Alors
qu’on prépare encore la terre avant les semailles, beaucoup de Libanais
croient pouvoir procéder à la récolte, en dressant
le bilan de la première année du régime lahoudiste.
Nous croyons qu’il est prématuré de faire un inventaire,
le temps des vendanges n’étant pas proche. Il faut donner au président
Lahoud et à son gouvernement, un délai suffisant pour leur
permettre de réaliser leur programme, avant de juger leur gestion
de la chose publique...
Depuis le 15 octobre, date du premier anniversaire de l’accession du
chef de l’Etat à la magistrature suprême, des bilans sont
dressés de l’action présidentielle par des personnalités
officielles, politiques et les médias, chacun allant de son analyse
dithyrambique ou de sa critique à peine voilée du régime,
selon qu’il se réclame du camp des loyalistes ou des opposants.
Nous avons préféré ne pas nous prêter à
ce jeu, pour la simple raison qu’à notre avis, le moment n’est pas
encore venu de dresser des inventaires, une année étant insuffisante
pour juger le Pouvoir sur sa gestion de la chose publique ou pour se prononcer
sur le point de savoir si les promesses consignées dans le discours
d’investiture ont été tenues ou pas.
Car le déblaiement du terrain des décombres de toutes
natures qui l’encombrent, requiert beaucoup plus que douze mois, ainsi
que le lourd legs hérité du précédent régime.
Un ancien président de la République s’est employé,
vainement croyons-nous, à justifier la politique qu’il a suivie
au cours de ses neuf années de “règne” et à convaincre
les citoyens que tout, au cours de son mandat prolongé, marchait
comme sur des roulettes. Et ce, dans le cadre d’une interview télévisée.
Cet ancien responsable a posé, innocemment, cette question:
“On parle toujours du legs laissé par mon régime; de quel
legs s’agit-il? Le Pouvoir est continuité et moi-même j’ai
hérité d’un semblant d’Etat que j’ai réussi à
remettre sur pied...”
Il a feint d’oublier la troïka, de triste mémoire; la dette
publique excédant dix-huit milliards, le gaspillage, les scandales,
la situation socio-économique désastreuse à cause,
justement, de tous ces faits réunis...
La loi électorale inique sur la base de laquelle ont été
organisées les législatives de 92 et 96; la naturalisation
de plusieurs centaines d’intrus qui ont été autorisés
à participer au scrutin, moins de deux ans après avoir acquis
la nationalité libanaise et tant d’autres décisions prises
et formalités accomplies en dérogation aux lois et règlements
en vigueur, tout cela n’est rien, selon l’ancien responsable, comparé
aux grandes réalisations de son régime!
En ce qui concerne l’ouverture des dossiers chauds, l’arrestation d’un
ancien ministre et de hauts fonctionnaires, l’ex-président demande
avec étonnement, pourquoi les organismes de contrôle ne l’avaient
pas informé de tels faits répréhensibles! Là,
aussi, il feint d’ignorer que son Premier ministre avait mis sous le boisseau
les rapports présentés par les organismes en question. On
dit même que ce dernier avait menacé “de casser les pieds”
à l’actuel ministre de la Réforme administrative, s’il s’avisait
de faire parvenir ces documents compromettants aux autorités compétentes...
Nous nous souvenons, quant à nous, d’un “exploit” à inscrire
à l’actif de l’ancien président, à savoir: la gifle
qu’il a administrée à un jour-naliste dans un lieu public,
parce que notre confrère avait signé un article jugé
outrageant à son égard... |