Cependant, ce qui a retenu l’attention, c’est l’attaque déclenchée
par le président Omar Karamé contre le président Hoss,
son ancien collègue de la “Rencontre parlementaire nationale”, pour
avoir négligé Tripoli dans les récentes nominations
administratives, tardé à régler le problème
grave que constitue la pollution de l’eau potable dans cette ville et transformé
une partie de la foire internationale Rachid Karamé en stade, tout
en réitérant son soutien au président Lahoud.
“Que Dieu lui pardonne; je n’en dirai pas plus”, a déclaré
le Premier ministre qui s’apprêtait à se rendre à Ryad,
dans le cadre de sa tournée arabe.
Les critiques les plus acerbes ont été formulées
par M. Walid Joumblatt, leader du PSP, au cours d’une conférence
qu’il a donnée dans le cadre de l’exposition du livre arabe, organisée
par la fondation Hariri à Saïda. Ainsi, il a pris violemment
à partie le président Nabih Berri; M. Michel Murr, ministre
de l’Intérieur et certains de ses adversaires druzes.
M. Joumblatt a dénoncé les dernières nominations
et le mouvement diplomatique “qui, dit-il, ont perturbé l’équilibre
communautaire”, tout en qualifiant d’inaptes, certains fonctionnaires ne
répondant pas aux critères de la compétence, de la
probité et de la transparence.
Le chef du PSP n’a pas manqué, non plus, de critiquer le chef
du Législatif, disant que “le concept des rouleaux compresseurs
en démocratie supprime la diversité politique, culturelle
et la liberté d’opinion”, manifestant son étonnement de ce
que “la Chambre des députés se charge de dégager la
voie du Cabinet des mines qui entravent sa marche.”
Puis, il a appelé au renforcement des institutions unificatrices
druzes, “face aux groupes dissidents”, avant de s’élever contre
“la fusion de la communauté druze dans la vague numérique,
culturelle et de l’identité.”
Parallèlement à la cabale dont le gouvernement est la
cible de la part de ses détracteurs, les observateurs ont relevé
la chaleur de l’accueil qui a été réservé au
président Hoss lors de sa visite en Arabie séoudite, où
il s’est rendu à bord d’un avion mis à sa disposition par
le roi Fahd.
Ceci porte à penser que l’Arabie séoudite ne modifie
pas sa position envers le Liban avec le changement de gouvernement ou de
personnes.
Le royaume agit sur la base de constantes dont il ne dévie pas.
Ce que d’aucuns avaient craint après l’éviction de M. Rafic
Hariri de la présidence du Conseil, étant donné les
relations qu’il entretient avec les responsables séoudiens. Ceux-ci
ont vanté l’action du président Emile Lahoud et sa détermination
à édifier l’Etat des lois et des institutions sur base de
la transparence, ce qui a pour conséquence de raffermir la confiance
des Etats arabes et étrangers dans son régime.
Pour en revenir à la séance parlementaire de mercredi,
le gouvernement a pris note des remarques et critiques émises par
les membres de l’Assemblée, à l’effet de rectifier sa gestion
de la chose publique, qu’il s’agisse de la réforme administrative
ou du dossier économico-financier qui constitue un lourd legs hérité
de l’ancien régime.
Une source gouvernementale s’en prend à M. Hariri, disant que
l’ancien président du Conseil fait assumer au “Cabinet des 16” la
responsabilité du déficit budgétaire et du gonflement
de la dette publique, alors que ses gouvernements successifs avaient fourni
des chiffres peu exacts quant à la situation financière et
l’état du Trésor.
Aussi, le président Hoss est-il résolu à élaborer
un projet de budget à la fois “réaliste et transparent”,
quelles que seront les réactions qu’il suscitera dans les milieux
parlementaires. Et ce, conformément aux lignes définies par
le chef de l’Etat dans son discours d’investiture.
Le projet de budget 99 sera mis au point à la fin du mois courant,
les différents départements ministériels devant communiquer,
incessamment, leurs prévisions budgétaires au ministère
des Finances, en se conformant à la consigne leur recommandant de
réduire au maximum les dépenses. Celles-ci ont atteint des
chiffres astronomiques dans le projet de budget établi par le précédent
gouvernement.
Par ailleurs, les milieux politiques et parlementaires s’interrogent
sur les raisons ayant amené le président Hosni Moubarak à
inviter M. Hariri au Caire où ce dernier a conféré
avec le Premier ministre égyptien, M. Kamal Al-Janzouri et Esmat
Abdel-Majid, secrétaire général de la Ligue arabe.
Les milieux mentionnés sont d’autant surpris, que M. Hariri n’assume
plus aucune charge officielle au Liban. Au contraire, il met des bâtons
dans les roues du char gouvernemental et du régime, tout en prétendant
vouloir soutenir le président Lahoud...
De plus, il ne cesse de soutenir que le Cabinet Hoss a échoué
au plan de la réforme administrative, faisant endosser la responsabilité
de cet échec au président Nabih Berri, comme celui-ci l’avait
fait au temps où M. Hariri avait entrepris de réformer les
services étatiques.
Quoi qu’il en soit, le gouvernement est déterminé à
aller de l’avant et à exécuter son plan de travail, d’autant
qu’il est appelé à se maintenir au pouvoir jusqu’aux prochaines
élections législatives, que le Cabinet Hoss serait chargé
de superviser, après avoir élaboré une nouvelle loi
électorale.
Cependant, les observateurs s’attendent que la cabale contre le gouvernement
s’intensifie dès que la réforme électorale sera mise
sur le tapis, chaque partie devant tenter d’imposer son point de vue et
ses conditions pour y souscrire. C’est, semble-t-il, la raison qui incite
M. Walid Joumblatt à partir en guerre contre le Cabinet et le régime,
dans l’espoir de les amener à adopter la petite circonscription.
La tendance serait, dit-on, en faveur d’une nouvelle loi électorale
acceptable par toutes les parties.
Quant à la réforme administrative, elle semble devoir
atteindre sa finalité vers la mi-mai, la réforme électorale
devant intervenir dans le courant de l’été. A moins qu’un
consensus national intervienne à son propos dans le courant de mars
prochain.
En ce qui concerne les prétendues divergences qui opposeraient
le président Hoss à certains membres du Cabinet, notamment
le ministre de l’Intérieur, le Sérail les a catégoriquement
démenties, en assurant qu’une parfaite homogénéité
caractérise le “Cabinet des 16”. Aussi, l’assai-nissement de l’administration
se poursuivra-t-il sur base des rapports du ministre de la Réforme
et il n’est nullement question de remanier l’équipe ministérielle
ou de l’élargir.
Quant à la coopération du régime avec le chef
du Législatif, elle est appelée à durer, étant
donné l’amitié qui lie le président Berri au président
Lahoud, les jours à venir devant montrer que l’alliance entre les
deux hommes est inébranlable.