• J’ai pu maintenir
les prévisions budgétaires
de mon département
• Oui aux mouvements revendicatifs,
mais non
aux procédés négatifs
de leurs promoteurs
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ACTIVITÉ POLYVALENTE
A la question: “Votre ministère contribue, dans une large
mesure, au règlement des problèmes de caractère social
et combien nombreux sont-ils à l’heure actuelle. Comment procédez-vous
pour les solutionner?”, M. Ayoub Hmayed reconnaît la multitude
de ces problèmes et leur complexité, puisqu’ils englobent
différents domaines: le développement social, l’analphabétisme,
l’aide aux artisans et aux associations s’occupant des problèmes
de la femme, de l’enfant, des personnes du troisième âge,
les statistiques portant sur l’habitat, sans perdre de vue les services
rendus aux handicapés, les problèmes de l’enfance, etc...
- Considérez-vous suffisante l’assistance de votre ministère
pour régler les problèmes sociaux au Liban?
“Durant la guerre, le secteur privé a contribué à
traiter tous les problèmes en l’absence des institutions étatiques.
Après la fin des douloureux événements, le ministère
des Affaires sociales, à l’instar des autres institutions étatiques,
a repris ses activités, bien que son potentiel humain soit limité,
nos fonctionnaires ayant besoin de s’initier aux techniques modernes dans
le domaine de l’action sociale.
“L’Office de développement social ne chôme pas, depuis
qu’il dépendait du ministère du Travail; puis, du ministère
de la Santé. Je ne prétends pas que mon département
est en mesure de satisfaire tous les besoins, mais je peux assurer qu’il
s’acquitte de ses lourdes responsabilités dans une proportion de
40 à 50 pour cent. Les ministères de la Santé, de
l’Education, de l’Enseignement technique et professionnel couvrent une
autre partie des besoins.”
COORDINATION AVEC LES INSTITUTIONS SOCIALES
- Comment s’effectue la coordination entre votre ministère
et les institutions sociales, surtout celles dont les épouses des
trois présidents assument la direction?
“Nous coordonnons nos activités, non seulement avec ces institutions,
mais avec 214 autres réparties sur tout le territoire libanais.
Des commissions mixtes gèrent le volet financier, mais nous n’intervenons
pas dans les détails, laissant ce soin à leurs cadres humains.
“Nous nous limitons à coopérer avec les institutions
et associations de caractère social, en veillant à ce qu’elles
se conforment aux accords conclus avec leurs conseils exécutifs.
Si elles les transgressent, nous leur adressons des mises en garde par
l’intermédiaire de nos contrôleurs qui effectuent des visites
périodiques aux institutions mentionnées, afin d’y assurer
la régularité du travail et sa continuité dans les
meilleures conditions. Faute de quoi, nous dénonçons l’accord
signé avec l’association qui déroge à ses clauses.”
- Le ministère des Affaires sociales envisage-t-il d’améliorer
les conditions de vie et de détention des prisonniers?
“Le problème des prisons fait l’objet de tractations entre les
ministères de l’Intérieur et de la Justice, notre département
ayant, pratiquement, un rôle modeste, limité à l’enfance
et à la délinquance juvénile.
“Quoi qu’il en soit, notre ambition est grande dans ce domaine, d’autant
que nous avons commencé à faire face à la mendicité
et au vagabondage, à travers une commission mixte comprenant des
représentants des ministères de l’Intérieur, de la
Justice et des Affaires sociales.
“Au moyen de ladite commission, nous étudions ce phénomène
qui a tendance à prendre de l’extension, à l’effet de le
traiter d’une manière rationnelle. Du point de vue juridique, nous
ne disposons d’aucun moyen pour traiter le cas des non-Libanais.”
BUDGET D’AUSTÉRITÉ
- Etes-vous satisfait des prévisions budgétaires de
votre ministère et suffisent-elles à répondre aux
besoins?
“En 1997, j’ai pu augmenter les crédits de 4 milliards de livres.
Cette année, il s’agit d’un budget d’austérité, mais
je suis parvenu à convaincre la commission parlementaire des Finances
de ne pas réduire, exagérément, le budget de mon ministère.
Le Conseil des ministres s’est montré également compréhensif.
D’autant que les ministères de l’Education, de l’Enseignement technique
et professionnel n’ont pu assurer une place à tous les enfants en
âge scolaire.
“Quoi qu’il en soit, nous n’avons pu obtenir que 94 milliards de livres,
sur les 120 milliards initialement prévus; 92 milliards sont destinés
aux associations civiles, le reste devant couvrir les traitements des fonctionnaires
et les dépenses administratives.”
- Obtenez-vous une aide des organisations internationales concernées
par les problèmes sociaux?
