APRES LA "GIFLE PRESIDENTIELLE", LA DIATRIBE TELEVISEE DE MURR SUSCITE UNE VIVE REACTION MEDIATIQUE
LES ORDRES DE LA PRESSE ET DES JOURNALISTES SE SOLIDARISENT AVEC "L'ORIENT-LE JOUR" ET DEMANDENT AU MINISTRE DE L'INTERIEUR DE SE RETRACTER

La gifle administrée par le président de la République à notre confrère Hassan Sabra, rédacteur en chef d’“Ach-Chirah”, secrétaire de l’Ordre de la Presse, avait provoqué des remous dans les milieux journalistiques qui ne sont pas encore sur le point de s’apaiser, d’autant que l’auteur de l’offense refuse de présenter des excuses...

Moins d’un mois après cet affront et enhardi, sans doute, par le comportement, pour le moins inhabituel, du premier magistrat de la République, Michel Murr, vice-président du Conseil, ministre de l’Intérieur s’en est pris, à la faveur d’une interview télévisée, à un autre confrère - “L’Orient-Le Jour” - en la personne de M. Issa Goraieb, son rédacteur en chef, tenant à son encontre des propos diffamatoires. Et l’accusant de monter en épingle les incidents criminels des dernières semaines, “afin de détourner l’attention du récent démantèlement d’un réseau terroriste agissant pour le compte de l’ennemi israélien, ce qui porte atteinte à la sécurité et à l’économie nationales” (sic).

LA PRESSE SE SOLIDARISE AVEC “L’ORIENT-LE JOUR”
Aussitôt, MM. Mohamed Baalbaki et Melhem Karam, présidents des Ordres de la Presse et des journalistes, ont dénoncé avec vigueur les propos du ministre de l’Intérieur et, se solidarisant avec “L’Orient-Le Jour”, lui ont demandé de se rétracter, étant donné l’impact négatif de ses propos désobligeants sur l’opinion publique.
Après s’être concertés, MM.  Karam et Baalbaki  ont diffusé un communiqué dont voici l’essentiel: “Lors de l’émission télévisée “Kalam An-Nass”, le vice-président du Conseil et ministre de l’Intérieur, M. Michel Murr, a tenu des propos faisant clairement allusion à notre confrère Issa Goraieb, rédacteur en chef du quotidien “L’Orient-Le Jour”. Ce que M. Murr a dit, constitue une offense personnelle à la dignité et au niveau de notre confrère Issa Goraeib, un des grands journalistes du pays.”
Après avoir rendu hommage à M. Goraieb, “plume connue pour son patriotisme au-dessus de tout soupçon et sa haute éthique professionnelle”, le communiqué fait état de la vague de réprobation provoquée dans les cercles journalistiques par les propos du ministre de l’Intérieur “qui n’est pas étranger à la famille de la Presse”. Il a dit, en effet, que “c’est une plume mesquine, mauvaise et connue comme telle, auteur d’articles portant atteinte à la sécurité nationale et voulant détruire son pays.”

PRÉCISIONS
Ensuite, le communiqué donne les précisions suivantes:
Premièrement: Nous dénonçons les propos du ministre Murr qui s’est permis d’user de termes insultants, alors qu’il reproche à notre confrère Issa d’avoir eu recours à ce genre de propos; cela d’autant qu’il est bien connu que Goraieb n’a jamais pratiqué ce style, tout au long de sa carrière.
Deuxièmement: Nous avons lu l’article (de M. Goraieb). Et si le ministre en avait fait une lecture attentive, il se serait ravisé et aurait considéré que ce dernier a été rédigé de manière responsable, son auteur étant mû par son attachement à la nation.
Troisièmement: Le recours (par M. Murr) à des propos insultants à la télévision est impardonnable, car ne s’inscrivant pas dans la tradition des rapports avec la presse.
Quatrièmement: S’il avait pris connaissance de l’ampleur du soutien de l’opinion publique à l’écrit de Goraieb et de la condamnation, par cette même opinion, de ce qui a été dit du journaliste, le ministre se serait ravisé et aurait réalisé à quel point il était dans l’erreur.
Cinquièmement: S’il s’était référé au passé de Goraieb et à son éthique syndicale, il aurait constaté combien de fois le journaliste s’est opposé à ceux qui tentent de déstabiliser le Liban et de se faire les agents d’exécution de l’ennemi israélien.
Sixièmement: Le ministre accuse Goraieb de monter l’opinion publique et de la détourner des affaires nationales en la distrayant avec des questions mineures. La réalité, pourtant, est que certains dirigeants font assumer à la presse et à certains journalistes des responsabilités, s’agissant de questions qu’ils ont été impuissants à surmonter et dont ils se lavent les mains en s’en déchargeant sur les autres.

QUI PORTE ATTEINTE À LA SÉCURITÉ?
“Ce n’est pas la presse qui porte préjudice à la sécurité nationale et mine la confiance en l’économie, mais plutôt le comportement erroné de certains responsables.
“Les Ordres de la Presse et des journalistes considèrent que Goraieb fait partie des hommes constructifs qui aspirent à édifier leur patrie, quels qu’en soient les sacrifices et œuvrent sincèrement à cette fin. Tout en appréciant le soutien massif et l’énorme élan de sympathie qui ont été manifestés à la presse et à Goraieb dans cette affaire, nous demandons au ministre de rectifier ses informations et de revenir sur les propos qu’il a tenus. Nous invitons, de même, certains responsables à ne pas ergoter sur leurs défaites et leurs signes d’impuissance en imputant les causes à la presse: c’est bien cela, en effet, qui reviendrait à détourner l’opinion publique des réalités.
“Les propos du ministre ont nui à ses rapports avec la presse et avec l’opinion publique, d’autant que nous avons toujours été objectifs dans nos relations avec M. Murr. Nous ne nous attendions nullement de sa part à un tel comportement et à de telles accusations.
“En conclusion, les rapports avec la presse doivent être régis par une éthique que nous demandons à M. Murr de respecter. S’il avait procédé à un sondage d’opinion, il aurait réalisé à quel point il s’est trompé dans ses propos et à quel point l’opinion publique va dans la direction opposée. La presse, à travers ses deux Ordres, proclame son entière solidarité avec notre confrère Issa Goraieb. Elle apprécie son comportement professionnel, syndical et national. Elle demande au ministre Murr de revenir sur les accusations fausses et injustes lancées contre un journaliste libre, noble, patriote et qui consti-tuent une diffamation.” 


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