Une
innovation est à signaler dans le monde diplomatique: les tournées,
de plus en plus fréquentes, que les ambassadeurs - ceux des grandes
puissances, notamment - effectuent dans les localités de province,
chacun plaidant pour sa paroisse. Naturellement, ils font beaucoup de promesses
et s’ingénient à ne pas les tenir. “Les grands diseurs, dit
le proverbe, ne sont pas nécessairement les grands faiseurs.”
“Les grands diseurs ne sont pas, nécessairement, les grands faiseurs”.
Ce proverbe nous est revenu à l’esprit, en écoutant pérorer
les ambassadeurs de “pays amis”, au cours de tournées qu’ils effectuent,
de plus en plus fréquemment, dans les localités de province
avec d’autant d’empressement, qu’on les reçoit à bras ouverts
et les entoure d’égards, les Libanais étant hospitaliers
de nature.
Ces diplomates semblent se faire la concurrence, à l’effet de
gagner la sympathie et le soutien de leurs hôtes - nous pensons,
surtout, à ceux se réclament de deux cultures différentes
(francophone ou anglo-saxonne) et se préoccupent de grossir le rang
des personnes susceptibles de rallier leur “paroisse” et de parler leur
dialecte!
Aussi, au cours de leurs rencontres et, spécialement, des banquets
offerts en leur honneur où ils se montrent prolixes après
avoir ingurgité quelque boisson émoustillante qui délie
les langues, tiennent-ils des propos empreints de sentimentalisme sans
manquer de cordialité!
Tous font état du souci de leurs gouvernements “de sauvegarder
l’indépendance du Liban, de sa souverainté et de son intégrité
territoriale”, tout en sachant que leurs auditeurs ne prennent pas leurs
paroles pour de l’argent comptant...
Mais, on ne le sait que trop, ceux qui promettent le plus sont, ordinairement,
ceux qui font le moins.
Nous avons présentes à la mémoire, les belles
tirades de l’ambassadeur d’une grande puissance, débitées
lors d’une visite à une localité nordiste de la montagne,
effectuée au cours du dernier week-end. “A chaque visite, a dit
ce diplomate, je découvre que les relations liant le Liban à
mon pays sont profondes et très enracinées tant au niveau
gouvernemental que populaire.”
Et à propos du Liban-Sud: “Mon gouvernement s’emploie à
empêcher l’escalade et à atténuer la tension, par le
canal du groupe de surveillance de la trêve (issu de l’arrangement
d’avril 96) et d’autres canaux diplomatiques... Car il considère
que la pacification de la région frontalière peut avoir des
retombées positives sur l’ensemble du Proche-Orient et, partant,
favoriser l’instauration de la paix.”
Naturellement, la ritournelle habituelle tient lieu de conclusion:
“Mon gouverne-ment réitère son appel à toutes les
parties, en leur demandant instamment de faire montre de retenue, afin
de ne pas compromettre les efforts des conciliateurs”...
Mais comme on s’en doute, cette kyrielle de mots mielleux et ce verbiage,
ne trompent personne, à force d’avoir été répétés
et entendus, à propos desquels s’applique le dicton populaire: “On
entend le moulin fonctionner, sans jamais voir de la farine!” |