LES PRESIDENTS DE LA REPUBLIQUE DE 1943 A NOS JOURS 
La place de l’Etoile est un véritable monument historique regorgeant d’événements et de souvenirs sur la vie politique du Liban contemporain.
Le 24 novembre, au lendemain de la célébration, le dimanche 22, du 55ème anniversaire de l’indépendance, le président élu, le général Emile Lahoud prêtera le serment constitutionnel, devant la Chambre et deviendra le onzième président de la République libanaise depuis 1943.
A cette occasion, nous avons effectué une brève rétrospective des noms des dix présidents qui l’ont précédé et les circonstances de leur élection.
Fait à relever: le président Sleiman Frangié (1970-1976), fut le dernier à être élu, place de l’Etoile et à y prêter le serment constitutionnel. Les douloureux événements qui ont ensanglanté le pays, ont forcé les parlementaires à choisir d’autres sièges provisoires. Seule, la prorogation, pour trois ans, du mandat du président Hraoui, a eu lieu dans cet hémicycle.
 
KHOURY (1943-1952)  
Originaire de Rechmaya (caza d’Aley - Mont-Liban), Béchara el-Khoury était avocat de profession, membre de la Chambre et président-fondateur du parti politique “Ad-Destour”. Il fut élu président de la République le 21 septembre 1943, par une Chambre fraîchement élue, formée de 55 députés qui tenait, ce jour-là, sa première séance. Elle commença par élire son président, Sabri Hamadé; puis, procéda à l’élection du président de la République; cheikh Béchara el-Khoury obtint 44 voix. 
Le siège de la présidence de la République était situé à Kantari. Le mandat de cheikh Béchara fut marqué par les journées historiques de novembre 1943, qui ont abouti à l’Indépendance du Liban. 
En 1949, l’Assemblée issue des fameuses législatives de mai 1947, décidait d’amender la Constitution pour renouveler le sexennat du président el-Khoury. Mais en septembre 1952, il fut contraint de démissionner sous la pression d’une grève générale de trois jours et de manifestations populaires organisées par le “Front National”, formé de Camille Chamoun, Kamal Joumblatt, Hamid Frangié et Emile Boustany. 
Avant de remettre sa lettre de démission le 13 septembre 1952, à 2 heures du matin, au président de la Chambre qui se trouvait au palais présidentiel d’Aley, cheikh Béchara confie le pouvoir à un triumvirat formé du général Fouad Chéhab, comme chef du gouvernement; MM. Nazem Akkari et Basile Trad. 
La légalité était sauve.
CAMILLE CHAMOUN (1952-1958) 
Né à Deir el-Kamar, le 3 avril 1900, il était avocat et parlementaire; avait occupé les fonctions de diplomate et de ministre, avant d’accéder à la première magistrature. Il est élu le 22 septembre 1952 par une Chambre issue des législatives de mars 1951, présidée par Ahmed el-Assaad, le nombre des sièges étant passé de 55 à 77. Sur les 76 suffrages exprimés, 74 se sont portés sur le nom de Camille Chamoun, après que M. Hamid Frangié se soit désisté en sa faveur. 
Le sexennat du président Chamoun fut marqué par la prospérité financière et économique, une activité débordante dans tous les secteurs de la vie nationale, une ouverture internationale et sur la région. Il a jeté les bases d’un Etat moderne basé sur les lois et les institutions. On lui doit la Cité sportive qui porte son nom, le projet du Litani, le palais de Justice... Avec son épouse Zalfa, il crée le festival de Baalbeck, une gloire et une fierté pour le pays. 
Les multiples courants politiques qui agitent la région, vont se répercuter, négativement, sur le Liban et provoquer les événements de 1958. Camille Chamoun qui envisage de rallier le “projet Eisenhower” et le “pacte de Bagdad”, se heurte à une opposition virulente de la part des courants nassériens et syriens, d’autant plus que l’union syro-égyptienne avait été scellée et risquait de s’étendre au Liban. 
Les insurgés réclament la démission de Camille Chamoun qui refuse de quitter le palais présidentiel de Kantari, entouré d’éléments armés hostiles avant la fin de son mandat, en septembre 58. 
 
FOUAD CHÉHAB (1958-1964) 
Fils de Ghazir, né en 1902, il fait carrière dans l’armée, qu’il commande dès les premières années de l’indépendance. 
Le général Fouad Chéhab est élu à la présidence de la République le 31 juillet 1958, 54 jours avant l’expiration du mandat de Camille Chamoun. Il est élu par la Chambre issue des législatives de 1957, présidée par Adel Osseirane dont les effectifs sont réduits à 66 parlementaires. Au premier tour du scrutin, Chéhab obtient 43 voix, contre 10 à M. Raymond Eddé. Il lui manquait une voix pour être élu. Il le fut au second tour du scrutin obtenant 48 voix contre 7 au “Amid”. 
Le siège de la présidence de la République passe de Kantari à Sarba. Le président Chéhab poursuit l’action entamée par Chamoun, en vue de créer de véritables institutions étatiques. A cet effet, il fait appel à la mission IRFED pour effectuer une étude globale sur la situation socio-économique. Il qualifiait les hommes politiques de “fromagistes” et eux dénonçaient les “abus” du Second Bureau. 
Chéhab a eu le mérite de s’opposer au renouvellement de son mandat, alors que ses partisans l’ont encouragé et poussé à accepter un deuxième sexennat. 
 
