Editorial


Par MELHEM KARAM 

LA PROCLAMATION DE L’ETAT (PALESTINIEN) 
POURRAIT FAIRE RÉÉLIRE NETANYAHU
Le 4 juin au lieu du 4 mai, c’est ce qu’a décidé le Conseil central de l’OLP, en maintenant ouvertes ses réunions jusqu’à cette date, laquelle interviendra après la fin des élections israéliennes et la veille de la commémoration de la guerre de juin 1967. Cette décision a indisposé le Front démocratique pour la libération de la Palestine et le mouvement de la résistance islamique “Hamas” qui l’ont rejetée.
Yasser Arafat croit avoir joué la carte intelligente, son souci principal étant de créer l’Etat pour lequel il a obtenu une seconde promesse des parties américaine et internationale. Pour cette cause, Arafat a invoqué l’Histoire et rappelé la catastrophe de Deir Yasine; puis, le revers qui s’est abattu sur les Palestiniens en 1943.
De plus, il a enregistré l’évolution survenue après cinquante années de lutte, face à ceux qui l’incitaient à proclamer l’Etat à son terme, advienne que pourra. Le président palestinien a adopté une position modérée et rejeté le slogan proposé par les défaitistes qui le taxent de faiblesse: “La création de la Palestine peut encore attendre”. Il a rejeté cette proposition, en dépit des opinions de certains de ses ministres. Il est vrai que la fin de l’étape transitoire et l’absence d’une paix définitive entre les deux peuples, engendrent, immanquablement, un vide juridique et constitutionnel.
Telle est la proposition unilatérale. Mais de l’autre, la proclamation de l’indépendance, en pleine bataille électorale israélienne, pourrait provoquer une crise de violence et faciliter la victoire de Benjamin Netanyahu qui a annoncé son intention d’annexer tous les territoires que contrôle Israël, si Arafat mettait sa menace à exécution.
Yasser Abed-Rabbo a déclaré devant “Al-Mountada”: “La formule idéale consiste pour nous à retarder l’heure, sans l’annoncer”. Cependant, Yasser Arafat a placé tout son crédit, pour convaincre l’opinion publique du nouvel ajournement, d’autant que les négociations traînent depuis quelque temps sans résultat.
Selon un sondage d’opinion réalisé par le centre des recherches de Naplouse, les Palestiniens dans leur majorité (48% contre 43%) approuvent cet ajournement, parce qu’ils sont soucieux de parvenir au but souhaité, à savoir: créer la patrie, même si cela requiert quelque facilité, certaines souplesse et concessions en vue d’y parvenir.
Arafat a réalisé une victoire lorsqu’il a reçu un message du président Bill Clinton, le rassurant quant à la fondation de cet Etat. C’est la première fois où le président américain reconnaît le droit des Palestiniens “à décider de leur sort, comme de leur avenir et de vivre libres sur leur terre”. Cependant, il se garde de prononcer la formule magique: “le pouvoir autonome”.
Pour la première fois, aussi, Clinton, proclame l’effet destructeur de la colonisation sur le processus de paix. Précédemment, son administration se contentait de parler de difficultés et d’entraves, uniquement. Clinton a annoncé qu’il appellera à un sommet tripartite, après les élections israéliennes et la formation du nouveau gouvernement. Les Etats-Unis inviteront les deux parties palestinienne et israélienne, à engager, en leur présence, des négociations accélérées autour de la formule définitive et de fixer la date de la signature d’un accord entre elles dans un an. C’est ce qu’a annoncé Joe Lokhard, porte-parole officiel du président Clinton.
L’Union européenne avait accordé un délai similaire aux négociations, en se disant prête à reconnaître l’Etat palestinien futur en temps opportun.
Quant à Ehud Barak, partant de son désir d’indisposer son adversaire, il a rapproché le message de Clinton, de l’appui apporté par Lord Balfour, en 1917, à la création d’un foyer national juif en Palestine.
Netanyahu s’est félicité de l’intervention américaine, considérant que la rétractation palestinienne avait été motivée par la promesse du président US.
Yasser Arafat quant à lui, a une confiance aveugle en la personne du président Clinton, estimant suffisantes et positives les garanties qu’il lui a données. Mais Arafat n’a pas remis le texte complet aux 118 membres du Conseil central réunis à Gaza. Ceux-ci ne cachent pas leur doute et leur inquiétude; ils considèrent qu’il n’y a pas de garanties plus fortes que l’accord signé à Washington. “Malgré cela et jusqu’à maintenant, cet accord n’a pas été appliqué”, ainsi que l’a observé Marwan Barghouti, leader de Fath sur l’ensemble de la Cisjordanie.
Les Palestiniens appréhendent les périls de l’agenda d’Oslo, quand il arrivera à son terme, face à un processus interminable de la paix, affranchi de toute base légale solide.
Georges Habache a boycotté avec son FPLP toute la rencontre, alors que quatre dirigeants de “Hamas” y ont pris part à titre d’observateurs.
Mahmoud Zahar, porte-parole du mouvement islamique, a dit: “Nous sommes ici pour affirmer à l’Autorité palestinienne que les accords d’Oslo sont finis.” Mais cette unité de pure forme ne peut durer longtemps. Yasser Arafat croit qu’il n’y a pas de leurre cette fois; que Clinton ne gagne pas à reporter, indéfiniment, un fait où il voit tout son intérêt, celui de son candidat aux présidentielles Al-Gore et l’intérêt de son épouse, Hillary, si elle décide de poser sa candidature aux élections. Il voudrait y mettre fin sous son mandat par les vivats, les festivités et les fleurs.
Photo Melhem Karam

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