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C’ÉTAIT IL Y A 25
ANS
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Il
n’est pas inutile de se souvenir. On retrouve des points de repère.
C’est ainsi qu’en feuilletant la collection des éditoriaux que j’avais
écrits, il y a 25 ans, dans le “SAFA”, je suis tombé
sur ce texte daté du 22 octobre 1973 qui pourrait intéresser
le lecteur d’aujourd’hui:
“Le rebondissement de l’affaire du “Watergate” au moment où M. Kissinger se trouve à Moscou pour discuter de la guerre et de la paix au Proche-Orient, ce n’est peut-être qu’une coïncidence fortuite. Mais elle est bien gênante, il faut le reconnaître. “On a évidemment tendance ici à voir facilement la main du sionisme international, chaque fois qu’un Etat est en butte à des difficultés internes de nature à paralyser sa diplomatie orientale; mais comment oublier que les principaux héros du “Watergate” sont des fonctionnaires juifs? Et comment ne pas établir un rapprochement entre la relance dramatique de l’affaire et le voyage de Kissinger à Moscou? Et avec la campagne de nouveau déclenchée pour l’“impeachment” qui pourrait aboutir à la démission de Nixon et à son remplacement par le vice-président, le sioniste bon teint Gerald Ford? “Tout cela est bien troublant. Certes, on peut dire qu’après tout ce que Nixon a fait pour soutenir l’effort militaire d’Israël, ce pays ne peut espérer beaucoup plus de Ford. Peut-être justement que si. Il pourrait escompter la fin de la politique américano-soviétique de détente; une intervention militaire américaine sous prétexte de protéger les intérêts pétroliers des Etats-Unis en Orient; enfin, la certitude définitive et absolue que c’est Israël qui gouverne à Washington... “Ces calculs ne sont pas invraisemblables quand on mesure le degré d’orgueil auquel sont parvenus les dirigeants de Tel-Aviv. Il n’y a, pour cela, qu’à relire les déclarations qu’Abba Eban a faites le soir de son retour de New York, au moment même où M. Kissinger arrivait à Moscou: “La clef de toute initiative politique se trouve dans une victoire militaire israélienne”, a-t-il affirmé pour répondre à la question de savoir ce qu’il faudrait espérer de la rencontre de Moscou. “Puis, parlant au nom des Etats-Unis, M. Eban a ajouté: “Ils nous aident, parce qu’ils veulent que la victoire soit de notre côté, parce qu’ils veulent que nous n’allions pas aux négociations en position de faiblesse et parce qu’ils sont intéressés à ce qu’Israël sorte victorieux de cette confrontation.” “M. Kissinger est prévenu. La “diplomatie” de M. Eban ne se fonde que sur l’action de ses généraux et sur la puissance militaire des Etats-Unis. M. Kissinger peut causer avec M. Brejnev; M. Nixon est menacé d’être mis en jugement et M. Ford est préparé pour le remplacer. “La perspective d’une paix dans la justice et dans l’honneur pointait à l’horizon pour la première fois depuis 25 ans. Elle rend les dirigeants sionistes complètement hystériques. L’Amérique a paru sensible, après le 6 octobre, à cette perspective. Une extraordinaire campagne de pressions de toute nature a été déclenchée pour paralyser la Maison-Blanche. M. Nixon a eu beau céder à la démagogie d’un Congrès pro-sioniste en demandant le vote de deux milliards (et 200 millions) de dollars pour Israël, Mme Meir ne lui pardonne pas l’envoi de M. Kissinger à Moscou. “Les conséquences de cette folle politique qu’on ne redoutait qu’à longue échéance, sont en train de se produire à une cadence accélérée: la guerre du pétrole est commencée. En prenant l’initiative, le roi Fayçal semble admettre désormais que son pari américain est perdu. Son exemple est suivi depuis Alger jusqu’au Koweit, sans exception. Il n’y a plus de régimes de droite et de régimes de gauche: la guerre a rassemblé tous les Arabes dans un même combat. “Pas plus que les avertissements de Fayçal, l’offre de paix de Sadate n’a été entendue. “Au lieu de saisir la chance exceptionnelle qui se présentait, l’Amérique a donné à Israël le temps (et les moyens) de retrouver le langage de l’arrogance. “M. Eban, au nom des Etats-Unis, proclame que la paix ne sera pas possible sans une nouvelle humiliation des Arabes. Il a complètement perdu la tête. “Mais qui oserait, à Washington, lui dénier le droit de parler pour l’Amérique?” C’était au lendemain de la “guerre d’octobre” qui avait vu la
traversée du canal de Suez par les Egyptiens, la reconquête
du Golan par les Syriens et, ensuite, la contre-offensive israélienne.
Des perspectives de paix s’offraient sur la base de la résolution
242 dont Syriens et Egyptiens réclamaient l’application, soutenus
par Moscou.
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