SUR FOND D'ECHEANCE PRESIDENTIELLE
L'ECHELLE DES SALAIRES PERTURBE LES RAPPORTS ENTRE KORAYTEM ET AIN EL-TINEH

La “guerre des sources” a marqué cette semaine. Les trois présidents les ont invoquées pour se renvoyer les charges. Ainsi, le président Hraoui s’est dit persuadé de la nécessité de convoquer la Chambre en session extraordinaire, en vue de faire ratifier le projet relatif à l’échelle des salaires dans le secteur public, tout en laissant entendre qu’il demanderait la révision constitutionnelle en cas de besoin et si cela était exigé par le mécanisme ayant été établi au sommet libano-syrien élargi de Lattaquieh.

Le chef de l’Etat n’a limité cette révision, au cas où elle était décidée, à aucun des paragraphes de l’article 49 de la Constitution.
Pendant ce temps, une controverse opposait les présidents Nabih Berri et Rafic Hariri autour de la session extraordinaire de l’Assemblée, avec en arrière-plan l’échéance présidentielle, partant du fait de savoir qui serait le “parrain” du futur régime.
Le chef du Législatif a insinué qu’il pourrait obtenir la convocation de la Chambre sur la base d’une pétition que signeraient soixante-cinq députés, soit la moitié plus un de l’effectif du parlement.
De plus, M. Berri a profité de la réélection du président de la CGTL - avec l’appui des syndicats se réclamant de “Amal” - pour se prévaloir d’un crédit au niveau populaire qui lui a fait répéter, après avoir gagné le “Bristol” pour féliciter M. Elias Abou-Rizk et le nouveau conseil de la centrale ouvrière: “Le pays n’est à la merci de personne.”
Le chef de la CGTL ayant proclamé sa disposition à descendre dans la rue pour protester contre une éventuelle majoration du prix de l’essence, le chef du gouvernement a déclaré: “Ils profèrent des menaces et fuient la responsabilité en ce qui concerne le financement de “l’échelle” à des fins politiques, leurs renseignements à ce propos étant erronés”.

LE RELÈVEMENT DU PRIX DE L’ESSENCE
D’après des sources fiables, les chefs de l’Etat et du Législatif seraient opposés au relèvement du prix de l’essence. En revanche, le président du Conseil lierait la convocation de l’Assemblée en session extraordinaire à la majoration du prix de la benzine, de même que les nouveaux prêts et protocoles financiers d’un montant global d’un milliard de dollars, pour pouvoir couvrir les dépenses que nécessitera l’application de la nouvelle échelle des salaires.
Par ailleurs, le Premier ministre voudrait faire participer la Chambre à la recherche des sources de financement, pour engager la responsabilité du gouvernement par rapport à l’échelle, ainsi que le laisse entendre M. Fouad Sanioura, ministre d’Etat aux Finances.
Mais le président Berri ne partage pas cette tendance et fait assumer au Cabinet seul la responsabilité du financement.
Cependant, le président Hariri réalise qu’il ne lui est pas possible d’empêcher la convocation de l’Assemblée en session extraordinaire, car il perdrait beaucoup de son crédit politique si cette convocation intervenait suite à une pétition parlementaire portant la signature de soixante-cinq députés. Sa position envers l’échéance présidentielle faiblirait considérablement, ce qui ne serait nullement dans son intérêt.

QU’EN EST-IL DE LA MÉDIATION SYRIENNE?
Cela dit, il y a lieu de faire état de deux points soulevés par le chef du Législatif lundi dernier, à l’issue d’une entrevue avec le chef de l’Etat au palais de Baabda: le premier concerne la convocation de l’Assemblée en vertu d’une pétition parlementaire, au cas où elle ne serait pas convoquée en vertu d’un décret présidentiel, pris en accord avec le chef du gouvernement.
Le second point a trait à la révision de l’article 49 de la Constitution, à l’initiative du parlement et non suite à un projet d’amendement que présenterait le président de la République.
Les observateurs constatent que M. Berri a soulevé ces deux points, lorsque s’est amenuisée la possibilité, pour le vice-président syrien, d’entreprendre une médiation en vue de raccommoder les deux hommes, proches et alliés de Damas.
Puis, certains milieux se perdent en conjectures sur les intentions des “décideurs” en ce qui concerne l’élection présidentielle et s’interrogent sur les véritables raisons dictant leur attitude attentiste, alors que précédemment ils n’hésitaient pas à intervenir pour rasséréner l’atmosphère...

RETOUR AU “PLAN DE REDRESSEMENT”
Pour en revenir à l’intention prêtée au gouvernement de majorer certaines taxes ou de relever le prix de l’essence, à l’effet d’accroître les recettes de manière à couvrir les dépenses que nécessitera la nouvelle échelle des salaires, les milieux proches du palais de Baabda rappellent que le “plan de redressement” prévoit des arrangements relatifs aux taxes douanières, à la taxe sur la mécanique, aux tarifs des communications téléphoniques et à d’autres rentrées du Trésor qui suffiraient à rassembler un montant pouvant couvrir les dépenses excédentaires découlant de l’échelle des salaires. Même sans les recettes provenant du cellulaire.
Quant à la majoration du prix de l’essence, les milieux qui s’y opposent mettent en garde contre une telle mesure, disant qu’il s’agit d’une “matière inflammable”, en ce sens que la majoration de son prix entraînerait une hausse des prix des produits de consommation courante.
La question que chacun se pose à présent est la suivante: l’échelle des salaires sera-t-elle ratifiée et, dans l’affirmative, quelles sont les sources de financement, étant entendu que le gouvernement ne les a pas encore trouvées et tient à associer la Chambre des députés à leur recherche!
 

LE CONSEIL DES MINISTRES OCCULTE LES DOSSIERS ÉPINEUX
On s’attendait, mercredi, à une séance houleuse du Conseil des ministres qui devait débattre de deux sujets épineux: le projet de l’échelle des salaires et la convocation de la Chambre en session extraordinaire. Mais ces deux sujets n’ont pas été discutés.
Le gouvernement s’est limité à examiner un certain nombre de points de son ordre du jour, notamment le déblocage de 118 milliards de livres pour exécuter des projets de développement et d’équipement dans la Békaa et au Akkar.
Il a, également, décidé de prolonger de six mois la mission de sécurité confiée à l’armée dans la Békaa, depuis les incidents qui y avaient été provoqués par cheikh Soubhi Toufayli. 
NADIM EL-HACHEM

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