Editorial


Par MELHEM KARAM 

 
I - IRAK: L’AMÉRIQUE ET L’EUROPE, DEUX FACES ET DEUX POLITIQUES 
II - L’ALGÉRIE RASSURÉE PAR L’UNION EUROPÉENNE 
- I -
Des “intérêts vitaux” et la velléité d’hégémo-nie sont les facteurs motivants de la nouvelle guerre du Golfe. Sans omettre l’arrogance et le complexe de supériorité qui affligent les fortes têtes. Au Conseil de Sécurité formé de cinq Etats: l’Amérique, la Russie, la France, la Grande-Bretagne et la Chine, seuls les Américains et les Britan-niques préparent l’option militaire. Quant au Canada et à l’Australie, ils sont prêts à se joindre à cette opération sans grand enthousiasme. 
En Europe, après l’Allemagne qui a accepté de placer les bases aériennes de l’Otan sur son territoire à la disposition de Washington, le Portugal a permis l’installation de bases navales américaines dans les Açores. L’Espagne s’est dit disposée à se tenir aux côtés des Américains, au cas où l’option diplomatique venait à échouer. L’Italie, elle, ne juge pas nécessaire de proclamer que les bases américaines et celles de l’OTAN sur son territoire, ne sont pas utilisables. Alors que la Pologne se montre prête à envoyer des soldats, en cas de nécessité. 
William Cohen, secrétaire US à la Défense, a été accueilli chaleureusement à Moscou. Et la Russie, opposée à toute action militaire contre l’Irak, a mis en garde Washington, par l’intermédiaire de son ministre de la Défense, Ygor Serguéïev, assurant que ses intérêts vitaux sont concernés. 
Celui-ci a tenu des propos laissant entendre une menace de confrontation, disant que les relations militaires entre la Russie et l’Amérique pourraient se détériorer, si Bagdad était exposé à une attaque militaire américaine. Serguéïev a ajouté, en prenant à témoin Abraham Lincolin: “Il est vrai que la force peut tout emporter, mais ses victoires sont de courte durée.” 
William Cohen, surpris par cette déclaration publique avant leur rencontre, autant que par le ton employé par son homologue russe, a enregistré des observations avant de lui répondre, en mettant l’accent sur l’importance que Washington attache à sa relation avec Moscou. “Le président Clinton, a-t-il affirmé, donne des preuves de sa prudence et non de sa précipitation.” 
Quant à l’Amérique, elle poursuit ses préparatifs, comme si rien ne s’était produit, ou comme si la guerre allait être déclenchée d’ici à quelques heures. Selon les renseignements américains, toutes les forces devant entreprendre l’opération “Tonnerre du désert” seront fin prêtes dans quelques jours, bien que la date de cette opération n’ait pas encore été fixée. Trent Lott, leader de la majorité républicaine au sénat, pense que les Etats-Unis, n’attaqueraient pas l’Irak avant le 24 février, le Congrès étant en congé du 13 au 24 courant, les bombes chercheuses devant être partie dans la bataille, ces bombes qui ont tué depuis sept ans des centaines de personnes dans l’un des abris de Bagdad. 
Le président Chirac a affirmé à Vienne qu’il fallait tout faire pour éviter la confrontation militaire, la solution pacifique étant toujours possible. 
Ainsi, s’affrontent la diplomatie lente, dans le cadre de laquelle l’Europe se meut et la diplomatie de la rapidité et de la force qui fait agir les Etats-Unis. Surtout après que les “Quinze” européens ne soient pas parvenus à une initiative unifiée. L’Allemagne a changé d’attitude, ainsi que l’a proclamé Klaus Kinkel, son ministre des Affaires étrangères, en s’alignant sur la position de l’Amérique, après une courte période d’hésitation. 
En Espagne, l’armée américaine peut utiliser la base aérienne américano-hispanique “Moron” en Andalousie, l’Amérique l’ayant utilisée maintes fois. L’Italie demeure perplexe, après que Lamberto Dimi eut déclaré: “L’Amérique ne sera pas autorisée à se servir des bases de l’OTAN en Italie”. De son côté, le Premier ministre, Romano Prodi, a dit: “Notre relation avec les Etats-Unis constitue la pierre de base de notre politique internationale.” 
Les Pays-Bas ont proclamé leur engagement vis-à-vis des USA. De même que le Danemark et les pays qui souhaitent adhérer à l’OTAN: la Pologne, la Hongrie et la République tchèque, tous s’étant alignés sur le plan du président Clinton. 
