AMINE EL-RIHANI: L'AUTEUR IMMORTEL

Un congrès scientifique a réuni au St-Joseph School, durant une semaine, des spécialistes venus du monde entier autour de l’œuvre du grand poète libanais du début du siècle: Amine el-Rihani.
 

Photo tirée du New York Times (1912).

Manuscrit de “Kalb Lubnan”.
 
Sous les voûtes, Amine el-Rihani (1876-1940) repose dans sa maison natale de Fraykeh, aussi immuable que le garçon impétueux qu’elle a vu grandir. Entre les pins, face à la mer, sur ce flanc de la montagne du Metn, la vieille cloche du vieux monastère St-Maron, qui scande les demi-heures, semble appeler le jeune poète sous l’olivier qui a abrité ses rêves, lesquels l’ont mené jusqu’aux Etats-Unis où il passa un long moment de sa vie.
Pour fêter le centenaire de son premier retour sur le sol natal, un hommage lui est rendu dans le cadre de la déclaration de “Beyrouth, capitale culturelle pour 1999”. C’est avec beaucoup de fierté que le grand théâtre du St-Joseph School de Kornet Chehwan, l’agence “Nouvel Horizon”, la fondation Farès Zoghbi et de très nombreux amis ont accueilli du 20 au 25 septembre, un congrès scientifique sur l’œuvre du grand écrivain. Réunissant des critiques littéraires, des professeurs de littérature et de spécialistes venus de partout,  un véritable colloque-débat s’est institué autour des différentes facettes de l’œuvre du premier auteur libanais à être traduit en anglais, un des pionniers de l’émigration, mais aussi l’auteur multiculturel qui s’est intéressé non seulement à son pays, mais à tout le mouvement de renaissance arabe et a su porter sa voix jusqu’en Amérique.
Son neveu, Amine Albert el-Rihani, vice-président de la LAU et professeur de littérature comparée, est clair: “Nous ne voulons pas d’un festival qui serait juste une festivité oubliée le lendemain. Nous avons voulu organiser un véritable congrès pour susciter l’éveil et l’intérêt profond à notre pensée culturelle et littéraire. Amine el-Rihani n’est pas seulement un auteur à étudier à l’école; il fait aussi l’objet d’un enseignement supérieur dans les universités”.
 

La maison natale d’el-Rihani à Fraykeh.

Amine Albert el-Rihani 
devant la porte du musée d’el-Rihani.
 
ÉCRIVAIN, PHILOSOPHE, POÈTE ET MILITANT
L’auteur de “Kalb Lubnan”, bien connu des écoliers libanais, est bien chez lui dans son musée (créé en 1953 par son frère Alfred). Entouré de toutes ses œuvres de sa correspondance nombreuse et variée (son passeport américain signé des rois, coupures de presse, registres, etc), de ses différents portraits dont trois de son grand ami, Gebran Khalil Gebran, Amine el-Rihani semble être juste levé de son lit qui trône sous les arcades, pour aller respirer l’air de ce Liban qu’il a décrit avec un véritable art du détail et de la symbolique.
Parmi les meubles du terroir (sa table à manger, son lit) ou même importés de New York (son secrétaire, sa machine à écrire), ses décorations, ses objets hétéroclites et personnels (son vieux chapeau, ses lunettes, son parapluie, sa canne), de nom-breux souvenirs et cadeaux que lui ont offerts les grands de ce monde et, sur-tout, les princes arabes dont il a su s’approcher (sabre, tapis, cha-pelet du pape...)... Les symboles ne sont pas loin. Car, dans le vieux salon en arcades réaménagé, les discussions fié-vreuses et philo-sophiques évoquent des écrivains de son temps, la vie de l’auteur de “Khaled” qui a su mettre en relief l’Orient à travers la richesse de la littérature anglaise. Mais sous les voûtes séculaires et entre les bustes sculptés, seule note de couleur, dans cet univers, figurent les quelques peintures de sa femme, l’Américaine Bertha Case, qu’il épousa en 1916.
La symbolique est toujours là, dans le “cœur” de ce Liban qu’il a tant aimé. Le temps semble n’avoir pas  passé et Amine el-Rihani est toujours présent à Fraykeh.

QUATRE DÉBATS
Amine el-Rihani dont l’œuvre a été traduite en 25 langues, a fait l’objet de plusieurs dizaines de thèses, d’études, d’interprétations. Le congrès actuel essaie de montrer aussi sa dimension littéraire. Les quatre séances de débats ont porté sur sa réconciliation avec les hommes de religion (il avait été accusé de s’en être éloignés), son retour au patrimoine arabe, sous l’angle d’études comparatives avec les grandes œuvres du Jahez et El Ma’ari, sur l’art de la symbiotique dans “Kalb Lubnan”; enfin, sur la portée universelle de son œuvre. Ces débats seront suivis d’une série de recommandations, dont celle de publier toutes les œuvres de Rihani, d’en traduire d’autres et de poursuivre les débats. Un concours scolaire sur son œuvre sera également lancé, ainsi qu’une lecture poétique de quelques passages de ses œuvres. Une visite de son musée a ponctué une des quatre soirées.

GISELE EID

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