Vue d’ensemble du spectacle.
4.500 spectateurs avaient effectué ce jour-là, le pèlerinage
de Baalbeck pour applaudir une jeune fille toute simple, mais d’un aplomb,
d’une maîtrise, d’une assurance et d’un naturel sans pareils. Une
jeune fille venue jongler, munie d’un violon électrique ou classique
(selon les circonstances), passant du jazz au reggae, du pop au classique,
du rock à l’acid jazz, jouant debout, à genoux, parcourant
les escaliers, sautant, chantant, bref, ne tenant pas en place.
Ses multiples dons font que rien ne l’embarrasse: son violon électrique
est en panne? Qu’à cela ne tienne! Elle prend le violon classique
et joue du Ravel ou du Paganini. A l’aise dans tous les styles, Vanessa-Mae
ne s’embarrasse pas de faire côtoyer ou se fondre des musiques diamétralement
opposées, surprenant, choquant ou enthousiasmant son auditoire:
La musique de Vanessa-Mae est, à son image, aussi extravagante:
tous les styles y sont mêlés, se côtoyant ou s’entremêlant,
le jazz raillant le classique, le pop faisant un pied-de-nez au rock. La
star, elle-même excellente comédienne, (n’a-t-elle pas joué
dans un film récemment?), sait adopter des attitudes circonstanciées,
se déhanchant tel un rocker, ou s’agenouillant dans une attitude
recueillie, usant du charme de sa voix pour chanter ou annoncer les œuvres
qu’elle va interpréter.
En somme, Vanessa-Mae n’est autre qu’une petite sorcière qui
métamorphose tout ce qu’elle touche, dont l’art est un aboutissement
d’essais effectués depuis bientôt quarante ans: Jacques Loussier
ou les Swingle Singers, dans les années soixante ne s’étaient-ils
pas essayés à réaliser des mixages en chantant ou
exécutant des œuvres classiques (Bach et autres) sur des rythmes
de jazz? Chez nous, les Rahbani n’ont-ils pas orientalisé Mozart,
Mendelssohn et autres Noëls traditionnels occidentaux? Et on pourrait
citer nombre d’expériences de ce genre qui sont diversement appréciées.
Ce mixage des genres convenait bien au site de Baalbeck qui, lui aussi,
est un amoncellement de diverses civilisations. Ce mélange des styles
qui semble atteindre aujourd’hui son paroxysme, nous le retrouverons, bientôt,
toujours dans le cadre du Festival de Baalbeck, chez Rabih Abou-Khalil
qui mêle, allègrement, musique et instruments orientaux aux
formes et instruments occidentaux.
La fusion des arts est une chose vieille comme le monde. L’avenir seul
est à même de juger de la valeur de ces essais. En attendant
et s’il faut se fier au verdict du public, Vanessa-Mae a enthousiasmé
au plus haut point ses auditeurs.