LE BUDGET ET LES SCANDALES FINANCIERS
AU CENTRE DES PRÉOCCUPATIONS OFFICIELLES
Entre-temps, le Pouvoir s’active au double plan intérieur et
extérieur, à l’effet de jeter les fondements du Liban - Etat
et institutions - tout en dessinant l’image susceptible de gagner la confiance
des frères et des amis; cette confiance que certains oiseaux de
mauvais augure ont tenté de compromettre, dès l’accession
du général Lahoud à la magistrature suprême
et à la tête du “régime du changement”.
Aussi, dans cette étape, aucune voix ne saurait-elle s’élever
au-dessus de celle de la Justice, au moment où les responsables
cherchent tous les moyens de réduire le déficit hérité,
sans surcharger le contribuable de nouveaux impôts et surtaxes sous
lesquels il ployait précédemment.
L’action entreprise par la Justice dans tous les recoins de l’administration
étatique, a eu pour conséquence de régulariser le
travail dans les services officiels et, surtout, de hâter l’accomplissement
des formalités.
Il faut s’attendre que cet état de choses perdure jusqu’à
l’ouverture du dossier des fonctions subalternes qui sont, généralement,
plus exposées que les autres et tentées par l’appât
du gain rapide et facile.
Jusqu’à ce que soit démêlé l’écheveau
des scandales tels ceux des résidus pétroliers et des antiquités
notamment, les responsables s’attendent à mettre la main sur d’autres
pots aux roses et mafias des malversations, ce qui permettra de restituer
au Trésor les fonds qui lui reviennent.
Alors que certains députés minimisent l’importance des
poursuites engagées dans l’affaire des antiquités, des sources
ministérielles affirment qu’il s’agit moins de vestiges archéologiques,
que de bandes d’extorqueurs.
En ce qui a trait au projet de budget 99, il accapare les gouvernants,
à tel point que la réforme a subi un temps d’arrêt,
motivé par la mise au point de son rapport par le ministre de la
Réforme. D’autant que le “Cabinet des 16” est pressé de soumettre
à la Chambre le projet de budget pour l’année courante sans
plus de retard.
Puis, le Pouvoir est tenu de réduire le déficit budgétaire,
ne serait-ce que dans un délai déterminé échelonné
sur plusieurs annuités, en vertu d’un plan quinquennal, notamment.
Car si ce déficit se maintenait au niveau où il se situait
sous le précédent régime, la dimension de la confiance
dont jouit notre pays dans les instances internationales pourrait s’en
ressentir.
Il s’agit donc pour le gouvernement d’assurer les fonds nécessaires
à la couverture des dépenses publiques, en ne surchargeant
pas le citoyen de surtaxes qu’il n’est plus en mesure de supporter.
On constate que le président Emile Lahoud attache beaucoup d’importance
à cette affaire, se préoccupant surtout des citoyens à
revenu limité. Le chef de l’Etat estime que les nantis devraient
supporter une part substantielle du déficit, visant ainsi à
rétrécir la disparité sociale le plus possible.
Quant au président Nabih Berri, il a émis, indirectement,
un avis défavorable au relèvement du prix de l’essence, niant
que ce carburant soit l’unique ou la principale source de revenus pour
le Trésor. “Cette mesure, dit-il, devrait constituer l’ultime recours.”
Le chef du Législatif soulève, en revanche, le dossier
du cellulaire, considérant que le téléphone portable
peut assurer à l’Etat d’importantes recettes, ainsi qu’il l’a déclaré
au président de l’Ordre des journalistes (voir ailleurs leur rencontre).
Quant au président Salim Hoss, il fait assumer au précédent
Cabinet la responsabilité du retard mis à élaborer
le projet de budget 99 et, aussi, du déficit budgétaire,
alors que des sommes considérables avaient été prises
hors budget, ce qui a alourdi davantage la dette publique.
Le Premier ministre a mis les choses au point en Conseil des ministres,
pour répliquer à certains opposants qui font grief au Cabinet
de commettre des erreurs dont l’ancienne équipe ministérielle
assume la responsabilité et, en tout premier lieu, le projet de
budget. Cette équipe aurait dû, normalement, mettre au point
le projet en question au début de l’automne 98, pour pouvoir le
déposer sur le bureau de l’Assemblée dans le délai
constitutionnel.
Tout porte à penser que le président du Conseil prépare
les esprits à de nouvelles surtaxes prévues dans le cadre
de la loi de finances, afin de réduire le déficit budgétaire
à 40 pour cent et même en-deçà de ce chiffre.
En effet, M. Hoss laisse entendre que le Cabinet pourrait être
amené à prendre des “décisions impopulaires”, afin
d’accroître les recettes du Trésor.
En ce qui a trait aux enquêtes judiciaires, le gouvernement laisse
à la Justice toute latitude de les poursuivre, en s’interdisant
toute ingérence dans des dossiers aussi brûlants.
Il y a lieu de signaler, par ailleurs, que deux dossiers ayant leur
importance - ceux de l’information et de la réforme administrative
- semblent devoir être gelés jusqu’à la ratification
du projet de budget 99; le premier, à la lumière de nouvelles
idées dont le ministre de l’Information se garde bien de dévoiler.
Cela dit, il semble que les résultats des élections pour
le renouvellement du conseil d’administration de la Caisse nationale de
Sécurité sociale (CNSS) aient provoqué une crise sourde
au niveau des responsables. A ce sujet, on n’écarte pas la démission
collective des représentants du patronat au sein de ladite Caisse.
La crise a été suscitée par le fait pour les représentants
des organismes officiels d’avoir voté en faveur du représentant
de la CGTL, M. Elias Abou-Rizk, alors que la tendance gouvernementale était
en faveur du Dr Maurice Abou-Nader.
On prête aux hautes autorités l’intention de se pencher
sur cette affaire le plus rapidement possible, afin de sortir la CNSS de
la situation peu enviable dans laquelle elle se trouve.