Cependant, l’offensive du président américain et sa fermeté dans toutes ses négociations, affirment que la guerre est imminente et se trouve à un jet de pierre. Avec les souhaits formulés par les instances arabes et internationales de voir l’entêtement se dissiper des têtes de toutes les parties. 
Que Dieu réponde à ces souhaits et les exauce. 
- II -
Loin des complexes et des susceptibilités, nous assistons à de nouvelles relations solides entre l’Algérie et l’Europe. Ceci signifie une ouverture ou une fenêtre sur cette ouverture et des espoirs en une coopération sans arrière-pensées, doublés de doute et de soupçon. 
La délégation parlementaire européenne ayant effectué une visite à Alger, a réalisé un bon début de ces espoirs, en évitant les pièges “fondamentalistes”, c’est-à-dire le contact avec le front du salut, parlant au nom des “assassins” de l’armée islamique. La mission de la troïka européenne était de poser la question effrontée: “Qui tue?”. Cette question est considérée comme une atteinte aux victimes du terrorisme islamique et à ceux qui le combattent, à la fois. 
Les parlementaires de Strasbourg ont su comment acquérir la crédibilité à leur mission. Ils ont, également, donné du sérieux à leur démarche et réussi dans ce domaine. Ils ont découvert que le peuple algérien était sur le qui-vive, que ce soit sa droite ou sa gauche; prêt à toutes les éventualités. Puis, il est un fait qu’on doit enregistrer: aucun Européen n’a posé l’ombre d’accusations autour du “rôle” des autorités dans les tueries. Les pourparlers se sont déroulés avec célérité entre la commission européenne et Alger, en vue d’un accord de coopération permanente, après la proclamation par l’Europe de son entière confiance dans la force, le réalisme du président Liamine Zéroual et sa personnalité transcendante. 
L’Europe est appelée, à présent, à mettre un terme à la liberté, plutôt à l’anarchie avec laquelle se comportent les “terroristes”, que ce soit à Bruxelles ou en Grande-Bretagne. Ainsi, la visite de cinq jours effectuée en Algérie par neuf parlementaires européens, a rassuré son gouvernement, non parce que ces derniers se sont soumis à la volonté de l’Algérie, en ne rencontrant pas le “front du salut”, mais à cause de leur franchise et des révélations faites. C’est ce qu’a exprimé le président de la commission, André Soulié en ces termes: “Nous avons passé au crible toute parole et tout point d’interrogation autour d’une intervention de l’armée algérienne dans les massacres sanglants auxquels s’expose l’Algérie.” 
Ceci a permis à Abdel-Kader Hajjar, président de la commission des relations extérieures de l’Assemblée algérienne de proclamer, sans hésitation, que l’Algérie est, aujourd’hui, une société ouverte, portant le fanion de la transparence. Puis, il a réitéré son rejet absolu devant les commissions d’enquête, de toute assistance humanitaire ou autre. 
La mission des responsables algériens qui ont eu la dextérité de laisser à la commission européenne toute latitude de rencontrer toutes les tendances politiques, hormis les islamistes radicaux, y compris les milieux de la société civile, cette mission a été facilitée par le comportement spécial de certains des neufs parlementaires européens. La provocation de Daniel Cohen Bendit, qui s’est soucié de se distinguer de ses collègues et l’initiative caricaturale entreprise par André Soulié, président de la délégation, ayant consisté à déchirer une lettre adressée à cette dernière par le “front islamique du salut”, où il était fait état d’indécence médiatique, ces deux comportements n’ont pas grandi l’image de l’Union européenne aux yeux des gens. 
Les terroristes se sont souciés de jeter la lumière sur l’impuissance du gouvernement à les réprimer le dernier jour de la visite de la délégation européenne. Et ce, en perpétrant une tuerie qui s’est soldé par deux tués et trente blessés. Ceci n’a pas affecté la détermination des Européens, mais les a incités à faire preuve de plus de sympathie à l’égard d’un régime qu’on doit soutenir, parce que les indices n’affirment pas que la tendance soit en faveur du règlement de cette crise inextricable.
Photo Melhem Karam

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