MARIAGE CIVIL L'EPREUVE DE FORCE ENTRE BAABDA ET KOTRAYEM PRESISTE...
LE POUVOIR CONTRE LE "RETRAIT CONDITIONNEL" DU SUD PRECONISE PAR ISRAEL

Les réactions au triple plan politique, religieux et populaire suscitées par la bataille sur le projet de mariage civil facultatif n’ont pas été encourageantes du tout. Bien des choses sont apparues, à cette occasion, dans toute leur vérité, à savoir que l’action se fait sur base des “négativismes”. Alors que le regretté Georges Naccache écrivait à la fin des années 40, plus exactement le 10 mars 1949: “Deux négations ne font pas une nation”. 

Les prises de position contradictoires à propos de questions importantes sont tellement irréversibles, qu’elles risquent de tout emporter sur leur passage. Et d’ébranler l’édifice, autant que l’entité, au moment où nous devons unifier nos rangs et les resserrer davantage, pour faire face à tant de dangers qui nous menacent dans cette phase décisive de notre Histoire. 
Le fait le plus dangereux dans le timing réside en ce qu’il intervient à une étape exigeant des résolutions décisives, afin de ne pas donner du Liban l’image d’un pays divisé sur lui-même et incapable de se gouverner. Ceci pose plus d’un point d’interrogation sur la modalité d’appliquer la résolution 425, si elle venait à être proposée d’une manière sérieuse, sans être assortie de conditions. 
De toute façon, le projet de mariage civil est l’objet de tractations virulentes sur plus d’un plan, accompagnées d’une crispation confessionnelle qui ne doit pas se perpétuer, car elle se répercuterait, négativement, sur tout le monde. 
Ceci a nécessité les rencontres et concertations à tous les niveaux, publiquement ou d’une façon discrète, à l’effet de rechercher une échappatoire à la crise, de nature à sauver la face de toutes les parties qui y sont impliquées. 

MÉDIATION SYRIENNE 
L’action la plus frappante est celle de la Syrie, à travers les contacts effectués par le brigadier Ghazi Kanaan, chef des services de renseignements des forces syriennes stationnées en territoire libanais, à commencer par le palais de Baabda, où il a exprimé le souci de Damas d’éviter au président de la République un “revers moral”. 
La démarche du brigadier Kanaan a été suivie, naturellement, d’un long tête-à-tête entre les présidents Hraoui et Berri. Cependant, la coterie du chef du Législatif n’a pas révélé la teneur de l’entretien entre les deux hauts responsables. Mais il est clair que le mariage civil était au centre de leur échange de vues. 
Alors qu’on s’attendait à la baisse de la tension après la visite de l’officier supérieur syrien au palais de Baabda, c’est le contraire qui s’est produit. En effet, les milieux proches du palais présidentiel ont relancé la controverse de façon à torpiller tous les efforts de pacification. Il est apparu que la crise était liée, organiquement, à la bataille présidentielle et à rien d’autre. 
En fait, le chef de l’Etat ne peut faire marche arrière, invoquant la majorité ministérielle qui s’est rangée à son côté dans cette bataille qui l’oppose au chef du gouvernement, lequel ne peut lui renier cette “victoire”, partant du fait qu’elle renforcerait les chances de la reconduction qu’il combat au moyen de toutes les armes politiques. 

“ENTERREMENT DU PROJET AU PARLEMENT”... 
Le président Hraoui continue donc à vouloir transmettre à la Chambre des députés le projet de loi relatif au mariage civil, ce qui exige sa signature par le Premier ministre. 
Toujours est-il que le chef du Législatif ne paraît plus intéressé, ni de près ni de loin à ce projet, auquel il prépare un “enterrement de première classe” dès qu’il parviendra au parlement. S’il n’en était pas ainsi, il aurait ressorti des archives parlementaires la proposition de loi présentée par le Parti social national syrien, cette dernière étant bloquée dans le tiroir de Me Chaker Abousleiman, président de la commission parlementaire de l’Administration et de la Justice. 
Toutefois, le président Berri serait disposé - si on le lui demandait - à rechercher une solution de compromis susceptible de sortir ses deux partenaires de la troïka du mauvais pas dans lequel ils se sont fourvoyés. Tout en soupçonnant le président du Conseil de ne pas être favorable à l’abolition du confessionnalisme politique, du moins dans l’étape actuelle. 
De plus, M. Hariri insiste pour renvoyer le projet de mariage civil au Conseil des ministres pour une seconde lecture sur base des observations formulées par les membres du gouvernement, estimant que seul a été approuvé le principe du mariage civil facultatif. 