CHARLES HÉLOU (1964-1970) 
Originaire de Baabda, né en 1913, il étudie le droit, fait son stage, mais se tourne vers le journalisme qui le passionne. Il a déjà été député, ministre, ambassadeur au Vatican, lorsque son nom émerge aux présidentielles de 1964, alors que plusieurs chéhabistes espéraient prendre la succession du Général. 
Hélou était ministre de l’Education nationale lorsqu’il accède à la première magistrature. Il est élu le 18 août par la Chambre issue des législatives de mai 1964, présidée par Kamel el-Assaad, dont le nombre de sièges est désormais de 99. 
Homme de grande culture, francophone par excellence, le président Charles Hélou devra faire face durant son mandat à de multiples problèmes et difficultés dus à la conjoncture régionale, à la montée de la résistance palestinienne qui voulait obtenir une totale liberté d’action au Liban. Sous son sexennat, il y aura la guerre israélo-arabe de juin 67 et une crise ministérielle de sept mois, provoquée par M. Rachid Karamé qui a pris fin par la signature de l’accord du Caire de 1969, régissant les rapports entre l’Etat libanais et les fedayine. 
Le président Hélou installe la présidence dans une villa à Sin el-Fil et entame la construction du palais présidentiel de Baabda qu’il inaugure au milieu de son mandat. 
Il est intéressant de rappeler que le président Chamoun avait acheté cette colline de Baabda, face à Beyrouth, pour y édifier un palais présidentiel, à l’initiative de M. Nasr Harfouche, directeur général du ministère des Finances,  lui-même fils de Baabda. 
 
SLEIMAN FRANGIÉ (1970-1976) 
Originaire de Zghorta (Liban-Nord), né en 1909, Sleiman Frangié était membre de la Chambre, lors de son élection le 17 août 1970. Il fut élu à une voix de majorité face à son concurrent Elias Sarkis (candidat des Chéhabistes) “Une seule voix... la voix du peuple”. La Chambre comptait alors, 99 membres, était issue des législatives de mai 1968, qui avaient vu la victoire du “Helf” (alliance tripartite: PNL, Kataëb, B.N.) face au courant chéhabiste et alliés, le “Nahj”. Ce fut, sans doute, la bataille des présidentielles, la plus démocratique où il y a eu le moins d’interférence de courants extérieurs. Le président Frangié entame son mandat en formant un gouvernement de technocrates et en poursuivant en justice les officiers du Second Bureau (Chéhabistes). Les Palestiniens, forts de l’appui arabe, transforment leurs camps de réfugiés en citadelles militaires, érigent un Etat dans l’Etat et projettent le Liban, dès le 13 avril 1975, dans une guerre destructive. 
Le président Frangié réside au palais de Baabda. Mais au cours des derniers cinq mois de son mandat, il est amené à le quitter, sous la pression des obus pour s’installer à Kfour (Kesrouan). 
 
ELIAS SARKIS (1976-1982) 
Originaire de Chbaniyé (Mont-Liban), le président Elias Sarkis est élu le 8 mai 1976, président de la République libanaise à l’âge de 52 ans. Le vote a lieu à la villa Mansour (près du Tribunal militaire, secteur du Musée), siège provisoire du parlement depuis le déclenchement de la guerre. La Chambre (de 99 membres) est issue des législatives de 1972. Trente députés boycottent le scrutin, dont les députés du Front de lutte nationale (joumblattiste), à l’exception de M. Bahige Takieddine. Au premier tour du scrutin, il obtient 63 voix. Mais la majorité des deux-tiers étant exigée, il est  procédé à un second tour et il obtient 66 voix. Trois bulletins blancs seront retirés de l’urne. 
Le président Sarkis prend ses charges présidentielles le 23 septembre et s’installe au palais de Baabda. 
Ses efforts pour tenter de ramener la paix dans le pays demeurent vains et le Liban s’enlise dans l’engrenage de la guerre. 
 
