Saturnale

Par MARY YAZBECK AZOURY  
CANDIDAT QUI VEUT! AGRÉÉ QUI PEUT!
Les députés libanais peuvent, désormais, élire le président... désigné ou agréé par qui de droit!
Tout Libanais qui remplit les conditions nécessaires peut être candidat à la première magistrature de l’Etat.
Mais il n’a pratiquement aucune chance s’il n’est pas “candidat agréé”.
Comme l’agrément d’un ambassadeur est indispensable à son accréditation, désormais, un accord non explicite, mais tacite autorise l’élection d’un Président, pourvu qu’il soit agréé...
Peu importe si les députés doivent choisir entre la peste et le choléra, de nos jours on pourrait ajouter, ou entre le cancer et le SIDA.
C’est une nouvelle démocratie née au Liban, qui donnera peut-être ses lettres de créance à un nouveau scrutin qu’on pourra étudier dans les livres de Sciences politiques!
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LE DÉCOR EST PLANTÉ! QU’EN EST-IL DU FACTEUR HUMAIN?
Depuis son avènement, le Premier ministre Rafic Hariri s’est occupé d’une manière fort somptueuse, de planter le décor de la cité de l’An 2000.
Il faut lui rendre cette justice: il a reconstruit la capitale, a restauré l’infrastructure... mais a appauvri les Libanais. Or, ce sont les hommes qui comptent!
1% de la population libanaise vit bien ou très bien. Le reste vit de la “débrouille”... qu’en est-il des acteurs?
Aujourd’hui, chacun utilise un système “D” qui lui convient. Jamais on n’aura vu dans la presse et dans les médias tant d’objets, de propriétés, d’actions de clubs à vendre ou à céder, souvent au quart de leur valeur.
Les salaires ne sont même pas de l’argent de poche. Les scolarités atteignent un niveau faramineux et loin de contenter le corps enseignant, ce dernier passant son temps à menacer ou à faire la grève.
On sait tous que le siècle de Louis XIV a nécessité, aussi, beaucoup de sacrifices. On sait que le panache se paye!
Mais les Libanais refusent de revenir à des temps révolus... Le décor somptueux est planté. M. Rafic Hariri et consorts doivent s’occuper maintenant du facteur humain, de la qualité de vie du citoyen. Il n’est pas permis dans un pays civilisé de voir le genre d’annonces tel: qu’ingénieur diplômé de l’ESIB ou de l’AUB donne leçons particulières...
Il n’est pas permis de voir des médecins devenir des prospecteurs médicaux...
Il n’est pas permis à un avocat de devenir courtier en n’importe quoi, employé n’importe comment.
S’il y a saturation dans certaines professions, qu’on impose des numerus clausus!

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“LA VALEUR ATTEND LE NOMBRE DES ANNÉES”
Fouad Nicolas Trad, jeune financier, a donné au Rotary Club de Beyrouth, une causerie fort intéressante.
Ce qu’il a dit...
En substance, ces quelques idées:
“La frustration des jeunes Libanais et la fuite des cerveaux, de plus en plus nombreuse, privent le Liban de sa richesse.
Le Liban est importateur de matière première et de biens de consommation, mais exportateur net d’hommes et de matière grise.
Personne ne s’arrache à son pays de gaieté de cœur. L’émigration est le déracinement obligé pour une nouvelle génération frustrée de ne pouvoir exercer son talent dans son pays.
(...) La nouvelle génération peut souhaiter une société où les aînés forment et préparent les jeunes; où les moins jeunes responsabilisent leurs collaborateurs, où la société canalise l’enthousiasme et le dynamisme des jeunes vers des projets collectifs...
(...) Nous vivons dans une société où les jeunes et les femmes n’ont pas encore leur place.
La nouvelle génération bute sur une société lente, sclérosée, où les débouchés sont limités et où le culte de l’argent est roi...”
Les jeunes au Liban luttent pour faire un stage gratuit. Ils ne reçoivent même pas une prime de déplacement et on considère qu’on leur fait un grand honneur en les autorisant à faire un stage...
Or, toutes les offres d’emploi au Liban mentionnent: expérience de deux, trois, voire cinq ou sept ans exigée. Comment peut-on avoir de l’expérience, si les adultes refusent d’initier les plus jeunes?
Nombreux d’entre eux partent à l’étranger et souvent, ils ne reviennent plus.

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LA HONTE D’UNE DÉMOCRATIE
Que la plus grande démocratie du monde donne le spectacle du “Monicagate” est une honte.
En cette année où l’on célèbre le cinquantenaire des Droits de l’Homme, comment peut-on admettre qu’une telle mascarade ait lieu?
En sus de l’atteinte à la vie privée, ce voyeurisme, ces détails scabreux, le tout incite à la thèse du complot. Bill Clinton a des avocats et les meilleurs avocats; il ne s’agit pas de le défendre, mais de constater qu’à l’aube du troisième millénaire, la vie privée d’une personne peut être jetée en pâture, grâce aux progrès de la technique, à des millions de spectateurs.
Qu’il ait menti sous serment, soit. Combien d’hommes politiques ont été infidèles à des traités signés?
Depuis quand les hommes politiques sont des exemples de vertu, de moralité et de sainteté?
Pendant que les guerres sévissent un peu partout dans le monde, pendant que des millions meurent de faim, pendant que le Liban-Sud brûle, de quoi s’occupe-t-on. Des exploits sexuels du Président des USA.
Entre le “Viagra” et le “Monicagate”, l’opinion mondiale a de quoi réfléchir!
Ah! si nous avions au Liban, un petit intermède de ce genre, cela nous changerait de la politique politicienne et des embarras financiers quotidiens.
Mais nous ne possédons pas, hélas! ce genre de diversions. Nous luttons trop pour la survie!
 
NOUVEAU-NÉ
PRÉNOMS: ALBERT MONACO!
C’est bien Albert Monaco et non Albert de Monaco...
Il s’agit d’un incident amusant survenu dans un grand hôpital d’Achrafieh. Elise et Charles K. viennent d’être les heureux parents d’un nouveau-né.
Arrive le moment de la déclaration de la naissance et de l’inscription à l’état-civil.
A ce moment, rien ne va plus. La maman, dans un élan d’enthousiasme et d’engouement pour le prince Albert de Monaco qui visite le Liban, décide de prénommer son fils Albert Monaco...
On lui explique qu’elle ne peut pas le faire. Elle argumente (car elle lit la Presse et regarde la TV) qu’il y a bien d’hommes de par le monde et au Liban appelés “De Gaulle”, “Chirac”, “Washington” et des femmes baptisées “Paris” et “France”. Elle ne voit pas pourquoi elle ne pourrait appeler son fils Albert Monaco...
Aux dernières nouvelles, rien n’avait encore été décidé.
A noter que chaque événement important au Liban donne naissance à une floraison de prénoms à la mode. Ainsi, l’an dernier, on a vu un boom de “Jacques” et de “Rafic”... Côté féminin, un nombre incalculable de Diana.


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