RENCONTRE AVEC LE MINISTRE DE LA DÉFENSE MOHSEN DALLOUL:
"JE NE PARVIENS PAS À DÉMISSIONNER DU GOUVERNEMENT À CAUSE DES PRESSIONS DES PRÉSIDENTS HRAOUI ET HARIRI"

 
 
 
 
 
 

Parfois j’ai envie de renoncer à tout par dégoût ou désespoir 
 
 
 
 
 
 
 
 

De ma position, je me soucie d’interdire l’immixtion de la politique dans l’Armée et vice-versa 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Joumblatt a quitté le Conseil des ministres pour protester contre ma défense de la Grande Muette 
 
 
 
 
 
 
 
 

Le gouvernement ne souscrit pas à toutes les décisions de son chef 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Certains visent à profiter du mouvement de cheikh Toufayli et à le mettre en conflit avec le “Hezbollah” 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Le général Lahoud est mon candidat à la magistrature suprême

Un civil à la tête de l’institution militaire, cela s’est toujours produit depuis l’avènement de l’ère d’indépendance. Mais l’actuel titulaire du portefeuille de la Défense se caractérise autant par sa souplesse, que par son esprit d’ouverture. 
Aussi, est-il arrivé à soutenir la candidature d’un militaire, en l’occurrence le général Emile Lahoud, commandant en chef de l’Armée, à la magistrature suprême, tout en émettant des réserves à propos du rejet, par le président Hraoui, d’une telle candidature, partant de la conviction du chef de l’Etat que l’arrivée d’un militaire au pouvoir, signifierait la mainmise de l’Armée sur les institutions étatiques, comme ce fut le cas sous le sexennat du général Fouad Chéhab. 

J’AURAIS PRÉFÉRÉ EXERCER MON MANDAT DE DÉPUTÉ 
M. Dalloul a, maintes fois, exprimé son désir de quitter le gouvernement pour pouvoir exercer son mandat de député. A la question: “Pourquoi n’avez-vous pas agi dans ce sens?”, il répond: “J’ai la certitude de mieux accomplir mon rôle en tant que parlementaire, l’action du député constituant le pilier fondamental de la vie politique. J’estime qu’il n’existe pas de système de blocs parlementaires au Liban, en ce sens qu’il n’y a pas de groupe au sein de l’Assemblée ayant un programme défini liant tous ses membres. 
“Puis, l’information constitue, également, un pilier de la vie politique pratiquement inexistante.” 

- Et vous autres les hommes politiques contribuez à la déséquilibrer... 
“Oui, je l’admets. Mais en même temps, je constate que les moyens d’information ont de plus en plus tendance à opter pour le sensationnalisme, leurs manchettes donnant l’impression que le Liban s’achemine vers la catastrophe. Or, l’information doit être réaliste et tenter de remédier à la situation lorsque celle-ci laisse à désirer. 
“En définitive, le Liban est un pays de services basé sur la confiance de l’étranger. Nous ne devons pas effaroucher les investisseurs, en dissipant leur confiance dans notre pays.” 
M. Dalloul insiste, ici, sur la nécessité de réactiver la vie des partis, sans laquelle la démocratie ne peut être pratiquée d’une manière normale. “Il n’y a pas de liberté sans idéologies qui s’affrontent dans les domaines politique, économique et social. De même, le mouvement syndical a dévié de sa ligne initiale et se mêle à la vie politique.” 

LES MOUVEMENTS SYNDICAL ET ESTUDIANTIN 
- N’est-ce pas la conséquence de l’ingérence du Pouvoir et de la politique? 
“Le mouvement syndical parle de tout, surtout de politique, sauf des questions intéressant la classe laborieuse. Il en est de même du mouvement estudiantin qui a perdu de son importance chez nous.” 

- Qu’est-ce qui vous empêche de renoncer à vos charges gouvernementales? 
“Il m’est difficile de le faire, car bien des pressions sont exercées sur moi de l’intérieur, plus exactement des politiciens qui me disent: “Ce n’est pas le moment; patientez encore”. Puis, on me confie des missions et j’ai la sensation d’être confronté à un défi à relever.” 

- Pouvez-vous citer, nommément, les personnes qui exercent des pressions sur vous? 
“Le chef du gouvernement, le président de la République et certains collègues. Au moment de la formation de l’actuel Cabinet, j’ai annoncé que je ne voulais aucun portefeuille ministériel; puis, j’ai dû accéder au désir du chef du gouvernement.” 

