Bloc - Notes

Par ALINE LAHOUD
CHARITE BIEN ORDONNEE...
On se demande selon quelle dynamique se meuvent, aujourd’hui, les autorités, si toutefois l’on peut appeler dynamique l’action du gouvernement Hoss.
Depuis dix ans, depuis exactement l’avènement de Taëf avec le président Hraoui, on nous martèle le crâne avec la 425. C’était la 425 au réveil, au déjeuner, au dîner, au coucher, dans toutes les circonstances et à toutes les occasions, à un point tel qu’il pouvait arriver à n’importe lequel d’entre nous, à qui l’on aurait demandé son âge, de répondre machinalement 425.
Cette résolution de l’ONU qui enjoignait aux Israéliens de se retirer immédiatement et sans forme de procès du Liban, était notre ultime planche de salut. Brusquement, on n’en parle plus comme si la 425 n’avait existé que dans notre imagination, le code d’accès de nos rêves ayant, semble-t-il, entre-temps, changé de chiffre.
Où en sommes-nous ce 22 novembre, au moment où à grands renforts de fanfares et de défilés, de drapeaux et d’uniformes, nous célébrons notre 56ème année d’indépendance? Tout le monde l’ignore et, plus particulièrement, le gouvernement, occupé à polémiquer avec une opposition hargneuse, à tirer des plans sur la comète, confondant volontiers comète et étoile filante et à plancher sur la racine carrée électorale de la capitale pour décider par quel chiffre elle serait divisible.
Pendant ce temps, la logique du problème que pose l’occupation israélienne semble avoir opéré un virage de 180Þ, du moins pour certains. Il n’est plus question de s’en tenir à la libération du Sud. Notre grande affaire serait de libérer le Golan. C’est ce que proclame la résistance, déclaration que les Palestiniens ne tarderont pas à s’en servir comme couverture pour sortir en armes de leurs camps et rétablir, à plus ou moins brève échéance, le Fateh-land de nos pires cauchemars.
Après cela, nous nous porterons probablement candidats pour libérer Jérusalem, ensuite les 90% de la Palestine dans lesquels ne patauge pas Arafat. Que voulez-vous, nous sommes faits comme ça. Notre vocation à nous est de nous battre pour libérer tout le monde à part nos esprits et nos mentalités qui ont la fâcheuse manie de se faire plus royalistes que le roi, tout en renonçant à l’avance à être les plus forts. “Notre faiblesse est notre force”, je ne sais plus qui a dit cela, mais plus personne n’ignore où ce genre d’aberration nous a finalement menés.
Rien ou presque ne manque au tableau. On se croirait transportés 31 ans en arrière, en 1968, au moment où Charles Hélou donnait carte blanche au général Boustany pour signer l’accord du Caire, à la grande stupéfaction du président Abdel-Nasser. Non, rien ne manque au tableau. En 1968, le président Hélou déclarait: “Nous ne sommes pas les gendarmes d’Israël”. Aujourd’hui, le président Berri déclare: “Le Liban ne sera pas le garde-frontière d’Israël”. Les leçons de l’Histoire! Que cela ferait rire, si ce n’était pas aussi lamentable!
Pour en revenir à l’indépendance, il n’est pas inutile de rappeler que sans la lutte sourde que se livraient, en 1943, Français et Anglais, lutte qui a fait dire à Churchill dans ses mémoires: “De toutes les croix que j’ai eu à porter au cours de la guerre, la plus lourde fut la Croix de Lorraine”, nous n’aurions peut-être pas pu nous en sortir tout seuls, mais nous nous sommes battus gouvernement et peuple dans un élan de parfaite union nationale.
Quoi qu’il en soit et alors que nous voilà à nouveau dans l’œil du cyclone, engagés dans une étape sillonnée de graves écueils, une étape dont le vice-président du Conseil parle comme de “trois mois dangereux” et M. Berri de “la période la plus critique”, nous nous retrouvons à flotter dans le vide comme si nous ne savions plus que faire.
Qui nous aidera à sortir du pétrin cette fois-ci? Certainement pas les USA qui ne voient que par les yeux d’Israël, ni la France dont l’amour, faute de moyens, demeure platonique. Il n’est pas non plus question de signer une paix séparée avec Israël. La communauté du destin libano-syrienne est pour nous tous un choix stratégique que nous ne saurions renier sans provoquer un clash qui nous mènerait au bord du gouffre.
Mais nous ne pouvons pas non plus nous asseoir sur un nid de frelons en disant advienne que pourra. Car, à demeurer amorphes, les bras ballants, à danser d’un pied sur l’autre, en attendant que les autres prennent l’initiative, nous perdrions toute crédibilité aux yeux du monde, sans pour autant rendre service à la Syrie contrainte, par notre inertie, à traîner un poids mort accroché à ses basques. 

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