L’Assemblée
nationale a dû siéger jeudi - après le débat
de politique générale de deux jours - à l’effet de
délibérer à propos du projet de loi sur les municipalités.
Plus exactement, de l’article du texte gouvernemental consacrant le principe
de la nomination du tiers des conseillers municipaux. Etant entendu que
Baabda et Koraytem tiennent, mordicus, on ne sait pourquoi, à
cette clause dont le moins qu’on puisse dire, est qu’elle est anti-démocratique...
Le climat politico-populaire
s’est tellement gâté que toute question débattue suscite
un profond clivage au plan national, comme c’est le cas, à présent,
du projet de loi sur les municipalités.
Le texte gouvernemental - élaboré, en fait, par le ministre
de l’Intérieur qu’il tente de faire passer à tout prix, place
de l’Etoile - n’a pu être et, pour cause, approuvé par les
commissions parlementaires de l’Administra-tion et de la Justice, des Affaires
rurales et municipales, pour la simple raison qu’il prévoit la NOMINATION
du tiers des conseillers municipaux, alors qu’une telle procédure
est suivie dans les pays évolués pour la désignation
d’une personne à une fonction ou à une dignité NON
ELECTIVE.
Le vote par les commissions siégeant en réunion conjointe
a renvoyé dos à dos les partisans et les adversaires du projet
mentionné, en ce sens qu’ils ont obtenu le même nombre de
voix.
De l’avis d’un constitutionna-liste invétéré,
ancien président du Législatif, le texte gouvernemen-tal
en question doit être rejeté, à moins d’être
soumis à l’Assem-blée nationale siégeant en séance
plénière.
La forte opposition au projet provient, rappelons-le, du fait que son
auteur veut nommer le tiers des conseils municipaux, non seulement dans
les localités situées dans les portions du terri-toire national
occupées par Israël (au Liban-Sud et dans la Békaa ouest),
mais dans les grandes villes et les centres de villégiature.
L’exposé des motifs invoque des prétextes et avance des
arguments très peu convaincants, entre autres ceux par lesquels
le gouvernement prétend vouloir préserver la sécurité
et la paix civile...
Si des élections générales ont pu être organisées
à deux reprises, en 1992 et 96, sans qu’on ait signalé un
incident grave, hormis un accrochage dans une localité à
majorité druze ayant fait une victime, le garde du corps d’un leader
de cette communauté, peut-on redouter un scrutin municipal? Ce dernier
se déroule, généralement, dans une atmos-phère
quelque peu tendue, certes, étant donné les antagonismes
locaux, mais non grave au point de laisser craindre le pire...
Puis, pourquoi le Pouvoir persiste-t-il à vouloir désigner
le tiers des conseillers municipaux? Tout simplement pour installer ses
hommes-liges dans les hôtels de ville, les édiles pouvant
influer, indirectement, sur l’élec-torat en raison des services
qu’ils sont en mesure d’offrir aux citoyens... Ce qui inquiète cer-tains
hommes politiques au leadership branlant, n’ayant pas accédé
au parlement par la force de leur poignet...
Quoi que dise le ministre de l’Intérieur pour enjoliver son
idée géniale et la rendre accep-table pour infiltrer les
thuri-féraires du Pouvoir dans l’au-torité municipale, il
aura du mal à faire avaler la pilule à l’écrasante
majorité du peuple libanais...
... Car celui-ci est fermement attaché à la démocratie
et au libre choix de ses représentants refusant de donner son feu
vert à un projet anti-démocratique. |