LE COMMANDANT EN CHEF DE L’ARMÉE, UNE GARANTIE 
- Peut-on vous présenter en tant que ministre d’Etat ou sans portefeuille, étant donné les larges prérogatives dont jouit le commandant en chef de l’Armée? 
“Pas du tout, car chacun a ses attributions clairement définies par la loi. Ma tâche est d’empêcher la politique de s’ingérer dans l’institution militaire et vice-versa. Nous nous complétons, le commandant en chef et moi-même. Le général Lahoud est une garantie en lui-même et je m’entends avec lui sur tous les sujets.” 

- D’aucuns disent que vous n’avez pas assuré la protection politique suffisante à l’institution militaire, preuve en est le fait pour cette dernière d’avoir été contrainte de répondre aux attaques de certains politiciens... 
“Je désapprouve la diffusion de communi-qués de la part des militaires, car je les juge injustifiés. Pourtant, j’ai assuré aux militaires une couverture politique complète; je ne peux leur donner davantage.” 

- Le ministre des Déplacés, Walid Joumblatt, a violemment pris à partie l’Armée et vous n’avez pas jugé nécessaire de lui répliquer... 
“J’ai eu une altercation verbale avec M. Joumblatt en Conseil des ministres à cause de cela, tout le monde le sait. Cependant, je dois être informé de ce qui se passe faute de quoi je n’assume aucune responsabilité.” 

- Doit-on déduire de vos paroles que vous n’êtes pas mis au courant parfois de ce qui se passe dans l’institution militaire? 
“Non, ce n’est pas le cas. Mais quand une polémique est instituée entre Joumblatt et l’Armée, je dois savoir la cause de ces attaques réciproques. Je suis, alors, amené à prendre position. Walid Joumblatt a quitté, une fois, le Conseil des ministres en signe de protestation, parce que je me suis opposé à ce qu’il critique l’institution militaire.” 

- Qu’est-ce qui l’incite à critiquer la Grande Muette? 
“Maintes causes sont à l’origine de son comportement. Tous savent qu’il a d’anciens ressentiments à l’égard de l’Armée et cela pourrait être hérité de sa famille.” 

QUID DE LA “RÉVOLTE DES AFFAMÉS”? 
- En tant que ministre et député de Baalbeck-Hermel, pourquoi avez-vous laissé cheikh Soubhi Toufayli prendre l’initiative de revendiquer des projets intéressant ce caza et vous êtes-vous contenté d’appuyer ses doléances? 
“Ces doléances sont celles de toute la région. Je les approuve, tout en dénonçant les moyens utilisés pour en obtenir la satisfaction. Ce caza est négligé de longue date, depuis des années et même avant l’avènement de l’indépendance.” 

- Mais le gouvernement n’a réagi qu’après la proclamation de la “révolte des affamés”. 
“Nous devons admettre que la région n’a jamais connu la réalisation de tant de projets: pour la première fois, des routes sont percées; il est procédé à l’adduction de l’eau potable et à l’extension du réseau téléphonique. Ce qu’il manque à Baalbeck-Hermel, c’est la création de nouveaux emplois et cela ne s’obtient pas par les moyens négatifs ou en faisant peur aux investisseurs. 
“Le gouvernement a décidé depuis un certain temps de transformer Rayack en zone franche et de réaménager son aéroport.” 

- Pourquoi ces projets tardent-ils à être exécutés? 
“C’est une question importante. En Conseil des ministres, lorsqu’a été prise la décision de confier à l’Armée le soin de maintenir l’ordre dans la région, j’ai dénoncé le retard mis à concrétiser les projets mentionnés, en plus de celui relatif à l’autostrade arabe. Le secteur agricole est, également, négligé. Ces problèmes peuvent-ils être traités par le négativisme? Pas du tout; ils nécessitent des pressions positives et non négatives, telles d’interdire l’accès du caza aux ministres et aux députés.” 

OÙ SONT LES 150 MILLIARDS? 
- Le gouvernement semble avoir encouragé cheikh Toufayli à opter pour le négativisme; preuve en est, qu’il a approuvé l’affectation de 150 milliards de livres aux projets de développement dans la région... 
“Où sont les 150 milliards; nous n’en avons rien vu jusqu’ici.” 

