JUBILÉ DE L’OTAN SUR CRISE DE KOSOVO
ET MÉDIATION RUSSE COURT-CIRCUITÉE



Les leaders de l’OTAN en compagnie
du président Clinton pour la photo-souvenir.
Les dix-neuf pays de l’organisation de l’Atlantique Nord se sont réunis le week-end dernier à Washington pour célébrer cet anniversaire.

Deux réunions sur le Kosovo étaient prévues, mais les festivités ont été sérieusement revues à la baisse.
Les sommets de l’OTAN vont effectivement se superposer à Washington d’une façon surréaliste. Le premier sera la célébration, contre vents et marées, du cinquantième anniversaire du traité de l’Atlantique Nord. Les rues de la ville étaient pavoisées, la chaussée remise à neuf et on a posé des moquettes au km2 dans les salles de presse. Pendant ce temps, le centre de la ville a été neutralisé pour assurer la sécurité de plus de quarante cortèges d’officiels circulant, simultanément, dans un périmètre de quelques km2. Ce côté festif a été réduit à sa plus simple expression à l’insistance des Européens peu soucieux de se voir apparaître à la TV en tenue de gala entre deux images de bombardements et de réfugiés. Les réceptions ont eu lieu en tenue de ville et la commémoration du cinquantenaire rondement expédiée en deux brèves cérémonies. La parade aérienne au-dessus de Washington a été annulée, les avions de l’OTAN étant occupés ailleurs!
Toute l’attention en fait sera fixée sur le deuxième sommet, celui dans lequel discrètement les dirigeants des dix-neuf pays de l’Alliance profiteront de leur présence simultanée à Washington pour essayer de faire progresser la crise du Kosovo. A la veille, d’ailleurs de ces cérémonies, M. Javier Solana, a affiché sa fermeté: “Il n’y a aucun doute que l’OTAN triomphera. Nous en avons la volonté et les moyens: Pas question donc dans l’immédiat de suspendre les frappes; l’heure serait plutôt à leur renforcement.”

Le président Clinton à la tribune.

Le secrétaire général Javier Solana.

Leaders des pays frontaliers du Kosovo,
le troisième jour du sommet de l’OTAN: 
(G.D.) le président bulgare Stoyanov, 
le ministre des Affaires étrangères 
bosniaque Prlic et le président albanais Meidani.

Au troisième jour du sommet de l’OTAN, 
le président Clinton s’entretenant avec Tony Blair.

CÔTÉ DIPLOMATIQUE
C’est la confusion à Moscou autour de la médiation menée par Victor Tchernomyrdine en Yougoslavie. L’émissaire russe a affirmé que sous sa pression, les Yougoslaves avaient accepté une présence militaire étrangère au Kosovo. Mais, depuis, elle a été démentie par les diplomates russes et, surtout, par les autorités yougoslaves elles-mêmes.
L’émissaire russe a beau parler de percée dans le conflit et d’importants compromis, les membres de l’Alliance se montrent, quant à eux, plus que circonspects.


Le sommet de l’OTAN: réunion plénière.


Le président Chirac baisant 
la main de Hillary Clinton.

La rencontre Tchernomyrdine-Milosevic.

Sans doute, parce que le président Milosevic n’en est pas à sa première ruse. Sans doute, aussi, parce que le document élaboré en commun par Victor Tchernomyrdine et Slobodan Milosevic a été présenté dans la confusion. De toute façon, il est largement en deçà des exigences de l’OTAN. Ainsi, Milosevic semble accepter le principe d’une présence étrangère au Kosovo sous l’égide de l’ONU, confortée par une large participation russe. Mais le président yougoslave refuse, catégoriquement, l’implication de forces militaires et paraît même vouloir évincer de tout projet civil des pays actuellement engagés contre Belgrade. Il l’a fermement répété dans une interview télévisée. Ensuite, Milosevic pose une condition, l’arrêt des frappes, à la reprise des négociations sur l’autonomie politique du Kosovo et il y a de fortes chances pour qu’il en exclut toute médiation extérieure. En fait, Victor Tchernomyrdine prétend à tort que la balle est, désormais, dans le camp des Occidentaux. Milosevic ne s’est toujours pas plié aux cinq conditions sine qua non, posées par la communauté internationale de Rambouillet, prétendant que celle-ci détruit l’infrastructure serbe et est sur le point de décréter un embargo pétrolier sur son pays, ce qui a l’air de se préciser!
 
LES CAMPS DE LA MISÈRE

Autre volet de cette crise: le sort des réfugiés. La situation se dégrade à côté. D’abord, dans le nord de l’Albanie: plus de 100.000 réfugiés sont entassés dans les camps et le HCR s’ingénie à désengorger la ville. 8000 d’entre eux ont été déjà évacués et le HCR espère évacuer la moitié du restant. Tension, également, en Macédoine. La population se montre de plus en plus réticente à accueillir les Albanais du Kosovo et les Macédoniens d’origine serbe dénoncent les bombardements de leur pays d’origine.

D’autant plus qu’après plus d’un mois après l’intervention de l’OTAN, la majorité des Macédoniens, slaves orthodoxes affichent clairement leur hostilité. “Parce que nous sommes sans nouvelles de nos familles, restées sous les bombes au Kosovo; parce que l’afflux des réfugiés va déstabiliser notre fragile économie à présent et plus tard, les rapports entre les différentes communautés. En cas d’intervention terrestre, c’est-à-dire de guerre totale, le conflit se propagera chez nous, comme une traînée de poudre...” Plus radicaux, les Serbes de Macédoine, 43.000, se considèrent assiégés, comme dans un pays occupé. Des jets de pierre, un véhicule de l’OTAN incendié et, surtout, bataille larvée contre l’extension des réfugiés kosovars...


Un vieillard serbe résigné, dans un 
camp de réfugiés à l’avenir incertain.

“Sans nous en demander la permission, l’OTAN et le gouvernement nous ont pris nos terres pour les donner aux Albanais”, a déclaré le maire de la Commune.
“Il y a quelques jours, les Serbes en colère détruisaient des tentes censées recueillir des réfugiés”. Comme on le voit, la menace d’explosion de la communauté serbe doit être prise au sérieux. Non loin de là, la propagande est la même qu’à Belgrade. A ce stade, ce ne sont que des menaces, mais les Serbes promettent de se défendre contre “l’ennemi albanais” et de ne jamais rendre le Kosovo.
Par ailleurs, un groupe de 300 Kosovars venant de Macédoine, est arrivé à Paris, sur cinq avions de transport Transall ayant atterri à l’aéroport de Roissy. En fin de journée, dimanche dernier, 346 autres Kosovars étaient arrivés à Lyon. 

Par CHARLES E. HANANIA

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