A cet effet, il multiplie les réunions de travail qu’il tient
avec le président du Conseil, auxquelles participent de hauts fonctionnaires.
Par la suite, le président élu confèrera avec le président
Hraoui qui lui fera un exposé exhaustif des problèmes à
résoudre et des dossiers à trancher, afin qu’il en soit informé
et puisse s’atteler à leur règlement dès son entrée
en fonction.
Les réunions de travail du président Lahoud se poursuivent,
quotidiennement, même en l’absence du Premier ministre qui s’est
rendu, dernièrement, à Damas; puis, au Caire.
Selon des sources fiables, M. Hariri n’a pas vu d’un bon œil le fait
pour le président Lahoud d’avoir convoqué les responsables
de certains organismes officiels, estimant qu’il n’a pas le droit de le
faire avant de prendre en charge ses fonctions constitutionnelles. Cependant,
il a apprécié le souci du président élu d’avoir
conféré la plupart du temps avec les hauts fonctionnaires,
en sa présence, étant donné que M. Hariri a une autorité
de tutelle au double plan politique et financier sur les organismes dont
les fonctionnaires assument la gestion.
PRIORITÉ AU VOLET FINANCIER
D’après des milieux renseignés, le président Lahoud
se sera fait une idée claire et nette de tous les dossiers au moment
de son investiture, au triple plan politique, économico-social et
financier. Il va sans dire qu’il attache beaucoup d’importance au volet
financier, en raison de son rapport avec le Trésor, le Général-Président
se préoccupant de préserver le pouvoir d’achat de la monnaie
nationale et la parité de la livre par rapport aux devises sur le
marché local des changes.
Cela dit, les observateurs s’attendent que le premier Cabinet du nouveau
régime soit à l’image de la situation, en ce sens que ses
membres seront versés dans les dossiers requérant des connaissances
et une spécialisation leur permettant de rechercher des solutions
aux problèmes dont ils auront la charge.
Les milieux politiques s’attendent que le président Lahoud instaure
une politique d’austérité qui s’étendrait dans la
mesure où la situation l’exigerait et jusqu’à parvenir à
assainir la situation financière et monétaire. Cette dernière
doit se stabiliser au point que la Banque centrale ne soit plus contrainte
de procéder à l’achat du dollar, afin d’empêcher des
perturbations de nature à ébranler l’économie nationale.
DIVERGENCES?
Les cercles proches de l’opposition croient savoir que des divergences
dans les points de vue se sont, d’ores et déjà, manifestées
entre les présidents Lahoud et Hariri portant, notamment, sur des
questions autour desquelles les deux hommes n’étaient pas toujours
d’accord dans le proche passé.
Ainsi, en ce qui concerne l’Ecole militaire et de combat, le président
élu tient à la rouvrir et à relancer le cycle de formation
de nouvelles promotions d’officiers destinés aux cadres de l’armée
et des FSI, d’autant qu’il n’y a pas eu de concours d’admission d’élèves-officiers
au cours des trois dernières années.
La coterie du président Lahoud laisse entendre que le nouveau
chef de l’Etat agira toujours sur la base de la transparence, ne laissant
dans l’ombre aucun différend ou malentendu qui l’opposerait au Premier
ministre, comme c’était le cas du temps de la troïka, de triste
mémoire. Dans ce cas, l’opinion publique jouera le rôle d’arbitre
entre les première et troisième présidences.
Le nouveau chef de l’Etat se soucie de se renseigner dans le détail
sur le déficit budgétaire, le gaspillage et la dette publique,
dont il tient à avoir une vue claire, afin de pouvoir élaborer
une politique adéquate, conscient du fait que l’accord de Taëf
n’a pas réduit les prérogatives de la présidence de
la République, contrairement à ce que d’aucuns prétendent.
ATTACHEMENT À LA DÉMOCRATIE ET
À LA LIBERTÉ
Sur un autre plan, le président élu donne l’assurance
qu’il ne sera pas porté atteinte, sous son mandat à la liberté
de presse, ni de près, ni de loin. Il sera traité avec les
médias et leurs représentants d’une façon qui réaffirmera
l’attachement du nouveau régime à la démocratie.
Le président Hariri se dit prêt à travailler dans
le même esprit, tout en émettant le souhait que d’autres -
entendre le président Berri - ne dérogent pas à la
ligne définie par Baabda.
Il lui a été signifié que le chef du Législatif
ne se préoccupe que de voir le nouveau régime réussir
là où le précédent a échoué.
Quant à l’activité du gouvernement qui fait de l’excès
de zèle, alors qu’il est en instance de départ et après
s’être contenté, ces derniers mois, d’expédier les
affaires courantes, elle se signale par l’adoption de deux projets d’une
importance capitale, qui ont été votés en un tournemain,
au risque de nécessiter plus tard leur révision à
cause d’éventuelles lacunes...
Il s’agit, d’abord, de la nouvelle échelle des salaires qui
suscite des remous parmi certaines catégories de fonctionnaires,
parce qu’on les en a exclus.
Ensuite, le projet de loi sur l’enrichissement illicite que le Conseil
des ministres devait examiner et adopter mercredi avant de le transmettre,
pour ratification, à la Chambre. Ce projet, de l’avis général,
aurait dû être promulgué depuis longtemps; en ce faisant,
on aurait pu freiner le gaspillage des fonds publics et les abus commis
à tous les échelons des institutions étatiques, provoquant
l’émergence d’une classe de “nouveaux riches”...
Fait à relever; la commission ad hoc à qui a été
confié le soin de mettre au point ce projet de loi, aurait bien
pu en achever l’élaboration en moins d’une semaine. Si elle a attendu
jusqu’à la fin du régime Hraoui, c’est sans doute pour y
inclure une clause spéciale, afin de priver le texte gouvernemental
de la rétroactivité...
Autre point à signaler: certains membres du Cabinet ont voulu
mêler le secteur public au secteur privé, tel d’inscrire les
journaux et leurs rentrées financières sur la liste des personnalités
et institutions tombant sous le coup de la loi... Mais le ministre de l’Information
s’y est opposé.
Quoi qu’il en soit, le nouveau régime s’il préfère
ne pas ouvrir des dossiers brûlants, profitera de la loi sur l’enrichissement
illicite pour mettre fin aux affaires louches et aux adjudications de gré
à gré, à l’effet de freiner la dilapidation des deniers
publics et, partant, combattre la corruption et les abus de toutes sortes.
En effet, cette loi constituera une épée de Damoclès
suspendue au-dessus de la tête de quiconque serait tenté de
violer les lois et règlements en vigueur pour s’enrichir.