D’après
des sources fiables, S.Em. le cardinal Nasrallah Sfeir a profité
de sa visite pastorale en France, pour conférer avec les “opposants
de l’extérieur” à propos de leur éventuel retour au
pays, car il œuvre pour l’unification des rangs et la réalisation
de l’entente nationale véritable. Le président Chirac qui
l’a reçu pendant près d’une heure, pourrait-il apporter sa
contribution à ce plan, étant donné certaines de ses
amitiés libanaises?
En raison du
caractère pastoral - donc non officiel - de S.Em. le cardinal Nasrallah
Sfeir en France, le Premier ministre de ce pays n’a pas jugé nécessaire
de le rencontrer. “Car, ont précisé les milieux proches de
l’Hôtel Matignon, il n’est pas de coutume en pareils cas, que le
chef du gouvernement de la France républicaine et laïque confère
avec un chef spirituel étranger” (sic).
Cependant, le chef de l’Elysée avait reçu l’éminent
prélat pendant près d’une heure, la semaine dernière,
avant qu’il se rende à Marseille pour inaugurer le Foyer Notre-Dame
du Liban, construit dans la seconde ville française. (C’est là,
également, qu’avait été fondée il y a cent
quarante ans, l’Oeuvre d’Orient, association ayant pour tâche de
venir en aide aux chrétiens orientaux).
Le chef spirituel des maronites devait être reçu mercredi,
à son retour à Paris, par le chef du Quai d’Orsay et, d’après
des sources ren-seignées, l’échange de vues aurait porté
sur l’action de l’opposition libanaise de l’extérieur, sous l’angle
de son éventuelle réintégration du pays natal. Naturellement,
une fois que les conditions et le climat politique seront assurés,
de manière à leur permettre de se mouvoir sans aucune contrainte,
comme c’est le cas dans tout Etat démocratique.
Le président Chirac qui ne cesse de réaffirmer “l’attachement
de la France à l’intégrité territoriale du Liban,
à sa souveraineté et à son indépendance” et
qui, selon le porte-parole de l’Elysée, a exprimé lors de
son entrevue avec Mgr Sfeir “sa confiance dans l’avenir du pays des cèdres”,
ainsi que “son attache-ment personnel à la communauté maronite”,
ne donne pas la nette impression d’avoir une idée réaliste
de la situation chez nous au double plan interne et régional.
Pourtant, d’influents dirigeants du RPR (parti gaulliste) ont tenu
à ce que le président français entende, du patriarche
maronite, un son de cloche différent de celui que lui fait entendre
le président Rafic Hariri, lors de ses fréquentes visites
à Paris.
Les Libanais ne doutent nulle-ment des sentiments que M. Chirac voue
à leur pays, mais il ne suffit pas au premier Français de
se montrer “très optimiste” pour les rassurer quant à l’avenir...
D’ailleurs, il a pu toucher du doigt lors d’un séjour libanais,
les mesures vexatoires dont ont été l’objet bien de nos compatriotes
qui ont été empêchés de gagner le siège
patriarcal de Bkerké pour lui expri-mer l’hommage de leur respect
et, aussi, pour lui exposer quelques-uns de leurs problèmes et leurs
inquiétudes...
Ils en ont été empêchés, sous prétexte
que “les rassemblements étaient interdits en vertu d’une décision
gouvernementale”, alors que le soir du même jour un rassemblement
de masse jamais égalé à Beyrouth était organisé
autour de la résidence du Premier ministre (libanais) à Koraytem...
M. Chirac devait, une autre fois, renoncer au déplacement jusqu’à
Bkerké et y déléguer à sa place le chef du
Quai d’Orsay, arguant le “manque de temps”. Ou bien n’est-ce pas pour une
autre raison que chacun soupçonne?
Quoi qu’il en soit et si comme on le dit, le cardinal-patriarche a
évo-qué avec les “opposants de l’exté-rieur” la possibilité
de leur retour au pays, dans des conditions leur permettant d’y mener une
vie nor-male et, surtout, de reprendre sans encombre leurs activités
politiques, peut-on espérer voir le chef de l’Elysée contribuer
à favoriser un tel retour? Ce dernier est capable d’en-gager le
Liban sur la voie de la véri-table entente et de la démocratie,
dont le respect est mis en doute par le Barreau de Beyrouth, lequel a adressé
à l’ONU un rapport accablant pour le Pouvoir. |