Editorial


Par MELHEM KARAM 

 
I - KHAMENEI, KHATAMI... ET L’UNITÉ DE L’ISLAM
Il est vain de parler abondamment des positions de forces et de conflits au sein de la République islamique iranienne. De dire que Khamenéi a éclipsé Kha-tami lors de la cérémonie d’ouverture de la VIIIème conférence de Téhéran. Ou que les signataires ont refusé que Khamenéi y place son nom.
Ces paroles ne sont pas exactes. A supposer qu’elles le soient, le fait de les évoquer ne confirme pas que la République islamique iranienne a perdu le round. La conférence a réussi et il a été établi que seule la souplesse l’emporte. Quant à l’intransigeance, elle a des risques dont on ne peut prévoir les conséquences.
Le VIIIème sommet de la conférence de l’Organisation islamique a rassemblé dans la capitale iranienne le monde islamique. Les indices de l’unité y ont émergé partant, naturellement, du désir de l’Arabie séoudite et, à sa tête, S.M. le roi Fahd, comme de la volonté des présidents Hosni Moubarak, Hafez Assad et des autres dirigeants arabes.
Ainsi, Téhéran a réuni durant quelques jours, tout le monde islamique, prenant sa revanche des Etats-Unis qui se sont employés durant dix-huit ans à isoler l’Iran sur la scène internationale.
Les ayatollahs ont su comment mobiliser l’effondrement du processus de paix palestino-israélien, ce dernier ayant justifié, dernièrement, le boycottage d’une majorité arabe du sommet de Doha sur le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, organisé sous le patronage et la supervision des Américains. Ce boycottage n’a pas été décidé pour bisquer Qatar et son Emir, mais l’Amérique, à cause de sa mauvaise façon de traiter le monde arabe.
Parmi les cinquante-cinq membres représentant un milliard de musulmans, aucun ne s’est absenté, y compris l’Irak qui a été en guerre pendant huit ans avec l’Iran; ni l’Algérie qui accuse la République islamique “de financer les opérations terroristes sur son territoire”.
Le VIIIème sommet islamique a donné la nette impression d’un monde islamique unifié, solidaire, soucieux de respecter et d’apliquer les résolutions des Nations Unies. L’une des 142 clauses débattues par la conférence, invite l’Irak à respecter ses engagements à l’égard de l’organisation internationale. Et la direction iranienne, malgré les divergences autour des prérogatives du guide suprême de la République, l’imam Ali Khamenéi, des attributions du président Mohamed Khatami et la controverse opposant Khamanéi à Montazéri, toutes les parties sont tombées d’accord sur une trêve, afin que les congressistes puissent délibérer avec calme.
Ainsi, et quoi qu’on dise des assises de Téhéran, la souplesse et le souci de préserver l’unité des rangs ont triomphé en définitive. Le sommet a assuré au monde islamique, dont l’Iran présidera l’organisation pendant trois ans, l’image d’un Etat réconcilié du moins avec lui-même; puis, avec le monde.

 -II - YEHUDA GIL, UN NOUVEAU POIDS POUR NETANYAHU 
Yehuda Gil, l’espion ayant appris le mensonge à une génération de volontaires du “Mossad”, a été favorablement accueilli par ses élèves. Dans la guerre de l’ombre, la duperie de l’ennemi paraît plus importante que de l’attaquer pour le vaincre, militairement. 
Benjamin Netanyahu n’avait pas besoin d’un nouveau scandale la veille des rencontres diplomatiques avec le chancelier allemand Helmut Kohl, le Premier ministre français, Lionel Jospin; le chef du département d’Etat US, Madeleine Albright et le président français Jacques Chirac. Celui-ci l’a mis dans le cadre de la vérité sèche; il ne l’a pas salué sur le perron de l’Elysée, mais a chargé des fonctionnaires ordinaires de le raccompagner jusqu’à sa voiture... Netanyahu a paru de mauvaise humeur et refusé de faire des déclarations aux journalistes qui attendaient depuis longtemps sa sortie du palais présidentiel.
Toutes ces rencontres ont mis à l’épreuve la crédibilité de Netanyahu et annoncé leur échec. L’opération visant à induire en erreur dont a fait état la presse israélienne avait eu pour but, durant cinq années, de mobiliser le Mossad en vue d’entreprendre une opération de mensonge collectif, à l’effet de convaincre les responsables de l’Etat hébreu de la mauvaise foi de la Syrie, de son rejet de la paix et de tout compromis pacifique, partant de son désir de déclencher une guerre féroce contre Israël, alors qu’en fait la Syrie était disposée à un arrangement pacifique global juste.
Cette campagne de mensonges dont le champion était, dit-on, Yehuda Gil, n’a épargné aucun des dirigeants israéliens depuis 1992. Mais ni Yitzhak Rabin, ni Shimon Pérès ne peuvent être soupçonnés d’avoir tourné leur dos à la paix.
En contre-partie, le nouveau plan que Netanyahu a présenté à ses interlocuteurs européens et américains, tend à effacer tous les précédents engagements israéliens à l’égard des Palestiniens. Proposer le retrait restreint pour une fois en Cisjordanie et, ensuite, reprendre les négociations autour de la paix définitive dans les territoires soumis au régime d’autonomie, tout cela éloigne toute chose des promesses faites par Netanyahu, personnellement, depuis douze mois, en vertu desquelles il doit procéder à trois redéploiements militaires succes-sifs avant fin 1998.
Lorsque “Bibi” a détecté un durcissement de la part des Etats-Unis vis-à-vis de son gouvernement, il a eu recours à un subterfuge pour se rapprocher des Européens, qu’il se souciait, depuis peu de temps, de maintenir loin du processus de paix.
Cependant, les éléments et les documents qu’il pré-sente à l’Europe paraissent ternes et non convaincants. Surtout si on les joint à ce que Yehuda Gil fait propager, à propos du doute entretenu autour du Mossad, objet de haine et de condamnation mondiales, à cause d’un scandale. Puis, de ce qui s’est passé en septembre dernier, quand deux agents du Mossad ont été chargés d’attenter à la vie de Khaled Machaal, directeur du bureau de Hamas en Jordanie. Ces derniers ont été appréhendés au cours de la tentative d’attentat. Netanyahu a été contraint de supplier la Jordanie, mais le roi Hussein a rejeté toute négociation. Ensuite, Netanyahu a dû libérer cheikh Ahmed Yassine, chef de “Hamas”, comme prix du compromis qui avait tout l’air d’une nouvelle condamnation de Netanyahu. Celui-ci n’est pas considéré comme le vainqueur, selon sa coterie, mais attend une fin certaine et un sort maintenant connu. 

Photo Melhem Karam

Home
Home