LA PRESSE SE SOLIDARISE AVEC “L’ORIENT-LE JOUR”
Aussitôt, MM. Mohamed Baalbaki et Melhem Karam, présidents
des Ordres de la Presse et des journalistes, ont dénoncé
avec vigueur les propos du ministre de l’Intérieur et, se solidarisant
avec “L’Orient-Le Jour”, lui ont demandé de se rétracter,
étant donné l’impact négatif de ses propos désobligeants
sur l’opinion publique.
Après s’être concertés, MM. Karam et Baalbaki
ont diffusé un communiqué dont voici l’essentiel: “Lors de
l’émission télévisée “Kalam An-Nass”, le vice-président
du Conseil et ministre de l’Intérieur, M. Michel Murr, a tenu des
propos faisant clairement allusion à notre confrère Issa
Goraieb, rédacteur en chef du quotidien “L’Orient-Le Jour”. Ce que
M. Murr a dit, constitue une offense personnelle à la dignité
et au niveau de notre confrère Issa Goraeib, un des grands journalistes
du pays.”
Après avoir rendu hommage à M. Goraieb, “plume connue
pour son patriotisme au-dessus de tout soupçon et sa haute éthique
professionnelle”, le communiqué fait état de la vague de
réprobation provoquée dans les cercles journalistiques par
les propos du ministre de l’Intérieur “qui n’est pas étranger
à la famille de la Presse”. Il a dit, en effet, que “c’est une plume
mesquine, mauvaise et connue comme telle, auteur d’articles portant atteinte
à la sécurité nationale et voulant détruire
son pays.”
PRÉCISIONS
Ensuite, le communiqué donne les précisions suivantes:
Premièrement: Nous dénonçons les propos du ministre
Murr qui s’est permis d’user de termes insultants, alors qu’il reproche
à notre confrère Issa d’avoir eu recours à ce genre
de propos; cela d’autant qu’il est bien connu que Goraieb n’a jamais pratiqué
ce style, tout au long de sa carrière.
Deuxièmement: Nous avons lu l’article (de M. Goraieb). Et si
le ministre en avait fait une lecture attentive, il se serait ravisé
et aurait considéré que ce dernier a été rédigé
de manière responsable, son auteur étant mû par son
attachement à la nation.
Troisièmement: Le recours (par M. Murr) à des propos
insultants à la télévision est impardonnable, car
ne s’inscrivant pas dans la tradition des rapports avec la presse.
Quatrièmement: S’il avait pris connaissance de l’ampleur du
soutien de l’opinion publique à l’écrit de Goraieb et de
la condamnation, par cette même opinion, de ce qui a été
dit du journaliste, le ministre se serait ravisé et aurait réalisé
à quel point il était dans l’erreur.
Cinquièmement: S’il s’était référé
au passé de Goraieb et à son éthique syndicale, il
aurait constaté combien de fois le journaliste s’est opposé
à ceux qui tentent de déstabiliser le Liban et de se faire
les agents d’exécution de l’ennemi israélien.
Sixièmement: Le ministre accuse Goraieb de monter l’opinion
publique et de la détourner des affaires nationales en la distrayant
avec des questions mineures. La réalité, pourtant, est que
certains dirigeants font assumer à la presse et à certains
journalistes des responsabilités, s’agissant de questions qu’ils
ont été impuissants à surmonter et dont ils se lavent
les mains en s’en déchargeant sur les autres.
QUI PORTE ATTEINTE À LA SÉCURITÉ?
“Ce n’est pas la presse qui porte préjudice à la sécurité
nationale et mine la confiance en l’économie, mais plutôt
le comportement erroné de certains responsables.
“Les Ordres de la Presse et des journalistes considèrent que
Goraieb fait partie des hommes constructifs qui aspirent à édifier
leur patrie, quels qu’en soient les sacrifices et œuvrent sincèrement
à cette fin. Tout en appréciant le soutien massif et l’énorme
élan de sympathie qui ont été manifestés à
la presse et à Goraieb dans cette affaire, nous demandons au ministre
de rectifier ses informations et de revenir sur les propos qu’il a tenus.
Nous invitons, de même, certains responsables à ne pas ergoter
sur leurs défaites et leurs signes d’impuissance en imputant les
causes à la presse: c’est bien cela, en effet, qui reviendrait à
détourner l’opinion publique des réalités.
“Les propos du ministre ont nui à ses rapports avec la presse
et avec l’opinion publique, d’autant que nous avons toujours été
objectifs dans nos relations avec M. Murr. Nous ne nous attendions nullement
de sa part à un tel comportement et à de telles accusations.
“En conclusion, les rapports avec la presse doivent être régis
par une éthique que nous demandons à M. Murr de respecter.
S’il avait procédé à un sondage d’opinion, il aurait
réalisé à quel point il s’est trompé dans ses
propos et à quel point l’opinion publique va dans la direction opposée.
La presse, à travers ses deux Ordres, proclame son entière
solidarité avec notre confrère Issa Goraieb. Elle apprécie
son comportement professionnel, syndical et national. Elle demande au ministre
Murr de revenir sur les accusations fausses et injustes lancées
contre un journaliste libre, noble, patriote et qui consti-tuent une diffamation.”