Kofi
Annan, pensent les observateurs, est “l’espoir de la dernière chance”.
Le secrétaire général des Nations Unies est attendu
ce vendredi à Bagdad, où il va tenter une ultime démarche
auprès de Saddam Hussein, à l’effet de faire prévaloir
la “solution diplomatique”... Alors qu’au Pentagone, le chef de l’Exécutif
US se concertait avec son état-major pour mettre au point sa machine
de guerre. “Les USA ne veulent pas diviser l’Irak”, assure R. Jones, ambassadeur
US à Beyrouth (notre photo).
Au moment où nous mettons sous-presse, Bagdad aura reçu
la visite de trois experts onusiens chargés d’inspecter les huit
sites présidentiels que le président Saddam Hussein a accepté
d’ouvrir à leur intention. Il aura prouvé, ainsi que ses
huit palais n’ont pas été transformés en arsenaux
où seraient cachées des armes à destruction massive.
Ces experts auront devancé M. Kofi Annan, secrétaire
général des Nations Unies, dont la visite à l’Irak
suscite de grands espoirs dans la communauté internationale, la-quelle
s’attend qu’il parvienne à trouver une solution pacifique à
la crise opposant Bagdad à Washing-ton. Et, partant, à convaincre
la capitale fédérale de ne pas opérer des frappes
aériennes dont le peuple irakien paierait chèrement le prix.
Le chef de la diplomatie française a émis le souhait
que “Saddam change d’attitude et ne mette pas des bâtons dans les
roues à l’action du secrétaire général”...
De son côté, le secrétaire d’Etat britannique à
la Défense a formulé l’espoir “de voir le chef de l’Etat
irakien écouter la voix de la raison”.
Le roi Hussein et un porte-parole officiel koweitien abondent dans
le même sens, disant “que Saddam peut encore changer le cours des
événements, en coopérant avec l’organisation internationale
pour épargner à son peuple de nouveaux malheurs”.
M. Annan a conféré, pour la troisième fois en
quelques jours, avec les représentants des pays membres permanents
du Conseil de Sécurité, en prévision de sa visite
sur les bords de l’Euphrate.
Cependant, le secrétaire général de l’ONU a posé
comme condition, pour accepter d’entreprendre sa démarche auprès
de Saddam, “de parvenir à un dénominateur commun” avec les
membres de la haute instance onusienne.
Dans ce cas, il aurait la possibilité de désamorcer la
crise, comme Evgueni Primakov, ministre russe des Affaires étrangères,
l’avait fait le mois dernier, en amenant Washington à surseoir à
sa décision de frapper l’Irak.
S’il réussissait dans sa mission, il sauverait en même
temps l’Irak et, surtout, l’ONU qui est maintenue en dehors de tant d’initiatives
- américaines ou autres - un peu partout dans le monde: en Iran,
en Libye, au Soudan et au Proche-Orient.
En empêchant les frappes aériennes en Irak, il servirait
en même temps l’Amérique en la “libérant” d’une aventure
qui se retournerait contre elle comme un boomerang.
Puis, les Nations Unies pourraient, avec leur prestige, reprendre le
rôle qui leur revient, en tant que défenseur de la sécurité
et de la paix mondiales.
Ainsi, il leur serait loisible de s’interposer dans le conflit du Proche-Orient
et d’obtenir, enfin, l’application de la résolution 425 du Conseil
de Sécurité restée lettre morte depuis près
de vingt ans.
Enfin, l’ONU aurait le pouvoir de déposséder Israël
des armes de destruction massive, l’arme nucléaire notamment, dont
il refuse de se débarrasser... Pourtant, ce n’est un secret pour
personne: l’Etat hébreu dispose de plusieurs réacteurs et
installations atomiques: à Demona, dans le secteur centre-ouest,
à 30 km de Haïfa, à Bir Yacoub (au nord-ouest de Jérusalem)
et sur les collines de la Judée où ont été
aménagées des stations souterraines équipées
pour le lancement des missiles...
M. Annan ferait donc d’une pierre trois coups: il sauverait l’Irak,
le Proche-Orient et l’ONU. Tous nos vœux l’accompagnent.
Puisse sa mission ne pas connaître le même triste sort
que celle avortée de Javier de Cuellar entreprise en 1990, la veille
de la “Tempête du désert”... |