SECRETAIRE DU BLOC DE LA LIBERATION ET DU DEVELOPPEMENT
AHMED SOUEID: "LE LIBAN REJETTE L'IMPLANTATION ET L'AMERIQUE VEUT LA LUI IMPOSER"

Secrétaire du Bloc de la libération et du développement dont le chef est le président Nabih Berri, il a à son actif sept années de vie parlementaire. En un temps relativement court, Ahmed Soueid est parvenu à s’imposer sous l’hémicycle. Rapporteur de la commission parlementaire de l’Administration et de la Justice, il fait partie de deux autres commissions, celles de la Défense et de la Sécurité, des droits de l’homme et du règlement intérieur.
Il se distingue, surtout, par son franc parler, son souci de la chose publique et, aussi, de maintenir le discours politique loin des surenchères.

Il n’est donc pas étonnant de l’entendre dénoncer le ravalement de ce discours, qui, dit-il, se caractérise par la trivialité, à en juger par les termes injurieux et outrageants dont usent certains politiciens.
En politique, poursuit-il, quiconque tente d’obtenir gain de cause par des moyens coercitifs et indécents, n’atteint pas son objectif. Il faut que la discussion et les débats à la Chambre et en dehors d’elle, ne débordent pas le cadre de la civilité.
A propos de l’opposition, le parlementaire sudiste préfère qu’elle soit “constructive” et “conforme aux règles démocratiques” auxquelles le Liban est fermement attaché. Le Bloc parlementaire de la libération et du développement n’approuve pas les moyens qu’utilisent les détracteurs du Pouvoir pour essayer de le discréditer.
D’ailleurs, le président Hoss, homme connu pour son sérieux et sa pondération, refuse de se laisser entraîner par les opposants qui usent de termes injurieux. Sa dernière réponse aux diatribes de Walid Joumblatt s’est caractérisée par le réalisme.

Walid Joumblatt est-il sérieux dans son opposition et celle-ci se justifie-t-elle?
Il est souvent victime de l’impulsivité, mais on ne peut douter de son nationalisme et de sa fidélité aux questions engageant l’avenir du pays.

Ses cabales réitérées contre le Pouvoir, ne portent-elles pas atteinte à l’image du Liban, à sa stabilité et à la paix civile?
J’admets qu’elle dénature l’image du Liban à l’étranger et suscite de l’inquiétude au sein de l’opinion publique, le citoyen ordinaire n’approuvant plus la manière d’agir et de se comporter du chef du PSP.

D’aucuns disent que les déclarations intempestives de Joumblatt risquent d’affecter le régime, d’entraver son action en faveur de l’édification de l’Etat des institutions et de torpiller la réforme administrative?
Nul ne peut influer sur l’action du président Lahoud qui est fermement résolu à exécuter son plan dont les grandes lignes sont consignées dans le discours d’investiture. D’autant que notre peuple souhaite depuis longtemps voir un gouvernant extirper la corruption, sanctionner les corrupteurs et mettre fin à la dilapidation des fonds publics.

Vous appuyez donc ce régime?
J’appuie toute initiative qu’il prendra en vue d’édifier l’Etat de la loi et des institutions, de promouvoir l’égalité et la justice.

La question de la levée de l’immunité couvrant les membres de l’Assemblée est à l’ordre du jour; qu’auriez-vous à dire à ce sujet?
L’article 39 de la Constitution est clair et n’a pas besoin d’être davantage explicité. A mon avis, la loi fondamentale gagnerait à être révisée, sans qu’il soit touché à son essence, dans le but d’élucider certaines de ses dispositions sujettes à contestation et, surtout, à de fausses interprétations.
Quelle est la position de votre bloc parlementaire envers la nouvelle loi électorale?
Notre groupe n’a encore adopté aucune position à ce sujet. Jusqu’ici, il prônait l’adoption de la circonscription unique, mais après l’abolition du confessionnalisme politique et la constitution de partis nationaux non confessionnels.
Puis, les élections législatives devraient se dérouler sur base de programmes, non de personnes et loin des considérations d’ordre communautaire ou sectaire.
En ce qui me concerne, je suis contre le retour au caza. Le mohafazat me paraît la formule la plus valable pour la circonscription électorale et je ne vois pas d’inconvénient à augmenter le nombre des districts.
De toute manière, je refuse que la nouvelle loi électorale tarde à être élaborée au-delà de la fin de l’année courante. Je précise, aussi, que je suis en faveur du système de la proportionnelle.

Etes-vous en faveur des tables d’écoute?
Le contrôle des lignes téléphoniques se justifie quand il est établi pour des raisons en rapport avec la sécurité nationale et la paix civile, car il faut maintenir les agents et les éléments suspects sous surveillance.
En revanche, je m’y oppose s’il a pour but de contrôler les opposants ou les loyalistes, car je suis pour la préservation des libertés publiques et, spécialement, la liberté de la Presse, celle-ci ayant pour mission d’informer le citoyen et de le mettre en garde contre tout ce qui peut porter atteinte à son existence et à son avenir.

Vous attendez-vous au retrait israélien du Liban-Sud dans le délai fixé par Ehud Barak?
Je ne dispose d’aucune donnée à ce sujet jusqu’à ce jour.

Et quelle est votre analyse de la situation sur le terrain?
Après la libération de la région de Jezzine, la Résistance a pu étendre son action jusqu’au caza de Hasbaya où l’ennemi israélien dispose de “centres de sécurité”.

Etes-vous optimiste quant à la reprise des négociations de paix entre le Liban et la Syrie, d’une part et l’Etat hébreu, d’autre part?
Je ne suis pas optimiste. A mon avis, l’important n’est pas de reprendre les négociations, mais de les faire aboutir.
Mon pessimisme provient de plusieurs antécédents, dont celui de Taba, où le négociateur israélien n’a cessé de manœuvrer et de tergiverser pour imposer la paix selon ses propres conditions qui sont rédhibitoires. Il ne faut pas perdre de vue que les questions à débattre, celles des réfugiés, de l’eau et de la sécurité sont complexes.

Qu’auriez-vous à dire à propos de l’implantation des réfugiés palestiniens?
Le Liban dans toutes ses fractions est opposé à l’implantation. Mais on a l’impression que les Etats-Unis veulent nous l’imposer d’une façon ou d’une autre. L’affaire n’est pas facile; elle exige une action incessante et en profondeur, d’autant que l’Etat hébreu est connu pour sa félonie et projette de causer du préjudice au Liban et à la Syrie dans tout ce qu’il entreprend. Il nous faut donc être vigilants et nous concerter, à l’effet de rejeter toute décision et tout projet allant à l’encontre de nos intérêts nationaux.

Propos recueillis par
JOSEPH MELKANE

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