Chronique


Par JOSE M. LABAKI  

 

QUE SERAIT LE MONDE SANS L’ONCLE SAM?

Bill Clinton dans son face à face avec Paula Jones qui l’accuse de harcèlement sexuel, nous fait rougir de honte. Il semble être atteint du “complexe de Perrichon”, héros d’une comédie prenant en haine l’homme qui l’a retenu à bout de souffle au bord d’un précipice.
Les Américains ont toujours excellé à utiliser des sentiments traditionnels, tels que démocratie, cause humanitaire, droits de l’homme, lutte anti-terroriste, etc, pour en faire des instruments de guerre au service de l’hégémonisme. Ils détiennent seuls cette efficacité dans le changement de décor à vue. C’est, d’ailleurs, cet art qu’ils déploient à faire admettre au monde que la prééminence américaine est justifiée et synonyme de paix et de progrès.
Alexis de Tocqueville peint à merveille cette Amérique arrogante, omniprésente, omnipotente et omnisciente. Mère et géôlière à la fois; une Amérique qui rançonne et subventionne, s’installe en dictateur aigre-doux, d’une câlinerie cruelle, qu’aucune autorité établie n’a les moyens d’atteindre.
D’autres, avant les Américains ont connu l’art de baptiser la paix et une certaine façon de faire la guerre. En l’an 341 avant notre ère, Démosthènes tentait d’ouvrir les yeux des Athéniens sur les offensives de paix de Philippe de Macédoine “notre adversaire, dit-il, qui, les armes en main et forces considérables à l’appui, sous prétexte d’apporter la paix, se livre à des actes belliqueux, faisant croire aux habitants d’Oréas qu’il leur envoie des troupes pour veiller sur eux! La légende s’applique à la realpolitik américaine qui gouverne actuellement la planète. L’ancien apparatchik de la Maison-Blanche ne se démarque pas de l’école impérialiste américaine. Dans un livre-fleuve: “Le grand Echiquier”, il plaide sans complexes en faveur d’une hégémonie américaine à échelle planétaire.
“D’entrée de jeu, le contrôle de l’Eurasie (Europe-Russie-Asie), l’entrée de la Chine via-USA, dans le club des grandes puissances, la réconciliation avec l’Iran, tout en contrôlant la zone-tampon pétrolière du Golfe arabique et le Moyen-Orient, tout en alimentant militairement l’Etat hébreu, avorton dernier-né de la politique anglo-saxonne dans cette partie du monde, au détriment du monde arabe dont elle prétend sauvegarder la précieuse amitié, malgré la guerre à outrance qu’elle continue à livrer au régime de Saddam Hussein, désormais s’écrie Z. Brzenski, les Etats-Unis détiennent la suprématie dans les domaines militaire, économique, technologie de pointe et même... dans le domaine culturel pourquoi pas?
Principale puissance nucléaire, l’Amérique contrôle mers et océans et entretient des légions et des escadres en Europe, en Asie et dans les pays du Golfe. L’économie américaine, principal moteur de la croissance mondiale, avance à pas de géant. Imaginez ce qui se passerait si l’Amérique retirait ses troupes de la Corée du Sud ou sa marine du Golfe arabique! Ce qui se passerait, si les institutions financières et les entreprises américaines ne finançaient plus les déficits japonais, coréens, indonésiens, malaisiens, mexicains etc! Ce serait la banqueroute et le chaos”. Et d’ajouter: “Que serait l’Europe sans les Etats-Unis, ses leaders instituant des projets incompatibles, voire bizarres...” M. Brzenski, va plus loin en s’attaquant cette fois à la France. “Que vaut la France sans l’Oncle Sam? Depuis le général de Gaulle, la France se confond avec l’Europe, dont elle veut détenir à tous prix, le leadership absolu. Elle veut construire l’Europe avec l’Allemagne, la Russie, la Pologne, les pays de l’Europe de l’Est y compris les pays baltes et ainsi de suite. Elle veut surtout et d’abord construire l’Europe contre l’Amérique, qu’elle trouve encombrante à tous égards!
Au lieu de se concentrer sur le plus impératif voire l’Union européenne, l’élargissement de l’OTAN, la création d’un partenariat franco-américain, elle passe son temps à déjouer l’hégémonie américaine qui la dérange”. Z. Brzenski, ne mâche pas ses mots, à l’adresse de la France. A un interlocuteur qui lui demande s’il n’est pas allé trop loin, il répond sans vergogne: “La France n’a pas encore accepté qu’elle est une puissance de deuxième ordre, ni plus ni moins! Pour elle, l’Europe ne parviendra à faire son unité qu’à deux conditions primordiales: le déroulement du processus de l’Union sous son égide et la réduction graduelle de l’emprise américaine sur le Vieux Continent. Ce qui la place dans un dilemme: préserver l’indispensable engagement américain en Europe, tout en manœuvrant à le réduire à sa plus simple expression; et poursuivre la politique du tandem franco-allemand, en voulant limiter le leadership de son partenaire?”
“La France, argue-t-il, est disposée à jouer toutes les cartes que lui offrent ses liens avec la Russie sous la houlette de Boris Eltsine, pour déjouer les avancées américaines en Europe, en Asie et au Moyen-Orient, allant jusqu’à raviver la vieille entente franco-britannique pour contrebalancer la primauté de plus en plus affirmée de l’Allemagne. Alors que, de l’autre côté du Rhin, on est conscient qu’on ne peut construire l’Europe unilatéralement”. Et de conclure, “tout cela nous fait oublier l’essentiel: bâtir la forteresse européenne pour en faire un partenaire objectif et permanent de l’Amérique, tout en respectant le précarré et les intérêts de chacun!”
Face à ces arrogantes surenchères américaines, dans quel état d’esprit se trouvera demain la société américaine pour prétendre encore au gouvernement de la planète? L’opinion mondiale inquiète s’interro-ge: Après l’hégémonie américaine quoi? Quel héri-tage léguera l’Amérique, à terme, aux généra-tions futures? Enfantera-t-elle, une nouvelle structure capable de se transformer en un statut de gestion pacifique des affaires internationales? Puisse-t-elle y parvenir, pour son bonheur et pour celui de l’humanité! 
 
 “Je suis certain de ce que j’affirme. Non seulement les Etats-Unis sont désormais l’unique superpuissance, mais jamais dans l’histoire, le monde n’a connu un tel pouvoir hégémonique.”

Zbigniew Brzenski
(Conseiller de la Maison-Blanche, sous Jimmy Carter)
 

 

  

 


Home
Home