A
la fin de sa vie, Charles Malek (notre photo), l’un des artisans de la
Déclaration universelle des droits de l’homme - dont on célèbre
le cinquantenaire - ne cachait pas ses craintes quant à l’avenir
de la démocratie et des libertés au Liban. Ce qui se passe
chez nous, ces temps-ci à ce double plan, corrobore les appréhensions
du grand homme que nous avons perdu il y a une dizaine d’années.
La communauté
interna-tionale célèbre le cinquantenaire de la Déclaration
des droits de l’homme, dont l’un des artisans est un Libanais illustre,
le regretté Charles Malek, ancien président de l’Assemblée
générale des Nations Unies et du Conseil économique
et social relevant de l’ONU.
Malek avait été l’un des trois promoteurs avec Eleonor
Roosevelt (Etats-Unis) et René Cassin (France), de cet important
document que le Liban a été le premier à ratifier,
après avoir figuré parmi les Etats ayant assisté à
la naissance de l’organisation mondiale ayant pris la relève de
la défunte Société des Nations (SDN).
Au temps où il assumait la présidence du Conseil économique
et social - dont relève l’Unesco - Charles Malek nous avait confié
lors d’une visite à Beyrouth: “Mon principal souci est d’amener
notre gouvernement à inscrire la Déclaration universelle
des droits de l’homme aux programmes d’enseignement, dès le premier
cycle scolaire”. L’Etat libanais n’a pas accédé au souhait
du “grand Charles” - comme l’appelaient ses proches et amis - et c’est
bien dommage. Cela aurait aidé à inculquer l’esprit de cette
charte à tous ceux qui se sont succédé au pouvoir
chez nous. Ainsi, la démocratie aurait été mieux exercée
et la liberté sauvegardée sous notre ciel.
En effet, dans le cadre d’une émission télévisée
consacrée, justement, à la Déclaration universelle
mentionnée, un membre du gouvernement, en l’occurrence le ministre
de la Défense, a reconnu que celle-ci, considérée
par certains comme une planche de salut, est devenue “une couverture et
un moyen auxquels recourent les grandes puissances pour écraser
les droits de l’homme et du citoyen”.
Et d’ajouter: “En dépit de ses modestes possibilités,
le Liban s’emploie à appliquer les clauses de ladite déclaration...
Cependant, si nous la prenons en tant que critère, notre pays en
est encore très éloigné, car le citoyen n’a droit
ni à la santé, ni à la justice sociale, encore moins
à l’instruction, à l’égalité et au travail”
(sic).
Charles Malek avait donc raison de réclamer que la Déclaration
universelle (de 1948) fût inscrite aux programmes d’enseignement,
“afin, disait-il, que le citoyen connaisse ses droits; de cette façon,
il pourra exiger des gouvernants de les lui assurer, comme il sera mieux
renseigné sur ses obligations à l’égard de l’Etat
et de la société”.
Aujourd’hui, - il n’est pas tard pour bien faire - des voix s’élèvent
pour reprendre à leur compte la réclamation de M. Malek.
D’ailleurs, l’exhortation apos-tolique du Souverain Pontife pousse
dans cette voie, comme l’avaient fait ses prédécesseurs,
depuis Léon XIII à Vatican II. De fait, le Saint-Siège
ne cesse de prôner l’égalité et la justice sociale
pour tous les êtres hu-mains, sans aucune discrimina-tion, partant
du principe que “l’homme est créé à l’image de Dieu”.
Faute de quoi, l’homme serait excusable s’il montrait une velléité
de rébellion contre l’oppression et l’injustice. |