“Nous ne recevons pas d’aide à titre de subvention, mais concluons
des accords avec le Fonds des Nations Unies pour le développement,
en vue de l’exécution de projets en rapport avec le développement
social.”
OUI AUX MOUVEMENTS REVENDICATIFS...
L’entretien porte, alors, sur les problèmes de l’heure et
M. Hmayed émet ces réflexions à propos du “mouvement
des affamés” de cheikh Soubhi Toufayli (avant l’affrontement armé
de ce dernier avec nos forces régulières): “Nous sommes
avec ceux qui réclament un développement global équilibré
dans toutes les régions, notamment celles de la Békaa et,
spécialement, de Baalbeck-Hermel, de Jbeil, d’Iklim el-Kharroub.
C’est pourquoi, nous comprenons les mouvements revendicatifs et protestataires,
sans souscrire aux procédés négatifs auxquels pourraient
recourir leurs promoteurs.”
- Pourquoi n’avez-vous pas, en tant que ministre des Affaires sociales
essayé de répondre aux besoins des habitants dans les régions
mentionnées?
“D’abord, mon affiliation est d’ordre national, bien que je sois chiite.
Puis, en tant que membre d’un parti (Amal), nous œuvrons en faveur de l’homme
au Liban, non d’une communauté ou une confession. Nous agissons
aux fins de faire reconnaître leurs droits aux citoyens; nous pouvons
réussir ou échouer dans notre action, mais cela ne doit pas
nous porter à désespérer, sinon nous ne pourrions
pas freiner la marche vers le chaos sur le plan intérieur.”
POURQUOI “AMAL” ET LE “HEZBOLLAH” NE FUSIONNEraieNT-ILS
PAS?
- Pourquoi “Amal” et le “Hezbollah” ne formeraient-ils pas un front
commun de résistance, du moment que leur objectif est le même?
“C’est une bonne question qui devrait être adressée à
d’autres que nous. Nous sommes favorables à une coordination entre
les forces qui ont foi en ce que l’ennemi israélien ne peut être
confronté avec la diplomatie silencieuse ou même active, mais
avec le fusil. Aussi, avons-nous appelé en permanence à une
rencontre et à une coopération avec toutes les parties, depuis
le lancement des “bataillons de la Résistance libanaise” de “Amal”,
alors que beaucoup parmi ceux qui brandissaient le fusil et optaient pour
la lutte armée, ont changé de tactique”.
- Les milieux du “Hezbollah” considèrent que l’absence de
coordination, voire l’existence d’une émulation entre les deux “résistances”
affaiblissent leur combativité. Qu’en pensez-vous?
“Comme je l’ai déjà dit, nous sommes favorables à
la coordination et à la coopération, preuve en est que nous
avons prôné à plus d’une occasion l’unité de
feu des résistants face à l’ennemi israélien”.
- Pourquoi n’y a-t-il pas eu de réaction positive à
l’égard du projet élaboré par le secrétaire
général du “Hezbollah”, en ce qui concerne le ralliement
aux “cellules de la Résistance”, du moment que vous êtes partisans
de la coordination?
“Nous tendons la main à nos frères du “Hezbollah”, en
rappelant que nous avions lancé, précédemment, les
“bataillons de la Résistance libanaise”, ceci répondant au
souhait de notre peuple de déconfessionnaliser la Résistance,
pour en faire un mouvement national libanais face à l’ennemi israélien”.
LA LIBÉRATION N’EST PLUS LOINTAINE
- D’aucuns prévoient des changements au niveau régional
qui pourraient se répercuter sur la situation intérieure
au Liban, à commencer par la scène sudiste; quel est votre
avis à ce sujet?
“Il va sans dire que des changements sont prévisibles au niveau
de la région, résultant de la politique de Netanyahu qui
a bloqué avec son gouvernement le processus de paix.
“Toujours est-il que l’action diplomatique de la part tant de la Russie,
que de l’Europe, jointe à celle des Etats-Unis, débouchera
sur un style différent par rapport à la paix. C’est pourquoi,
nous croyons que la libération du Sud, de la Békaa ouest
et du Golan n’est plus lointaine. Car le Liban et la Syrie ont prouvé
par leur position commune et solidaire, qu’ils incarnent l’ambition des
Arabes et leurs espoirs et, surtout, qu’ils sont dans le droit chemin,
contrairement à ceux qui ont eu hâte de signer des accords
séparés avec Israël”.
- Comment imaginez-vous l’avenir de “Amal” en temps de paix: se transformera-t-il
en parti politique ou bien persévèrera-t-il dans la résistance
à des fins non locales?
“Amal a porté les armes dans le cadre des “bataillons de la
résistance libanaise” pour faire face à l’occupant israélien.
