LE LIBAN À L'HEURE DE L'ARGENTINE

Les présidents Menem et Hraoui à l’aéroport.
Le président argentin a entamé à partir de l’après-midi du 2 courant une visite officielle de trois jours dans le pays. C’est le premier chef de l’Etat argentin à visiter le Liban depuis 1945.
 

Le président Menem accompagné du président 
Hraoui, passe en revue la garde d’honneur sur
l’aire de stationnement de l’aérogare. 

 

Le chef de l’Etat argentin est salué par les hauts fonctionnaires et les officiers supérieurs des différentes armes que lui présente M. Maroun Haïmari, directeur du Protocole au palais présidentiel (à droite). 
 
LA SITUATION, OBJET MAJEUR DES ENTRETIENS
M. Menem, est arrivé à 15h à Beyrouth, première étape d’une tournée régionale qui le conduira, également, en Egypte. Il est accompagné de sa fille Zuleïma, du ministre des Affaires étrangères, M. Guido de Tella, du gouverneur de  Santa Fe d’origine libanaise, Jorje Alberto Obeid, ainsi que de sénateurs, de députés et d’hommes d’affaires.
Un accueil officiel lui a été réservé. MM. Elias Hraoui et Nabih Berri et le vice-président du Conseil M. Michel Murr représentant M. Rafic Hariri et le commandant en chef de l’Armée, le général Emile Lahoud l’ont reçu au pied de la passerelle. Etaient, également, présents nombre d’officiels et de personnalités diplomatiques et politiques. D’importantes mesures de sécurité avaient été prises dès le matin dans le périmètre de l’aéroport. Après la cérémonie d’accueil et une pause de dix minutes au salon d’honneur, M. Menem s’est rendu au palais de Baabda où il s’est entretenu pendant une vingtaine de minutes en tête-à-tête avec son homologue. Les deux présidents devaient être ensuite rejoints par les ministres Murr, Hobeiche et Hanna, ainsi que par la délégation argentine.
La conversation a notamment porté sur le processus de paix, ainsi que sur la colonie libanaise en Argentine. Puis, M. Menem a souligné la nécessité de l’instauration d’une paix juste dans la région et s’est prononcé sans équivoque pour la mise en application de la résolution 425, ainsi que pour une reprise des pourparlers de paix. A quoi, M. Hraoui a répondu en indiquant que la 425 ne peut faire l’objet d’aucun marchandage. M. Menem a, en outre, exposé le rôle joué par les Libanais dans le développement de son pays en profitant pour évoquer ses origines levantines.
En fin d’après-midi, M. Menem devait recevoir une délégation de la municipalité beyrouthine conduite par M. Mohamed Ghaziri qui lui a remis les clés de la cité.
Le président Menem hôte de Pepe Abed, 
avec lequel il a longuement conversé en espagnol.
Le soir, au cours du dîner que le président Hraoui a offert en son honneur, M. Menem a rappelé que trois millions et demi d’Argentins sont d’origine arabe dont la moitié est d’ascendance libanaise. “Je voudrais insister, entre autres, sur le fait, que le processus de paix initié à Madrid en 1991 doit se poursuivre dans le respect des accords d’Oslo et de Washington et sur la base des résolutions 242, 338 et 425 du Conseil de Sécurité”. M. Menem devait ensuite remercier le président Hraoui pour la décoration qu’il venait de lui décerner, la Médaille du Mérite libanais, grade extraordinaire “en signe de reconnaissance des liens profonds qui unissent le Liban et l’Argentine et en appréciation de votre appui au Liban”. Plus de 200 personnalités avaient été invitées à ce dîner. Prenant la parole à son tour, le président libanais a rappelé que l’Argentine “a constitué un des premiers foyers de l’expansion libanaise dans le monde. D’ailleurs, à l’entrée d’une  avenue qui porte le nom de notre patrie, s’élève la statue de Gébrane Khalil Gébrane”. Il a, ensuite, souligné les efforts fournis par l’Etat pour que le Liban “redevienne la capitale culturelle, scientifique et touristique de l’Orient et un centre de rayonnement et de démocratie qu’il a pratiquée avant même la naissance de plusieurs autres Etats dans notre région.”
Poursuivant sur sa lancée, après avoir salué le soutien de l’Argentine au Liban durant l’agression israélienne en 1996, le chef de l’Etat a rappelé “l’attachement de son pays à une paix sauvegardant ses droits par l’application des résolutions internationales et au principe de la paix en échange du territoire. Estimant, a-t-il poursuivi, que l’ONU a besoin de réformes sérieuses. Ainsi, il n’est pas permis de constater que cette organisation est en mesure de mettre en application des résolutions internationales dans certaines parties de la planète et n’en est pas capable chez nous!” Il a conclu en exprimant l’espoir de voir se développer et s’enrichir des relations étroites à la fois culturelles, commerciales et touristiques entre le Liban et l’Argentine et se concrétiser les investissements de celle-ci au Liban.
 