- Le président Hariri dit que les crédits seront alloués avant la fin de l’année. 
“Il n’en existe rien, croyez-moi. Nous attendons les prêts et même les 150 milliards ne suffiront pas, la région ayant plutôt besoin de nouveaux emplois. Le citoyen békaaiote ne peut assurer son gagne-pain des services et des infrastructures, s’il n’est pas mis en état d’assurer sa subsistance. C’est pourquoi, il déserte sa terre et se rend dans les villes, principalement à Beyrouth. 
“Pourquoi des foires ne seraient-elles pas organisées dans la Békaa? Au cours d’une visite à Dubai, le directeur d’une foire dans l’émirat a proposé de la transposer au Liban. Il lui a été répondu que nous ne disposons pas d’emplacement pour l’y installer. Pourquoi une telle foire ne serait-elle pas aménagée dans la Békaa, près de l’aéroport de Rayack après sa remise en service?” 

MANQUE DE POSSIBILITÉS 
- Les observations que vous émettez en Conseil des ministres sont-elles prises en considération? 
“Naturellement, ils en prennent note, mais justifient leur non application par la conjoncture générale et le manque de possibilités.” 

- N’est-ce pas le cas de cheikh Soubhi Toufayli? 
“Cheikh Toufayli ne constitue pas une question politique ou nationale; il s’est prêté, malgré lui, aux tractations politiques. Puis, certains ont tenté de s’en servir pour le mettre en état de confrontation avec le “Hezbollah et le gouvernement.” 

- A votre avis, quel est le degré de représentativité de cheikh Soubhi au plan du caza? 
“Les revendications qu’il soulève sont celles de toute la région. Nous les appuyons avec l’ensemble de la population, sans appuyer le moyen auquel il a recours pour obtenir gain de cause. Preuve en est que les habitants n’entravent nullement le déplacement des ministres à Baalbeck-Hermel. Je m’y rends deux fois par semaine. Je l’ai croisé en cours de route et nous nous sommes salués d’un signe de la tête.” 

- Votre absence du Conseil des ministres au cours duquel la décision a été prise de confier à l’Armée le maintien de l’ordre à Baalbeck-Hermel, a posé plus d’un point d’interrogation... 
“J’étais présent et j’ai pris part aux délibérations. Avant la réunion, les présidents de la République et du Conseil m’avaient mis au courant de la tendance et j’ai émis mon point de vue à ce sujet. Je n’accepte pas que la région soit le théâtre de désordre ou qu’elle soit mise hors-la-loi, car nous porterions atteinte à la réputation de ses habitants connus pour être des gens pacifiques.” 

LE NOUVEAU PLAN DE REDRESSEMENT EST-IL VALABLE? 
- Détectez-vous les éléments d’une entente entre les trois présidents autour du dossier financier ou bien le second plan de sauvetage économico-financier connaîtra-t-il le même sort que celui d’octobre? 
“Qu’ils s’entendent, même à nos dépens. Cependant, j’ignore si le nouveau plan de redressement répond aux besoins. Il est actuellement exigé des projets dont la réalisation s’effectuerait dans le cadre des adjudications publiques. L’entrepreneur chanceux l’emporte sur les autres, que l’adjudication soit organisée par voie d’appel d’offres ou à travers l’administration étatique. Les projets ne sont pas exécutés pour la plupart par les entrepreneurs eux-mêmes, mais par l’intermédiaire de sous-contractuels qui réalisent des profits de l’ordre de 20 ou 25 pour cent. Il faut mettre fin à cet état de choses et restreindre les adjudications à l’administration officielle qualifiée, en habilitant les entrepreneurs classifiés d’y prendre part, afin de mettre un terme au gaspillage et aux profits illicites.” 
Et d’ajouter: “Il n’est pas permis que le service qui procède à l’étude des projets et en établit les devis, organise ou supervise les adjudications; cheikh Chakhbout, en son temps, n’agissait pas de la sorte et ceci occasionne le gaspillage des fonds publics. 
“Quant à supprimer les indemnités des conseillers dont s’entourent les ministres, c’est une initiative peu judicieuse, car comment ces derniers pourraient-ils travailler sans conseillers?” 

- “L’annexe NÞ9” prévoyant l’institution de nouveaux impôts et taxes paraît avoir été abandonnée pour d’autres formules: pourquoi le plan gouvernemental n’en fait-il pas mention? 
“Où sont les solutions de rechange? Nous devons les toucher du doigt pour nous en convaincre; pour le moment, elles restent du domaine utopique.” 

