TRAIN DE NOMINATIONS ET RÉACTIVATION   DES ORGANISMES DE CONTRÔLE
AVANT LA RÉFORME ADMINISTRATIVE

Le nouveau régime accélère ses pas, comme s’il était engagé dans une course avec l’heure, aux fins de compenser le temps perdu au cours des années précédentes. Il est vrai qu’il a évité de faire des promesses, mais sa détermination à traduire les paroles en actes s’est concrétisée au cours du premier Conseil des ministres tenu lundi après le vote de confiance.
 
 

Le général Michel Sleimane

Le général  Abdel-Karim Ibrahim

Le général  Jamil es-Sayed

Le général Edouard Mansour

Le général Nasser Rahbane

Michel Tabet

Mounzer el-Khatib

Fouad Heidamous
 

Aussi, a-t-il réussi dans le premier round de la bataille qu’il engage contre “les erreurs et les péchés” perpétrés sous les précédents régimes, plus précisément depuis 1992, date à laquelle a été formé le premier Cabinet haririen, suivi de deux autres.
Le gouvernement est résolu d’exécuter son plan de réforme par étapes, à l’effet de relancer le processus de la paix civile, de réactiver la reconstruction et de veiller au respect de la Constitution, des lois et règlements en vigueur.
Les nominations décidées lundi se distinguent par la clarté et la transparence. Elles ont été doublées de décisions visant à sauvegarder la liberté d’ex-pression et de manifestation, ainsi que l’avait promis le chef de l’Etat dans son discours d’investiture.
Plus importante encore est la décision relative à l’audiovi-suel, la loi régissant ce secteur devant faire l’objet d’une révision, de façon à la rendre équitable. Ainsi, le Pouvoir est déterminé à mettre un terme au “partage des parts” dans la répartition des licences aux stations radiophoniques et de télévision, celles-ci ayant été réservées, précédemment, à un nombre limité de bénéficiaires et de privilégiés.

LE DOSSIER DE LA RÉFORME
Après ce premier train de nominations qui ont été favorablement accueillies dans tous les milieux, le gou-vernement s’attèlera au dossier de la réforme admi-nistrative proprement dite, celle-ci ayant été précédée de la réactivation des organismes de contrôle.
A ce propos, il y a lieu de relever un fait significatif, celui qui a consisté pour le président Lahoud de renoncer au principe préservant certaines fonctions publiques-des postes-clés - à des titulaires de communautés déterminées.
Ainsi, dès le lendemain de son élection, le Général-Président a nommé un sunnite, le colonel Mohamed Hamdane, à la tête de la Garde républicaine, en remplacement du brigadier (maronite) Michel Harrouk.
Lundi, le brigadier Jamil es-Sayed (chiite) a été désigné directeur général de la Sûreté, poste précédemment occupé également par un maronite (M. Raymond Rouphaël). De même, le général Edouard Mansour (melkite), a été nommé directeur général de la Sûreté de l’Etat à la place du général Nabih Farhat (chiite).
Fait à signaler: en applica-tion de l’engagement fait dans son discours d’investiture, le chef de l’Etat tient aux critères de l’honnêteté, de la compé-tence et de la transparence dans le choix des nouveaux commis de la République, ce qui permet d’espérer en un Liban nouveau, ainsi que l’a confié le président Nabih Berri, en recevant lundi le conseil de l’Ordre des journalistes.

LES NOMINATIONS
Voici, par ailleurs, les nominations décidées par le Conseil des ministres:
Michel Tabet: Président du Conseil de discipline.
Fouad Heidamous: Président de l’Inspection centrale (dès la vacance du poste).
Mounzer el-Khatib: Président du Conseil de la fonction publique.
Le général Michel Sleimane: Commandant en chef de l’Armée.
Le général Abdel-Karim Ibrahim: Directeur général des forces de sécurité intérieure.
Le général Edouard Mansour: Directeur général de la Sûreté de l’Etat.
Le général Hassan Fawaz: Directeur général adjoint de la Sûreté de l’Etat.
Le général Jamil es-Sayed: Directeur général de la Sûreté générale.
Le général Nasser Rahbane: Chef de la gendarmerie.
Le colonel Raymond Azar: Directeur des renseignements militaires.
Par ailleurs, les nominations suivantes ont été décidées par décret ministériel:
Le brigadier Rafic Haddad: Chef d’état-major des FSI.
Le brigadier Georges Hajjar: Inspecteur général des FSI.
Le colonel Samir Sobeh: Commandant de la Police judiciaire.
Le colonel Walid Koleilate: Directeur de la Police de Beyrouth.
Le gouvernement a, ainsi examiné pendant trois heures, les moyens de concrétiser les orientations définies dans le discours d’investiture et dans la déclaration ministérielle.
Le président de la République avait ouvert la réunion en adressant ses vœux aux Libanais, à l’occasion des fêtes de fin d’année; aux Arabes et aux musulmans, en général, pour le début du mois de Ramadan; félicité aussi le président Salim Hoss et tous les ministres pour la confiance obtenue au parlement.