Lorsque l’ennemi évacuera notre territoire, notre mouvement n’aura
plus besoin d’agir sur le terrain, alors que l’Etat et ses forces régulières
assureront la défense du territoire et des frontières. A
ce moment, les “bataillons de la résistance libanaise-Amal” se tiendront
aux côtés des forces de sécurité et leur apporteront
leur appui moral et, si cela est nécessaire, ils les soutiendront
avec le sang”.
NOUS DÉSARMERONS NOS “BATAILLONS” APRÈS
LE RETRAIT ISRAÉLIEN
- Le chef de l’Etat a déclaré à “La Revue du
Liban”, récemment, qu’en cas de retrait israélien, l’Armée
se déploiera jusqu’aux frontières libanaises internationalement
reconnues et il sera procédé au ramassage des armes dans
toutes les régions du pays...
“C’est un fait naturel. Quand les forces israéliennes se retireront
du Sud et de la Békaa ouest, les gens n’auront plus besoin de garder
leurs armes, sauf pour leur défense personnelle, en vertu de permis
délivrés en bonne et due forme par l’Etat libanais, car les
forces régulières seront responsables de la sécurité
des citoyens”.
- La position du “Hezbollah” à ce sujet sera-t-elle pareille
à la vôtre?
“Cette question doit être posée au “Hezbollah” et nos
frères de ce parti ne sont pas moins soucieux que nous de préserver
l’intérêt du Liban. Je crois qu’ils adopteront la même
attitude”.
NON À LA DÉMAGOGIE
- Lors du débat sur l’audiovisuel, vous vous êtes opposé
à la transmission de nos démêlés internes à
l’étranger: notre linge intérieur est-il à ce point
sale pour en avoir honte? Et quelle est la vérité des scandales
dont on parle tant?
“Le sujet doit être maintenu en dehors de la démagogie.
Partant de là, nous sommes pour la liberté d’expression jusqu’à
l’extrême limite, la Constitution consacrant cette liberté,
autant que la liberté de croyance.
“Cependant, nous ne tolérons pas les excès, car nous
vivons dans la même maison et tout ce qui affecte l’un de nous se
répercute sur l’autre. Je crois que tous sont jaloux de notre indépendance,
de notre souveraineté et de la préservation de nos institutions.
C’est pourquoi, il nous faut agir en conséquence”.
- Peut-on déduire de vos propos qu’il existe, effectivement,
un linge sale et des scandales?
“Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit. J’ai voulu parler simplement
de l’émission, par satellite, des programmes politiques. Mais nous
ne voyons pas l’utilité de la diffusion à l’étranger
de faits pouvant porter préjudice au Liban”.
- Vous avez été l’un de ceux qui ont douté de
l’organisation des élections municipales et présidentielles;
êtes-vous toujours du même avis?
“Je ne vis pas dans ce climat. La présence des institutions
étatiques dans les municipales et les préparatifs du scrutin,
ne supposent pas l’élection d’un nouveau président de la
République et ne dépendent pas de l’échéance
présidentielle, cette dernière étant du ressort de
la Chambre des députés et du rôle du Législatif,
uniquement.”
QUID DES MUNICIPALES ET DES PRÉSIDENTIELLES?
- On constate, toutefois, que les membres de l’Assemblée
sont plus intéressés que le peuple par les élections
municipales...
“Pour être équitable, je dirais que certains veulent placer
l’échéance municipale dans ce cadre, leur objectif véritable
étant de porter atteinte à la Chambre des députés
et à son degré de représentativité.
“Or, le peuple qui nous a élus est digne de respect et d’estime;
aussi, avons-nous pleine confiance dans le niveau de son éveil avec
lequel il exerce son devoir d’électeur”.
- Vous attendez-vous à la reconduction du mandat présidentiel
ou à l’élection d’un nouveau chef de l’Etat?
“Je crois que beaucoup ont profité de l’expérience passée
pour être plus réservés en parlant de cette échéance”.
- L’insistance du président Hraoui à s’opposer à
une seconde reconduction de son mandat, signifie-t-elle que la prorogation
n’est plus possible?
“L’échéance présidentielle comporte des facteurs
internes et externes. Autrement dit, il ne s’agit pas d’une question purement
intérieure, celle-ci ayant toujours été influencée
par des facteurs extérieurs.”
- La dernière fois, la Syrie était le seul électeur
extérieur; croyez-vous que les Etats-Unis seront associés,
cette fois, dans le choix du président libanais, d’autant plus que
nous voyons de nouveau une présence américaine qualitative
au Liban?
“Il s’agit moins d’une présence qualitative, que d’une tentative
d’améliorer l’image de cette présence et de ce rôle.
En dépit de la visite de Mme Albright, de la réouverture
du consulat US et du survol de certaines régions du Sud et du littoral,
je pense que la présence et le rôle syriens auront plus d’impact
par rapport à l’unité des Libanais et à la consolidation
de l’action dans la bonne direction au cours de toutes les étapes
futures.” |