“PAROLE, PAROLE” 
- Croyez-vous que ce qui a fait l’objet d’un accord soit de la parlote, uniquement? 
“Oui, si le plan élaboré n’est pas discuté dans les moindres détails en Conseil des ministres et à la Chambre des députés. 
“Autrefois, on avait prétendu que la nouvelle échelle des traitements et des échelons des fonctionnaires de l’Etat ne coûterait pas une piastre au Trésor. A présent, on estime à 600 milliards les sommes nécessaires à son exécution. 
“L’institution militaire est la première concernée par cette affaire. Or, les crédits manquent et ils ont différé l’application de la nouvelle échelle, en attendant d’en assurer le financement.” 

- Le nouveau plan de redressement économico-financier suppose la réduction des prévisions budgétaires pour 1998. Le budget du ministère de la Défense serait-il affecté par cette décision? 
“Nous avons réduit nos prévisions à l’avance et ne pouvons procéder à aucune autre compression, sinon l’Armée serait paralysée. Hier, ils l’ont déployée à Baalbeck-Hermel et nous faisons face à un problème non moins grave au Liban-Sud. Puis, le problème des frais d’hospitalisation nécessite une solution rapide.” 

- Le plan prévoit, dit-on, le regroupement des organismes sécuritaires: sécurité de l’Etat, Sûreté générale, FSI. Qu’en pensez-vous? Une telle formule aurait-elle des implications politiques, en ce sens qu’il serait question de mettre sur pied une instance sécuritaire équivalant à l’Armée? 
“Il faudrait fusionner tous ces organismes et éliminer toute institution parallèle ayant prouvé son inefficacité ou son échec. Ainsi, il existe un ministère des Ressources hydrauliques et électriques et à ses côtés, l’Office de l’électricité. 
“Il en est de même de l’organisme des urgences et, parallèlement, quatre entreprises dont les attributions s’enchevêtrent. Le même cas se présente au Téléphone. Pourquoi ne pas regrouper tous ces organismes?” 

QUID DE LA FUSION DES ORGANISMES SÉCURITAIRES? 
- Le regroupement des trois organismes sécuritaires a-t-il des motivations d’ordre politique? 
“Pas du tout et nous ne nous y opposons pas. Au contraire, nous souhaitons leur regroupement, parce que cela mettrait fin à l’enchevêtrement de leurs attributions. Nous n’avons rien à voir dans ce projet en tant qu’institution militaire. Au contraire, leur fusion aura pour conséquence d’alléger le fardeau de l’Armée.” 

- Quelles sont les conséquences de la décision prise par le gouvernement américain de ne plus fournir des équipements évolués à nos forces régulières, en application d’une recommandation du Congrès? 
“En fait, les Américains ne nous livrent pas des armements sophistiqués. Nous achetons les équipements usagés à des prix symboliques. La décision de l’Administration américaine nous a surpris, d’autant que nous n’avons pas formulé de demandes à ce sujet et, de leur côté, ils ne nous ont rien proposé. 
“Il y a lieu de préciser que le Congrès US est influencé par la juiverie américaine. 
“Les Américains nous inscrivent sur la liste des pays favorisant la contrebande des stupéfiants ou le terrorisme; ceci est regrettable et contraire à la vérité.” 

ET DES PRÉSIDENTIELLES? 
- Qu’en est-il de l’échéance présidentielle: êtes-vous pour une nouvelle reconduction du mandat du chef de l’Etat ou pour l’élection d’un nouveau président? 
“Il est prématuré d’en parler et il n’est pas permis d’ouvrir ce dossier de cette manière, car le sujet est lié à la conjoncture régionale. Toujours est-il que je suis favorable à l’élimination de l’article de la Constitution empêchant les fonctionnaires de première catégorie de poser leur candidature à la magistrature suprême. 
“D’aucuns soutiennent que ces fonctionnaires seraient amenés à exploiter leurs fonctions dans leur campagne. Ne peut-on pas invoquer le même argument par rapport au ministre et au député? Il faut donc permettre au plus grand nombre de candidats de se manifester, car de cette façon nous réactivons la vie politique, tout en encourageant les présidentiables à solliciter la haute fonction sur base d’un programme clairement établi.” 