QUESTIONS PRIORITAIRES 
Le chef du gouvernement bénéficie, de plus, du soutien des hautes instances religieuses, tant mahométanes que chrétiennes, celles-ci estimant que le “projet Hraoui” a divisé les Libanais et que d’autres questions bien plus impérieuses exigent des solutions urgentes, ainsi que le stipule l’accord de Taëf. S.Em. le cardinal Sfeir a attiré l’attention sur ce point précis, rappelant que la naturalisation avait été approuvée et des milliers de personnes en ont bénéficié, en dépit des mises en garde pressantes de Bkerké. 
De son côté, cheikh Mohamed Rachid Kabbani, mufti de la République, a déclaré devant les nombreuses délégations venues de toutes les régions du pays, pour lui proclamer leur soutien: “C’est nous qui démolirons, s’il plaît à Dieu, le mur du confessionnalisme. Quant à notre refus du mariage civil facultatif, il nous est dicté par notre souci de préserver la religion.” 
Les voyages du président de la République à Abou-Dhabi et, du Premier ministre, à Vienne, Paris, Riad et Damas, auraient dû atténuer l’ardeur des partisans et des adversaires du projet. Or, il n’en est rien. Les milieux proches de M. Hariri assurent qu’il ne signera pas le projet et dans la capitale de l’EEAU, le chef de l’Etat a fait escalader son offensive verbale contre les opposants à sa proposition. Ainsi et même en l’absence de MM. Hraoui et Hariri, la controverse n’a rien perdu de son acuité et tous les efforts déployés en vue d’y mettre fin se sont avérés inefficaces, les deux responsables restant sur leur position. 

REPRÉSAILLES PRÉSIDENTIELLES? 
Ceci étant, les proches du président Hraoui lui attribuent l’intention de ne plus apposer sa signature sur tout projet de loi ou décret intéressant le chef du gouvernement, si ce dernier s’abstient de signer le projet relatif au mariage civil, même si ces textes devaient être gelés jusqu’à la fin de son mandat... C’est le cas de trois projets concernant le statut personnel et les tribunaux chériés. 
Pendant ce temps, les amis communs reprennent leur médiation d’autant que le délai durant lequel la double révision de la Constitution doit avoir lieu, en prévision des présidentielles, expirera à la fin de la session parlementaire ordinaire le 31 mai prochain. Cette révision devrait intervenir incessamment, car les trois prochaines semaines abonderont en fêtes religieuses fériées  chrétiennes et musulmanes. 
A ce propos, on constate que le mufti Kabbani a atténué quelque peu de la virulence de ses déclarations, dans l’intention de favoriser une solution de compromis, laquelle se traduirait par le retrait du projet de loi sur le mariage civil. 
Maintenant qu’Israël a fait part de son intention d’évacuer le Sud d’ici à un mois, laissera-t-on ce jeu pernicieux se poursuivre, attisant la tension? Ou bien l’intérêt supérieur de la nation amènera-t-il tous les responsables à se mobiliser, entièrement et à coopérer, pour faire face aux développements graves dans la partie méridionale du pays, d’autant que l’Etat hébreu propose l’application, à des conditions dont il exige l’acceptation par l’Etat libanais, de la résolution 425? 

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Aux dernières nouvelles, le Conseil restreint israélien de sécurité a préconisé, mercredi, un “retrait conditionnel” du Liban-Sud, proposition à laquelle le Liban a refusé de souscrire. 

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