BERRI: LA RÉFORME, UNE OPÉRATION PERMANENTE
Quant au président Berri, il a dit que “la réforme est une opération permanente”, avant d’ajouter: “Un Liban nouveau doit naître, parce que l’occasion nous est donnée d’en jeter les fondements.”
De plus, il a appelé à réactiver les organismes de contrôle et à atténuer la vague du confessionnalisme, en attendant de pouvoir la dépasser dans le plus bref délai possible.
“L’étape la plus importante de la réforme, a dit encore le chef du Législatif, est celle que constitue la loi électorale.” Aussi, a-t-il préconisé l’élaboration d’une loi répondant autant aux aspirations des citoyens qu’aux impératifs de l’heure.
Par ailleurs, M. Berri a réfuté l’allégation du président Rafic Hariri quant aux raisons l’ayant amené à s’excuser de ne pouvoir former le premier Cabinet du nouveau régime. “Il s’agit moins, assure-t-il, d’une divergence autour de l’article 53 de la Constitution, que d’une différence radicale de mentalité entre les présidents Lahoud et Hariri.”
Le président de la Chambre s’est prononcé, d’autre part, sur le fait que “le châtiment devant être infligé à quiconque a perpétré des abus et des infractions, doit se baser sur des faits probants et un rapport des organismes de contrôle.”
En s’entretenant avec le conseil de l’Ordre des journalistes conduit par M. Melhem Karam, le président de l’Assemblée a dit: “La réforme administrative est liée à la réforme politique. Après l’élection du général Emile Lahoud, 70 à 80 pour cent de ceux qui ont commis des abus ont manifesté leur appréhension.”

IL N’Y A PAS EU COMPLOT CONTRE HARIRI
A propos de l’interprétation qui a été faite différemment de l’article 53 de la Constitution, texte que M. Hariri a invoqué pour se récuser, M. Berri a précisé que 83 députés ont désigné l’ancien chef du gouvernement, alors que 31 députés ont laissé au chef de l’Etat toute latitude de nommer le président du Conseil.
“Nul n’avait, alors, l’intention, d’évincer M. Hariri de la présidence du Conseil: ni le président Lahoud, ni les frères syriens, ni moi-même.”
Le président du Législatif a rappelé en détail les circonstances conformément auxquelles M. Hariri s’est exclu du club des présidentiables, disant que celui-ci a pris prétexte de la délégation de pouvoir au président Lahoud par certains députés, pour renoncer à la mission de former le nouveau gouvernement.
Et de conclure: “Je peux donc affirmer qu’il n’y a pas eu complot contre le président Hariri... D’aucuns disent qu’il y a eu un “coup d’Etat américain”. Quelle plaisanterie! Ainsi, le président Hoss est devenu pro-américain et le président Hariri anti-américain...”
M. Berri fait état, ensuite, du vote de confiance, disant que le président Hoss s’attendait à un plus grand nombre de voix, mais ceci ne l’a pas indisposé, partant du fait que “la confiance s’acquiert, en définitive, à travers les réalisations, non par les discours et les promesses, surtout si ces dernières n’étaient pas tenues.”
De toute manière, la con-fiance ne peut être considérée faible et ceux qui ne sont absentés parmi les membres de l’Assemblée - certains pour des raisons de force majeure ne peuvent ni ne doivent être considérés comme ayant rallié l’opposition.
Il importe de signaler que les “opposants” agiront selon des raisons différentes: les blocs haririen, joumblattiste et du “Hezbollah” auront des motivations non identiques et même contradictoires.
A ce propos, il sied de mentionner les prises de position proclamées par M. Hassan Nasrallah, secrétaire général du “Hezbollah” qui s’est formalisé de “l’offensive” américaine, se méfiant de la venue de personnalités res-ponsables en l’espace de quelques semaines, qui ont laissé entendre que les Etats-Unis se proposent de venir en aide au Liban pour aider son économie à retrouver sa vitesse de croisière.
M. Hariri peut suivre une “politique revancharde”, parce qu’il estime avoir été trahi et contraint de céder la place à son adversaire politi-que, le président Hoss. Mais il veillera à ne pas franchir une “ligne rouge” et pratiquera une opposition modérée pa-reille à celle de l’actuel Pre-mier ministre qui n’a jamais dépassé les bornes.
Cela dit, on s’attend que M. Hariri retourne de Paris après les fêtes de fin d’année, afin d’entamer une action politique qu’il marquera par une série d’iftars en sa résidence, comme il en avait pris l’habitude au cours des six dernières années. Ceci lui permettra de repren-dre contact avec ses anciens alliés et de regrouper sa base populaire.
Quant à M. Walid Joumblatt, il persévèrera, sans doute, dans sa tactique habituelle et coopérera, naturellement, avec le bloc haririen, ainsi qu’il l’a laissé entendre dans ses dernières déclarations.

NADIM El-HACHEM

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