- A votre avis, l’accès d’un militaire à la Présidence ouvrirait-il la voie à l’instauration d’un Pouvoir militaire et ce dernier serait-il nécessaire pour redresser la situation? 
“Non, je ne pense pas que la situation ne peut pas être redressée que par un militaire, mais je n’appréhende pas l’accès d’un militaire à la première présidence. Naturellement, il ne s’agit pas de n’importe quel militaire. Le chef de l’Etat le plus important en France n’a-t-il pas été le général De Gaulle? 
“Nous évoquons non sans appréciation le sexennat du général Fouad Chéhab au Liban; le mandat du général Eisenhower aux Etats-Unis; du président Hafez Assad en Syrie et du président Gamal Abdel-Nasser en Egypte. C’étaient tous des militaires ayant réussi dans leurs fonctions. 
“Puis, soyons francs, si le général Emile Lahoud accédait à la présidence, cela ne signifierait pas l’avènement des militaires au Pouvoir. Au contraire, le général Lahoud est capable d’empêcher l’ingérence de l’Armée dans la politique.” 

LE GÉNÉRAL LAHOUD EST MON CANDIDAT À LA PRÉSIDENCE 
- Vous appuyez donc la candidature du général Lahoud? 
“Naturellement.” 

- On dit que la proposition des candidatures est du ressort de Damas et le choix du président de celui de Washington. Est-ce exact? 
“Les présidentielles au Liban ont, de tout temps, été influencées par maints facteurs. De toute manière, nous ne pouvons pas nous isoler du contexte régional et international, en ce sens que nous avons à prendre en considération les relations du candidat au double plan arabe et international. Nous voulons, aussi, qu’il puisse servir le pays et non être en bisbille avec les uns et les autres. En d’autres termes, nous avons besoin d’un président apte à assurer une couverture au pays et non à le laisser à découvert.” 

- Quand le président Hraoui a lancé l’idée d’élections présidentielles anticipées, il s’est dit opposé à l’accès d’un militaire à la magistrature suprême; pourquoi? 
“Le fait d’avoir proposé des élections anticipées constitue un grand sacrifice de la part du président Hraoui qui a voulu prévenir les tractations politiques, lesquelles auraient eu leur impact sur la situation politique et économique. Mais c’était une erreur de s’opposer à l’élection d’un militaire, car il n’est pas dit que celui-ci favoriserait l’ingérence des militaires dans la politique.” 

- On constate un intérêt particulier de la part des Américains aux élections municipales et présidentielles, tel que cela est apparu dans le message adressé par le président Clinton au chef de l’Etat le 22 novembre... 
“Je trouve cela quelque peu étonnant. Puis, le hic réside dans les conseillers qui auraient fourni au chef de l’Exécutif US des indications peu minutieuses. 
“De là à déduire que le Liban figure sur l’ordre des priorités des Etats-Unis, il y a loin. D’ailleurs, l’interdit frappant les ressortissants US désireux de venir chez nous n’a été levé que récemment et notre pays est toujours considéré comme une zone dangereuse. 
“Ils nous accusent de nous adonner au trafic de la drogue que nous avons combattue et extirpée, tout en refusant de nous aider sur le plan des cultures de rechange, comme ils l’ont fait en Turquie et au Maroc. 
“Ceci est, je crois, la conséquence de pressions exercées sur les USA par Israël, lequel redoute le Liban  en temps de paix, car l’Etat hébreu projette d’accaparer le marché arabe où son principal concurrent est notre pays en tant que pays de services dans le monde arabe.” 

- Le fait pour les Etats-Unis d’insister sur la nécessité d’organiser des élections présidentielles, peut-il être interprété comme un indice de la non reconduction du mandat du président Hraoui? 
“Le président de la République dit qu’il ne veut pas entendre parler d’une nouvelle prorogation de son mandat.” 

- Il l’avait affirmé avant la reconduction de son mandat pour trois ans... 
“Non, il ne l’avait dit qu’une fois. Maintenant, il le répète chaque jour. Si les Américains se prononcent en faveur des présidentielles, ceci ne signifie pas qu’ils s’opposent à la reconduction.” 

- Les élections municipales sont en butte à maints obstacles dont la demande en invalidation du projet de loi habilitant le gouvernement à procéder à la nomination du tiers des conseils municipaux. Qu’en pensez-vous, d’autant que les municipales auront lieu quelques mois avant les présidentielles? 
“Je partage votre avis. La décision relative à la nomination des conseillers municipaux pourrait avoir pour but de torpiller les municipales. Quoi qu’il en soit, je suis opposé au principe de la nomination. Bref, les chances d’organiser ces élections ou de les ajourner sont partagées à égalité, dans une proportion de 50 pour cent.” 

 
(Propos recueillis par HODA CHÉDID)

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