BACHIR GEMAYEL (23 AOÛT 1982) 
Né à Bickfaya en novembre 1948, Bachir Gemayel est élu le 23 août 1982, président de la République, par le parlement issu des législatives de 1972 et qui, du fait de la guerre, renouvelait son mandat, d’année en année. Le vote a lieu à l’Ecole militaire de Fayadieh, faute de pouvoir arriver à la villa Mansour, (siège provisoire). La Chambre est présidée par Kamel el-Assaad. 
Ce fut une journée mémorable. Les députés viendront-ils à la séance? Les leaders mahométans de Beyrouth ayant appelé à son boycottage, le suspense dure jusqu’à 13h20, lorsque le quorum (62 députés) est atteint. Au premier tour du scrutin, Bachir obtient 58 voix. Il y aura trois bulletins blancs et un pour Raymond Eddé. La majorité des deux tiers étant exigée, on passe au second tour, où la majorité absolue (moitié plus une voix) est requise. Il obtient 57 voix et le président Kamel el-Assaad proclame son élection. 
Le 14 septembre, il est assassiné au Q.G. des Kataëb, à Beyrouth. 
 
AMINE GEMAYEL 1982-1988
Il fallait éviter tout vide constitutionnel dans le pays et assurer l’élection d’un président avant la fin du sexennat de Sarkis. L’unanimité se fait autour de Amine Gemayel. Avocat et parlementaire, fils de Bickfaya, il est élu le 21 septembre, à l’Ecole militaire de Fayadieh, au premier tour du scrutin par 77 voix et trois bulletins blancs. Il prête le serment constitutionnel le 23 septembre et s’installe au palais de Baabda.
Son mandat sera marqué par l’ouverture des négociations avec Israël et l’accord du 17 mai, ayant provoqué les événements sanglants de la montagne, la signature de l’accord tripartite... et les efforts qu’il déploie pour mettre fin à l’épreuve du Liban. Mais le destin continue à s’acharner sur le pays. Il accorde un intérêt spécifique à la culture, aux arts, à la documentation en créant la “Maison du Futur”.
L’élection d’un nouveau président n’ayant pu être assurée, il confie le pouvoir le 22 septembre 1988 (à 11h45), à un gouvernement transitoire présidé par le général Michel Aoun, commandant en chef de l’Armée.
 
RENÉ MOAWAD (DU 5 AU 22 NOVEMBRE 1989)
A l’issue des accords de Taëf, les députés élisent un nouveau président de la République. L’élection se déroule à l’aérodrome militaire de Kleiate, (Liban-Nord), à quelques kilomètres du poste-frontière libano-syrien de Arida.
Dans la nuit du vendredi au samedi 4 novembre, 27 députés de l’Ouest se dirigent avant la levée du jour, par voie de terre à  Kleiate. Ces députés qui ne sont plus pour la plupart jeunes, font tout un périple pour arriver au Akkar, passant par le Chouf, la plaine de la Békaa, la Syrie, via Homs.
Dimanche 5 novembre, deux avions atterrissent à l’aéroport de Kleiate à 14h30  et à 15h30, amenant les députés de l’Est politique qui se trouvaient encore au “Royal Monceau” à Paris. Saëb Salam arrive de Genève.
Le quorum requis est de 49 députés et il est largement atteint avec la présence de 59 parlementaires issus des élections de 1972.
A 16h20, le scrutin est ouvert avec trois candidats en lice: René Moawad, Georges Saadé et Elias Hraoui qui obtiennent, respectivement, au premier tour  35, 16 et 5 voix. Après des concertations, Saadé et Hraoui retirent leur candidature et René Moawad est élu par 52 voix; (six bulletins blancs sont retirés de  l’urne) et prête, aussitôt, le serment constitutionnel.
Né à Zghorta en 1925, avocat, parlementaire, plusieurs fois ministre, Moawad installe la présidence en sa résidence estivale à Ehden. Le 22 novembre, fête de l’Indépendance, il est lâchement assassiné à Beyrouth-Ouest. Il avait pour objectif de réconcilier les Libanais et réédifier l’Etat.
 
ELIAS HRAOUI (24 NOVEMBRE 1989 - 24 NOVEMBRE 1998)
A la suite de l’odieux attentat ayant coûté la vie au président Moawad, un scrutin présidentiel est décidé à la quatrième vitesse. L’élection a lieu, cette fois au Parc-Hotel de Chtaura le 24 novembre, autour de 18 heures. 53 députés, les mêmes depuis 72, sont présents. Au premier tour, Hraoui obtient 46 voix et Edmond Rizk, une voix; on dénombre cinq bulletins blancs. Au  deuxième tour, Hraoui obtient 47 voix et est élu.
Né à Zahlé, député de sa région, il a 63 ans au moment de son élection et installe, dans un premier temps, le siège de la présidence dans une caserne à Ablah; puis, à Beyrouth-Ouest. Après l’opération du 13 octobre 90, le palais de Baabda est libre mais entièrement détruit. Le président Hraoui décide de le reconstruire et s’y installe.
En 1995, son mandat est prorogé de trois ans. Ce 24 novembre 1998, 

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