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Notre confrère
s’est, alors, adressé au président en ces termes: “Pourquoi
refusez-vous de me rendre le salut?”. Ceci a provoqué une saute
d’humeur de la part du président de la République qui, voulant
l’éloigner de lui, a effleuré de sa main le front du journaliste.
Par la suite, le président Hraoui a pris contact avec MM. Mohamed
Baalbaki et Melhem Karam, présidents des Ordres de la Presse et
des journalistes, pour les informer de l’incident. Aussitôt, ceux-ci
se sont concertés à propos de l’affaire, avant de gagner
le domicile de M. Sabra, d’où ils se sont rendus au palais de Baabda
pour rechercher avec le président une formule de nature à
sauvegarder la dignité de la première magistrature et de
la Presse.
Le chef de l’Etat s’est montré compréhensif et tout laissait
prévoir un heureux épilogue dans l’après-midi de dimanche.
RÉUNION CONJOINTE DES ORDRES DE LA PRESSE
ET DES JOURNALISTES
Lundi, les Ordres de la Presse et des journalistes tenaient une réunion
conjointe, l’atmosphère s’étant embrouillée la veille,
pour on ne sait quel motif.
A l’issue de la réunion, un communiqué a été
diffusé qui a été mal accueilli par le président
Hraoui, parce qu’il a relevé une fermeté de ton jugée
inacceptable... certains termes du texte portant atteinte, à son
avis, à la première magistrature.
Pourtant, les deux Ordres ont évité l’escalade en n’adoptant
pas des propositions de certains confrères qui préconisaient
le boycottage du palais de Baabda et une grève générale.
Le communiqué considère que “l’acte du président
menace les fondements de la pratique démocratique au Liban et les
relations entre les institutions étatiques et la Presse, tout en
laissant une marque d’infamie dans l’histoire de ces relations.”
Aussi, la Presse demandait-elle “une initiative courageuse de la part
du chef de l’Etat, destinée à effacer les séquelles
de l’incident”, estimant que ce dernier dépasse la personne de M.
Hassan Sabra pour atteindre la profession dans son ensemble et, partant,
constitue un dangereux précédent, d’autant qu’il a provoqué
une grande effervescence, non seulement dans les milieux médiatiques,
mais dans l’opinion.”
PROTÉGER LE CITOYEN
“L’un des principes du système démocratique, ajoute le
communiqué, est la protection du citoyen face au pouvoir. Nous ne
devons pas être contraints de réclamer que la dignité
du pouvoir lui-même soit protégée contre le comportement
de certains de ses symboles.”
Et d’enchaîner: “Quelle que soit sa volonté de préserver
la dignité des instances étatiques, la Presse, pilier de
la démocratie, ne peut laisser compromettre sa propre dignité,
ni sacrifier sa liberté.”
Puis, après avoir rappelé qu’en démo-cratie il
exis-te des insti-tutions dont la fonction consiste à sauvegarder
les droits des instances di-rigeantes et des citoyens, face au mauvais
usage du droit d’opinion, le communiqué conclut: “C’est parce que
nous respectons le prestige de la présidence que nous avons demandé
au chef de l’Etat de présenter des excuses pour une faute commise
sous le coup de la colère.”
LA “GIFLE” OCCULTÉE EN CONSEIL DES MINISTRES...
Jusqu’à jeudi, aucune solution à l’incident de Bteghrine
n’était en vue. De plus, le Conseil des ministres a passé
sous silence et la “gifle présidentielle” et les dossiers chauds,
notamment les difficultés auxquelles l’Office de l’Electricité
du Liban se trouve en butte, se traduisant par le rétablissement
des coupures prolongées de courant (fait à signaler: le ministre
des Ressources hydrauliques et électriques n’a pas assisté
à la réunion ministérielle)...
Selon des sources informées, “on laisserait au temps le soin
d’arranger les choses”... l’affaire du soufflet devant connaître
sa fin heureuse à la faveur d’une visite que les présidents
des Ordres de la Presse et des journalistes effectueraient, incessamment,
au palais de Baabda, en compagnie du rédacteur en chef d’Ach-Chirah.
La date de cette visite serait fixée au cours d’une rencontre
au siège de l’Ordre de la Presse, d’un membre du gouvernement (M.
Chaouki Fakhoury, ministre de l’Agriculture, probablement, l’un des proches
du palais).
Cependant, selon certains milieux, le président de la République
persiste dans sa position dure et l’on soupçonne des parties non
encore identifiées de le monter contre la Presse.
De fait, interrogé sur le point de savoir si M. Sabra lui rendrait
visite dans les prochains jours, en compagnie de M. Murr (ou Fakhoury),
le président Hraoui a répondu par la négative.
Tout indique donc que Baabda n’est disposé à entreprendre
aucune initiative susceptible de dissiper la tension causée par
l’esclandre de Bteghrine. Au contraire, il a tendance à laisser
les choses se tasser, du moins pour le moment.
KARAM DÉMENT...
En effet, dans une déclaration à “Saout Ach-Chaab”, à
la BBC, à l’agence d’information “Al-Markazia”, M. Melhem Karam,
président de l’Ordre des journalistes, a démenti la nouvelle
selon laquelle la démarche entreprise par M. Michel Murr auprès
du chef de l’Etat aurait porté ses fruits.
“Plusieurs ministres, a-t-il précisé, avaient été
chargés d’intervenir auprès du palais de Baabda avant la
réunion conjointe des Ordres de la Presse et des journalistes et
la diffusion du communiqué adopté par les deux corporations.
Mais leurs tentatives ont échoué.
“Nous respectons le président de la République, mais
nous ne pouvons passer sous silence cet incident; aussi, avons-nous résolu
de marcher sur les ronces.
“Mon confrère Mohamed Baalbaki et moi-même, avons répondu
aux nombreux télégrammes et communications parvenus des syndicats
de la Presse arabe et internationale, en leur exprimant notre affection
et notre gratitude, tout en insistant sur le fait que le président
de la République a habitué les médias à leur
réserver un excellent traitement.”
Le président Hariri a tenté, vainement jusqu’ici, de
régler cette déplorable affaire, M. Hraoui répétant
qu’aucun conflit ne l’oppose à la Presse et qu’il s’agit d’un “incident
personnel” avec M. Sabra. C’est pourquoi, il ne se considère tenu
d’entreprendre aucune initiative pour le régler.
Aux dernières nouvelles, M. Hariri a effectué un contact
avec M. Abdel-Halim Khaddam, vice-président syrien, qu’il a mis
au courant des derniers développements de l’affaire. D’aucuns s’attendent
que Damas déploie des efforts en vue de dissiper le malaise entretenu
par la “gifle présidentielle”.