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La succession des an-nées ne consolide pas un Etat. Un demi-siècle après sa naissance, les mêmes questions à son propos continuent à se poser: Est-ce un Etat laïc ou religieux? Quelle position donne-t-il aux Palestiniens qui revendiquent la même terre? Le rêve sioniste ne s’est réalisé que par les illusions et la parole. Et l’“Etat” est démocratique par rapport aux cinq millions de juifs qui y résident, uniquement, car il n’est en paix ni avec lui-même, ni avec les autres. Les cinquante années auraient dû être les années de la sérénité, de la stabilité et de la souveraineté. En fait, rien ne s’est réalisé de ces illusions qui lui restent étrangères. Depuis 1967, la superficie de la Ville sainte paraît sept fois plus grande grâce à l’intégration du secteur oriental et d’un certain nombre de villages arabes voisins. Malgré les expropriations, les Palestiniens ont payé le prix de la création du Grand Jérusalem, sur lequel les Israéliens comptent pour faire perpétuer la terre juive. La vie quotidienne est semée d’épines, de verres brisés pour les habitants établis dans les régions civiles contrôlées par Yasser Arafat et son gouvernement. Pour pouvoir se rendre à Gaza et en revenir, ainsi qu’aux villes placées sous le régime d’autonomie, trois millions de Palestiniens doivent manœuvrer, user de subterfuges et tromper les forces militaires israéliennes. Ainsi, l’Etat hébreu donne l’exemple unique pour l’édification d’une “patrie moderne”, placée “sous la fidélité à une promesse faite depuis mille ans”. Ceci au plan de la théorie. Quant au plan de l’exécution, il n’y a que des points d’interrogation ou des chimères et rien d’autre. Le cinquantenaire israélien ne pose rien de nouveau par rapport à “l’entité stable et l’Etat modèle” qui reste divisé à la manière d’une guerre d’usure entre laïcs et fondamentalistes religieux. Les 700.000 immigrants de l’ex-Union soviétique, vivent en tant que collectivité autonome, non intégrée dans la société israélienne, ayant leur parti politique, sous le leadership de Nathan Tcharansky; de même que deux quotidiens en langue russe et une station radiophonique émettant, également, en russe. Ils ne regardent à la télévision que le canal satellitaire de Moscou. La langue russe prédomine parmi les membres de la colonie qui se soucient de l’enseigner à leur progéniture. Jusqu’à ce jour, la brèche demeure profonde entre les immigrants de l’Ouest (Ashkenazes) et les juifs orientaux (Sépharades), lesquels contestent le traitement préférentiel réservé aux Occidentaux. Ceci les a incités à former un parti qui leur est propre, à l’instar des Russes sous le nom de “Kishit”. Nombreux sont les Israéliens, surtout les laïcs, qui croient que le mouvement sioniste est en voie de disparaître. S’il a atteint son objectif par la création d’un Etat aux juifs, il a échoué dans sa tentative de l’édifier sur les bases sionistes, en tant qu’Etat laïc, socialiste et pluraliste. Ben Gourion n’a pas réussi à séparer la religion de l’Etat. Les résultats obtenus par les sionistes, aujourd’hui, consistent en ce que les partis extrémistes forment un bloc important à la Knesset, capable de renverser le gouvernement, prêt à se coaliser avec tout parti pour accéder au pouvoir: le Likoud ou le parti travailliste. De même, la philosophie “kibboutz” (mobilisation générale pour atteindre un même objectif) s’est volatilisée, la société étant devenue une “société de marché”, chacun agissant en vue de servir, d’abord, son intérêt. Avec le “kibboutz” s’est estompé le rêve de réaliser une société complémentaire, homogène et cohérente. Par rapport aux laïcs, la capitale est Tel-Aviv alors que dans la logique des extrémistes religieux, c’est Jérusalem, avec ce que cela comporte de divergence et d’éloignement. Cependant, il existe une rencontre autour d’un dénominateur commun, à savoir que les deux parties tiennent à l’unité de la Ville sainte maintenue sous la souveraineté israélienne. Les Palestiniens considèrent, à juste raison, qu’après des années, la “légende” apparaîtra de nouveau, car ni le marché ni l’Etat ne peuvent s’occuper de tout réaliser. Ils sont incapables de résoudre tous les problèmes de la vie quotidienne et de relever les défis. Les Palestiniens tablent sur un fait important et en fournissent des indices palpables: après une guerre de six jours, une nouvelle conception israélienne a émergé à la surface, doublée d’un rite religieux extrémiste et évolué. Au cours des années, Israël a été contraint d’écarter, de sanctionner et d’éliminer un grand nombre des “valeurs” qu’il propageait. L’aristocratie achkenazie, alimentée par le mouvement ouvrier judéo-européen, a renié les bases et les fondements de l’Etat, en prônant la légende pionnière dont jouissent les gens du “kibboutz”. Un demi-siècle après la proclamation de l’Etat hébreu, les Palestiniens pâtissent encore de l’injustice et de l’occupation militaire; ils doivent combattre en vue de créer un Etat indépendant et brandissent une devise à laquelle ils refusent de renoncer: les Israéliens doivent savoir que le rejet de l’option nationale palestinienne signifie, automatiquement, l’affaiblissement de l’option nationale juive. |
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