VIERA DA SILVA... “PEINDRE EST UN ACTE RITUEL”

C’est à la Fondation Dina Vierny-Musée Maillol que se tient actuellement à Paris, l’exposition des œuvres de Viera da Silva.

Ce musée se situe dans un des hauts lieux de l’histoire de cette ville. Un hôtel particulier construit au XVIIIème siècle, célèbre grâce à “La fontaine des quatre saisons”, œuvre du sculpteur Bouchardon, située en façade.
Cet ancien couvent est, aujourd’hui, devenu un espace d’art de plus de 4250 m2 qui, outre les salles consacrées au Musée Maillol, comporte des espaces permettant d’accueillir des expositions temporaires.
Au gré de la visite, on trouvera là les œuvres des maîtres de l’art naïf comme Douanier Rousseau, Bonbois, Rimbert, les artistes russes tels Ilya Kabakov, Boulakov, des œuvres d’artistes de l’art moderne et contemporain comme Serge Poliakoff, Pougny, Dufy, Odilon Redon...
Depuis l’ouverture du Musée, les amateurs d’art ont pu admirer des expositions temporaires marquantes comme celles de Morandi, Giglioli, Basquiat, Michel Haas, Diego-Rivera-Frida Kahlo.
Viera da Silva est née en 1908 au Portugal. Après des études à l’Ecole Supérieure des Beaux-Arts de Lisbonne, elle étudie la sculpture à l’Académie de la Grande Chaumière à Paris où elle épouse l’artiste Arpad Szenes.
En 1940, le couple s’exile au Brésil pour revenir en France en 1947.
En 1980, Viera da Silva, naturalisée française, est nommée Chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres. Elle enchaîne les expositions, les plus grandes galeries et les musées du monde entier lui consacrent des rétrospectives. C’est en 1992, à Paris qu’elle s’éteint.
Le recul du temps permet de mettre en perspective le travail et la singularité de cette artiste, peintre d’une grande rigueur qui voyait le monde avec intelligence, fluidité d’imagination et noblesse de style.
Comme une abeille qui connaîtrait la pesanteur du vertige, elle confiait: “En ajoutant petite tache par petite tache, laborieusement comme une abeille le tableau se fait...”. Les œuvres rassemblées au Musée Maillol témoignent de 60 années de travail, d’exercices quotidiens ayant permis à da Silva d’atteindre ce bruissement des couleurs, ces horizons basculés, donnant au monde quelque chose pareille à un philtre d’amour.
A travers une centaine de compositions allant de la peinture sur toile ou sur carton, en passant par les gouaches sur papier marouflé, les encres de Chine, les temperas et les fusains, le visiteur distinguera plusieurs grandes périodes dans l’itinéraire artistique de ce peintre.
L’avant-guerre parisien allant de la période de 1931 à 1939 où, grâce à la fréquentation d’artistes comme Max Ernst, Miro, Kandinsky, da Silva élargit sa vision abstraite. Son exil au Brésil marque son œuvre par une certaine dramaturgie, une nostalgie avec des compositions angoissantes comme “Le désastre” ou “L’Incendie”. A son retour à Paris, elle travaille ses “Labyrinthes”, matrices miroitantes de ses fantasmes et de ses enchantements.
Elle travaillera, également, des structures aux rythmes affirmés où l’on distingue la captation d’une lumière autre travaillée avec des camaïeux de blanc.
Les gouaches et temperas sur papiers faits main ont un caractère de libre effusion avec la nature, l’environnement, sorte de petite musique de chambre.
Les œuvres datées de 1966 marquent une période d’intenses interrogations sur le sens de la vie. “Irrésolutions résolues VII” et “Irrésolutions résolues XXIV”, “Au fur et à mesure” évoquent des circuits complexes qui sont de grands labyrinthes avec de multiples entrées...
En 1973, da Silva travaille et développe avec ses structures diagonales et ses assises verticales, des espaces complexes, œuvres presque initiatiques ouvertes sur l’illimité. Avec les “Trois fenêtres”, “L’Echo antérieur” ou “l’Empire céleste”, les compositions démontrent la mise en scène de la dualité intérieure et de l’équilibre libératoire.
Viera da Silva a offert au monde une œuvre d’une grande musicalité, une peinture toute de finesse et d’intuition où, à tout moment, la facilité n’a sa place.
Pour elle, peindre était avant tout “un acte rituel”.
 

Un art de la récupération aussi“Le désastre”.


“La chambre à carreaux”. (1935).


“Les fruits d’or” (1965).

par SONIA NIGOLIAN-PARIS

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