Editorial



Par MELHEM KARAM 

ARRET AVANT DIRE DROIT OU JUGEMENT INTERLOCUTOIRE
POUR QUE LES GENS PUUISSENT RECLAMER DES COMPTES AU REGIME

Une année après l’arrivée du président Emile Lahoud, il n’est pas possible de porter un jugement définitif sur sa gestion, comme dans le langage des juristes. S’il faut à tout prix rendre un jugement, ce serait un “Arrêt avant dire droit” ou un “Jugement interlocutoire”. La raison de cela est que l’excès d’optimisme est pareil à l’excès d’espérance qui risque d’entraîner un excès de déception.
Cela signifie-t-il que nous en sommes arrivés là?
Pas du tout. Il est certain qu’une année après le début du mandat, nous continuons à accorder notre confiance au président, comme nous accordons la même confiance à son gouvernement, en la personne de son chef et de la plupart de ses membres.
Mais revenons à une année comme aujourd’hui. L’optimisme était grand, très grand. Enorme, peut-on dire. Ceci a nécessité l’entrée des gens sages sur la scène de la discussion et de la controverse pondérées, affirmant que les espoirs sont grands, mais doivent être mesurés aux possibilités disponibles à celui sur qui se fondent les espoirs.
Le président Emile Lahoud est-il venu “pour détruire ou pour compléter”? Il est venu pour les deux choses à la fois: pour dénoncer et compléter.
Pour dénoncer le gaspillage, afin que nous restions dans les limites de ce terme poli qui signifie beaucoup à ceux qui comprennent et à ceux qui ne comprennent pas. Restons dans les limites du terme “gaspillage”, pour dire que le mandat d’Emile Lahoud a mis un terme ou a tenté, avantageusement, de freiner le glissement effroyable. Davantage? Peut-être au plan de la consolidation des pouvoirs sans les dépasser. Partant de la foi du président que la Constitution de Taëf appelée - nul ne sait pourquoi - la Constitution de la IIème république, transformant la présidence de la République en présidence constitutionnelle, après que la révision du 8 novembre 1942 lui a fait trop supporter, cette révision ayant eu lieu au cours d’une séance parlementaire tenue sous le titre: “Effacer les traces du mandat”; preuve en est que la consolidation des prérogatives présidentielles sous le mandat d’Emile Lahoud, n’a pas suscité une controverse pouvant être placée au niveau de la “controverse nationale”.
Pour plus de clarté: l’ouverture des dossiers est un devoir dans l’Etat de la loi. Et le président Emile Lahoud parle, en permanence, de l’Etat de la loi.
L’ouverture des dossiers, abstraction faite de la “dispute judiciaire”, doit se poursuivre parce qu’en principe, on doit continuer à réclamer des comptes... Mais si les comptes sont ouverts, il faut juger tout le monde et que soient sanctionnés tous ceux qui ont commis des abus. Ainsi, en toute franchise. Parce qu’ils ont dévié du droit chemin. Tous sans exception.
Si on réclame des comptes au nom de l’Etat de la loi qui place les citoyens sur le même pied d’égalité et les juge avec équité. Sinon, les gens auraient le droit de demander: Pourquoi, un tel est poursuivi, alors que tel autre est épargné?
Emile Lahoud est venu pour compléter, car il est venu en ayant foi dans la nécessité de maintenir la politique extérieure telle qu’elle est. Le Liban, puissent-ils nous dire pourquoi, subit un préjudice de la concomitance des deux volets. L’histoire de la paix - le Liban y étant un sujet de controverse - paraît plus proche qu’elle n’est éloignée. Et ce, avec la réserve quant aux paroles israéliennes qui exigent un grand nombre d’interprètes pour être comprises... La paix est un processus en marche; tantôt, il trébuche et, tantôt, il se libère, mais il n’est pas jusqu’ici condamné à s’arrêter. Le Liban a préparé ses dossiers aux négociations de paix et formé une équipe de travail constituée de gens de la spécialisation et du nationalisme. Il n’est supposé se trouver que dans le domaine de l’implantation. Et n’est-ce pas l’histoire de la présence palestinienne au Liban depuis 1948; surtout après l’histoire des sept villages, spécialement Ikrit et Kfar Berhom, jusqu’à ce jour?
Le père Antoun Khoraiche, devenu par la suite archevêque de Saïda et du Chouf; puis, patriarche des maronites, délégué par le patriarche maronite, avait négocié avec David Ben Gourion, premier chef du gouvernement d’Israël représentant le parti travailliste. Celui-ci lui a demandé de discuter la question avec un jeune officier israélien. Celui-ci lui a fait comprendre que la terre ne sera pas restituée au Liban. Et que les gens vivant sur cette terre ont le choix entre la vendre au prix courant, non au prix de la crise, comme il le lui a dit... ou y vivre, après qu’elle eut été placée sous la souveraineté israélienne.
Le père Antoun Khoraiche, était revenu, alors, au Liban, pour transmettre ce qu’il avait entendu en Israël et entendre des paroles libanaises, telle la suivante: les conventions internationales garantissent le règlement de cette affaire au moment opportun.
Emile Lahoud est venu pour compléter... en rejetant l’implantation.
Une question à poser en marge des comptes: Pourquoi ne laissons-nous pas à Emile Lahoud, pour lui réclamer des comptes et nul n’est au-dessus de cela, les occasions offertes au président libanais depuis 1943 à ce jour? Au point qu’on peut tenir de pareils propos dans des périodes déterminées du mandat?
Le président commençait son sexennat en procédant à la dissolution de la Chambre. Béchara el-Khoury n’a pas eu besoin de recourir à cette mesure, parce que la législature de 1943 répondait à ses vues dans des domaines déterminés Camille Chamoun a dissous le parlement en hiver 1953 et organisé des élections au printemps de la même année. Il a pu dire que le régime était devenu le sien et le mandat, aussi. Et que même avec une Assemblée de quarante quatre membres, il a répliqué aux critiques émises à son encontre le 1er mai 1953, date anniversaire du parti socialiste progressiste.
Et Fouad Chéhab, de même que Sleiman Frangié ont dissous la Chambre, mais Charles Hélou n’a pas voulu user de son droit constitutionnel dans ce domaine. La série des dissolutions s’est arrêtée avec Sleiman Frangié. Ni Elias Sarkis n’a pu le faire, ni Amine Gemayel. La situation en ces temps exposait à la risée quiconque prétendait pouvoir dissoudre le parlement.
Emile Lahoud, ce général-président à la haute moralité, ne peut dissoudre la Chambre que dans des circonstances très difficiles et très délicates définies par la Constitution. C’est pourquoi, il a attendu l’échéance constitutionnelle et parlementaire, parce que c’est le président d’une république parlementaire, constitutionnelle et démocratique. Et l’échéance approche, la loi électorale étant en cours de gestation. Etant entendu, que nous aurions voulu qu’elle fût prise en charge par toutes les parties, celles-ci ayant le droit de choisir les sytèmes qui gèrent leur marche nationale, surtout celui qui légifère en leur nom.
Le parlement de l’an 2000 sera-t-il celui d’Emile Lahoud? Qui le sait? Le mot reste aux gens, dans la mesure où ceux-ci peuvent le prononcer.
Le parlement de l’an 2000, par la volonté des gens, nous voulons qu’il soit un démarrage décisif pour le mandat et le régime, afin que les gens puissent réclamer un compte décisif au régime et à Emile Lahoud.

Photo Melhem Karam

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