Le fait pour
le Conseil des ministres d’avoir transmis au Parquet général
le rapport de la Cour des comptes, a suscité des réactions
virulentes, d’autant plus compréhensibles qu’un ancien président
du Conseil et trois de ses anciens ministres et collaborateurs y sont impliqués.
L’un de ces derniers a qualifié ledit rapport de “poisson d’avril”
- pour avoir été rendu public le premier de ce mois. Mais
il devait changer de ton, par la suite et proclamer sa confiance dans l’intégrité
et l’indépendance de la magistrature...
Le rapport établi par la Cour des comptes à la demande
du chef du gouvernement, fait l’ob-jet de commentaires d’autant plus enflammés
et contradic-toires, qu’il met en cause un ancien président du Conseil
et trois de ses ministres, en l’occurrence MM. Rafic Hariri, Fouad Sanioura,
Bassem Sabeh et M. Demerdjian.
Ceux-ci sont accusés d’avoir violé les termes de la Constitu-tion
et de la comptabilité publi-que, en ayant engagé des dépen-ses
sans assurer les crédits des-tinés à les couvrir.
Et, aussi, d’avoir utilisé les fonds munici-paux à des fins
autres que celles auxquelles ils étaient destinés.
Certains ont qualifié ce fait comme étant “plus important
qu’une révolution, à condition d’être poursuivi jusqu’à
son terme” et “une innovation n’ayant pas eu sa pareille depuis l’avène-ment
de l’indépendance en 1943”.
L’un des ministres dont le nom est mentionné dans le rapport
a dit qu’il s’agissait d’un “poisson d’avril”, le document ayant été
rendu public le premier de ce mois. De plus, il s’est de-mandé “pourquoi
il n’avait pas été publié avant aujourd’hui”.
Le Premier ministre a déclaré que le rapport n’avait
aucun caractère politique, le gouver-nement l’ayant transmis aux
autorités judiciaires qualifiées, après en avoir pris
connaissance et l’avoir soumis, pour avis, au Conseil des ministres.
Il importe de préciser que les membres de la Cour des comptes
ayant rédigé le rapport men-tionné, avaient été
nommés par le gouvernement ayant précédé le
“Cabinet des 16”. On ne peut donc les taxer de partialité...
Puis, cette haute juridiction avait été empêchée
de s’acquitter de sa tâche et il n’était pas tenu compte de
ses avertissements ou mises en garde contre les entorses qui étaient
commises aux lois en vigueur. Mais elle a conservé ses rapports
pour prouver, comme elle le fait actuellement, qu’elle n’avait pas manqué
à son devoir...
Le chef du gouvernement a donné des instructions à la
Cour pour exposer les infractions enregistrées au cours des années
précédentes, suite à des plaintes présentées
par des citoyens ayant subi quelque préjudice, en raison de la mauvaise
gestion des fonds publics.
Cela dit, il s’agit à présent de dégager une triple
responsabilité: politique, relevant de la Chambre des députés
et, dans ce cas, il faudra lever l’immunité couvrant trois de ses
membres impliqués dans le rapport; pénale, la décision
étant ici du ressort du Parquet général ou financière,
ce qui doit inciter l’Etat à intenter aux prévenus une action
civile et à exiger d’eux la restitution des fonds dilapidés
ou dépensés d’une manière illégale.
Naturellement, la position du Pouvoir n’est pas aisée, car il
se trouve devant l’alternative sui-vante: poursuivre l’affaire jus-qu’au
bout et ne pas fermer le dossier y relatif avant que la vérité
éclate au grand jour, les coupables devant recevoir le châtiment
en proportion avec leurs forfaits; ou se prêter, pour quelque raison
d’Etat, à un compromis et, dans ce cas, sa crédibilité
serait sérieusement compromise. |