté par la Maison-Blanche. 
Quatre jours après la manifestation monstre ayant rassemblé, samedi dernier, des centaines de milliers de partisans de la paix, à l’occasion du second anniversaire de l’assassinat de Yitzhak Rabin, injuriant Netanyahu qui a été pris de court par les sondages d’opinion, Ehud Barak, leader du parti travailliste rejetant tout compromis dans la question de la paix, paraît promis à un leadership plus large, dans le cadre des surenchères auxquelles s’adonne le chef du Likoud. 
Barak dit qu’il n’est pas possible d’accorder une concession et de se taire dans l’affaire de la coloni-sation. “De même, assure-t-il, nous refusons d’évacuer la Cisjordanie“. 
Ainsi, le monde semble s’écrouler, colonne après colonne et pierre après pierre autour de “Bibi“. 
La plupart des Etats arabes ont boycotté le forum économique pour le Moyen-Orient et l’Afrique qui s’est ouvert, samedi dernier, à Doha et considéré par les Américains comme une nécessité par rapport au processus de paix et à la crise opposant l’Irak aux Nations-Unies. Washington persiste à donner la preuve de sa fermeté à l’égard d’Israël, estimant que Netanyahu doit tenir compte de l’ultimatum lancé par la Maison-Blanche quand elle a rayé le Liban et la Syrie de la liste des Etats impliqués dans le terrorisme, la fabrication et la propagation des stupéfiants. 
Sur le plan intérieur, Benjamin Netanyahu s’était exposé à un revers au sein de son parti, le Likoud, qui l’a désavoué dans une question d’ordre tech-nique, en rapport avec sa manière de se comporter, objet de critique et de griefs. Cette attitude rassemble autour de lui une majorité à l’intérieur de son parti. Sa rencontre avec Madeleine Albright à Londres a eu lieu sous le signe du blâme. Le chef du département d’Etat US lui a laissé entendre que le président Clinton et les Etats-Unis ne pouvaient pas continuer à couvrir les erreurs, à les camoufler ou à les bénir. Qu’elle n’accepte aucune tergiversation quant à la perpétuation de la politique de colonisation. Et que toute arrogance et velléité de supériorité de sa part à ce sujet pourraient le priver de la bénédiction de l’Administration américaine et de son satisfecit. 
Ainsi, il retournerait amoindri dans son pays, après qu’on lui eut rogné les ailes, menacé à tout moment de voir le président Clinton renoncer à lui apporter son soutien. Approchant du terme de son mandat, ce président n’est plus hypothéqué par son avenir politique, au point de tenir compte de la colère ou de la satisfaction du lobby israélien qui pèse dans la balance électorale. 
Le président Clinton a dit devant un certain nombre de ses collaborateurs: “Un chef d’Etat doit quitter le pouvoir la conscience tranquille, affranchi de toute pression de la rue susceptible de l’apeurer et d’affecter son avenir politique“. 
Il a conclu: “L’avenir politique de tout gouvernant réside dans le repos de sa conscience et rien d’autre. Il ne lui est permis de tomber sous l’effet d’aucune pression, afin que son règne et sa décision ne soient pas entachés par la déviation et la partialité“. 

Photo Melhem Karam

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