Brève halte au salon d’honneur de l’AIB
avant de gagner le palais de Baabda. 

 

Les deux hommes d’Etat portant un toast
après avoir échangé les distinctions honorifiques. 

 

Le président argentin reçoit la clé de la ville
de Beyrouth des mains de M. Mohamed Ghaziri,
président du Conseil municipal. 

 

A la citadelle de Jbeil, le président Menem écoute 
les explications que lui fournit M. Camille Asmar, 
directeur général des Antiquités (à gauche). 

 
 

LA DEUXIÈME JOURNÉE AU LIBAN DU PRÉSIDENT MENEM
Le président a été d’abord se recueillir sur la tombe du soldat inconnu, place du Musée. Puis il a visité le Musée, récemment restauré et rouvert au public. Ensuite, une escapade à Jbeil a provoqué à son insu un embouteillage monstre du fait du convoi présidentiel.
En début de soirée, le président Menem a tenu une réunion de travail avec des hommes d’affaires libanais avant d’être l’hôte à dîner du Premier ministre Rafic Hariri à Koraytem. Avant les agapes, les deux hommes ont conféré pendant près d’une heure, entrevue axée sur la conjoncture au Proche-Orient et les relations entre les deux pays. Du reste, ce dernier point a constitué l’essentiel des discours échangés entre le président Menem et M. Hariri lors du dîner.
Auparavant, le président Menem avait participé à l’hôtel Marriott à une réunion à caractère commercial groupant d’un côté, une délégation libanaise conduite par le président de l’Union des chambres de Commerce et de l’Industrie libanaises, M. Adnan Kassar, et de l’autre, les membres de la délégation d’hommes d’affaires accompagnant le président argentin. M. Kassar a notamment expliqué aux hôtes officiels du Liban “que les fondements essentiels de l’économie libanaise ont été maintenus, malgré toutes les secousses auxquels ils ont été soumis durant la guerre. Et que notre stratégie actuelle consiste à remettre l’économie du pays à niveau.” Le président argentin a répondu en insistant sur le fait “que la stabilité économique que connaît son pays favorise une plus grande collaboration avec le Liban”. Un débat très “relax” devait suivre entre les deux délégations.
Mais indéniablement le temps fort de la journée devait être à la mi-journée, la réception historique réservée par le Parlement libanais au président argentin.
 


Le président Menem s’apprêtant à prononcer
son discours devant l’Assemblée nationale; 
à sa gauche, le président Nabih Berri. 
 

Au cours du dîner offert par le chef du gouvernement,
le chef de l’Etat argentin s’entretient avec Mgr Végliô, 
Nonce apostolique; à droite, M. Samir Azar, député de Jezzine.
 
 
 

LE TEMPS FORT DE LA JOURNÉE: DANS LES MURS DU PARLEMENT
C’est à 11h. que M. Menem est arrivé à la Place de l’Etoile où il a été accueilli par le président Berri et les membres du bureau de la Chambre. Après la cérémonie officielle d’accueil, les deux délégations ont gagné l’hémicycle où M. Berri a prononcé un long discours en français, dont nous allons reproduire de larges extraits. “A l’occasion de cette visite, a-t-il dit, nous manifestons notre joie pour deux raisons: l’une parce que notre illustre invité est originaire de la localité syrienne de Yabroud; et l’autre, dont nous nous réjouissons, que tout en étant à la tête de la première magistrature de l’Etat argentin, il œuvre en vue de consolider les relations entre son pays d’origine et l’Argentine sa patrie de même qu’il ne cesse d’être concerné par la réalisation de la paix au Proche-Orient... Du fait qu’il y a en Argentine des députés et des sénateurs d’origine libanaise, nous souhaitons vivement leur participation au 3ème congrès des parlementaires libanais qui se tiendra au Liban le 18 avril prochain, date commémorative du massacre perpétré par Israël à Cana... Je voudrais ici attirer votre attention sur le fait que le Liban ne cesse, depuis un demi-siècle, d’être soumis aux agressions israéliennes quotidiennes et dont les cibles préférées sont les civils et les divers aspects de la vie courante. Ces agressions constituent une violation permanente de la Convention d’armistice de 1949 et ont causé des destructions et des massacres dont la barbarie dépasse l’imagination... En dépit de la résolution 425 prise à l’unanimité le 19 mars 1978, Israël a continué à utiliser la force contre un pays pacifique, qui est le nôtre... Il est vrai que la dimension de l’occupation israélienne s’est rétrécie du fait de l’action destructives, comme en témoignent les événements. Parmi les “exploits” inavouables d’Israël ont peut citer notamment: les massacres de Mansourieh, Sohmor Nabatieh et Cana. A Cana le 18 avril 1996, l’artillerie israélienne a ouvert le feu sur un complexe abritant le Q.C. fidjien relevant des forces des Nations Unies opérant au Liban-Sud, dans le même temps où plus de 800 libanais étaient venus y chercher refuge. On a, alors, recensé une centaine de morts et presqu’autant de blessés... Pour toutes ces raisons, je demande au président Carlos Menem de faire en sorte que le rôle qu’espère jouer l’Argentine à l’instar de tout pays épris de paix, soit centré sur la nécessité impérative de mettre fin aux abus caractérisant le comportement de la société israélienne... D’autre part, parler d’un retrait partiel israélien du territoire libanais ne saurait être qualifié comme une preuve de bonne intention, mais une confirmation de l’incapacité israélienne de briser notre résistance et une tentative de la résorber et de saper ses bases... Sur un autre plan, le plan économique, votre visite au Liban, M. le président, est une preuve certaine de la confiance croissante dans la résurrection du Liban, dans le soutien de son régime parlementaire démocratique et dans l’assurance de la confiance que vous manifestez dans son avenir!”

Les présidents Hraoui, Hariri et les ministres
saluentl’éminent hôte au moment de son départ.
(Reportage photographique Dalati-Nohra)
Le président argentin a répondu en ces termes au Chef du Législatif. “C’est une grande satisfaction pour moi de m’adresser à cette illustre assemblée et d’avoir pu concrétiser la première visite d’un président argentin au Liban. Aujourd’hui, les descendants des Libanais en Argentine sont plus d’un million et demi et constituent une ossature importante du développement de mon pays... L’Argentine, est convaincue de la nécessité de trouver une solution consensuelle au conflit, aussi  réitérons-nous notre appui au programme de paix de la conférence de Madrid de 1991 et aux accords d’Oslo et de Washington. Et nous continuerons à appuyer les efforts de la communauté internationale pour arriver à une solution négociée... Nous réaffirmons la position traditionnelle de l’Argentine d’appui total à la souveraineté et à l’intégrité territoriales du Liban... L’Argentine, créatrice et promotrice de l’initiative “Casques blancs” continuera à encourager l’utilisation au Liban de ce mécanisme aussi efficace qu’humanitaire... D’autre part, nous entendons encourager les échanges commerciaux bilatéraux et dans ce sens, notre ministre des Affaires étrangères a programmé une rencontre d’exportateurs argentins pour les pays arabes. Elle aura lieu en cours d’année. Nous souhaitons vivement que le Liban y participe... Quant aux négociations sur un projet d’accord de promotion et de protection réciproques d’investissements - elles sont dans un état avancé. Avec la concrétisation du projet, nous détiendrons un instrument, l’instrument adéquat pour faciliter l’afflux des capitaux... Le Liban, nous en sommes convaincus, par sa culture, sa position géographique et ses traditions commerciales est destiné à jouer un rôle primordial dans la région et l’Argentine est plus que jamais disposée à l’y aider!”

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