Si la date de la relance du processus de paix sur le volet libano-israélien
n’est pas encore fixée, elle ne tardera pas à l’être
et plus tôt qu’on imagine.
Etant donné l’importance de l’événement, la Russie
est entrée en scène. En effet, le président Emile
Lahoud a reçu un message de son homologue russe qui lui a été
transmis par M. Vassily Sredine, vice-ministre des A.E. Rien n’a transpiré
de la teneur de ce message, mais l’émissaire moscovite a insinué
qu’il est impossible de dissocier les volets libanais et syrien des négociations
de paix.
De plus, il a précisé que la Russie n’était pas
la rivale de l’Amérique sur ce terrain, mais tient à jouer
un rôle dans ce processus, à partir de l’étape à
laquelle il avait abouti en février 1996.
De son côté, le délégué personnel
de M. Kofi Annan, secrétaire général des Nations Unies,
est venu à Beyrouth pour se faire une idée sur place des
perspectives de paix. Il n’est pas impossible de voir d’autres émissaires
débarquer chez nous dans les prochaines semaines.
Cependant, en dépit de leur importance, les négociations
de Washington n’ont pas occulté les questions d’ordre intérieur,
le projet de loi électorale en tête qui a été
accueilli favorablement dans l’ensemble.
Le projet découpe le Liban en quatorze circonscriptions électorales,
le Liban-Sud ayant été maintenu en une seule et ce, tant
que l’occupation israélienne s’y perpétuera. Le texte gouvernemental
a été approuvé par tous les membres du Conseil des
ministres, à l’exception du président Salim Hoss qui a émis
des réserves en ce qui concerne, surtout, le partage de Beyrouth
en trois circonscriptions.
Mais cela ne l’a pas empêché de se ranger à l’avis
de la majorité et d’apposer sa signature sur le projet de loi, afin
de ne pas retarder sa transmission à l’Assemblée nationale;
ce qui a été fait déjà, la commission parlementaire
de l’Administration et de la Justice devant en entreprendre l’examen dès
la semaine prochaine.
PLUS DE “ROULEAUX COMPRESSEURS”
Le nouveau découpage des circonscriptions a pour avantage, notamment,
d’empêcher ce qu’on a appelé les “rouleaux compresseurs” au
cours des deux dernières élections législatives, à
savoir: les grandes listes, dont les membres étaient choisis par
des personnalités influentes, sans tenir compte de la volonté
des votants...
Dorénavant, les listes moyennes et petites prévaudront,
ce qui répondra à la volonté populaire, les candidats
à la députation étant mieux connus des votants. De
ce fait, les “grands électeurs” n’auront plus la possibilité
de voter pour une liste entière.
Si l’on excepte le président Nabih Berri qui pourra revenir
à la Chambre à la tête d’un bloc parlementaire compact,
les autres leaders, tels MM. Rafic Hariri et Walid Joumblatt y retourneront
avec un nombre restreint de colistiers. Aussi, M. Hariri paraît-il
perplexe, ne parvenant pas encore à décider s’il posera sa
candidature à Mazraa, Mousseitbé ou Ras-Beyrouth, bien qu’il
ait affirmé au cours de son premier iftar de Ramadan, qu’il formera
des listes dans les trois circonscriptions de la capitale...
L’ancien président du Conseil devait conférer, au début
de la semaine avec M. Joumblatt, après avoir été reçu
par le chef de l’Etat et s’être entretenu avec les responsables syriens
à Damas.
En réponse à la question des reporters de presse, le
leader du Parti socialiste progressiste a émis les réflexions
suivantes autour du projet de loi électorale: “Initialement, nous
avons réclamé un découpage équilibré
et égal pour toutes les circonscriptions. Mais il semble que ce
principe n’a pas été respecté à Beyrouth, comme
nous le voulons avec le président Hariri.
“En ce qui me concerne, j’appuie la circonscription individuelle et
il semble que les circonstances ne favorisent pas cette formule, ni celle
du caza. Le grand défi à relever consiste, maintenant, à
faire un bon choix des candidats, à l’effet d’assurer une saine
représentation de la volonté populaire. Ce défi c’est
à nous de le relever, le président Hariri et tous les hommes
politiques.”
Interrogé sur le point de savoir s’il compte proposer des amendements
au projet gouvernemental à la Chambre, M. Joumblatt s’est limité
à dire: “Nous pensons à cela, mais nous ne pouvons pas nous
y opposer dans l’absolu. Nous tenterons donc d’apporter au projet les amendements
que nous jugeons utile d’y introduire.”
De l’influence de la nouvelle loi électorale sur la vie politique
à l’avenir, le chef du PSP dit: “Tout dépendra de l’évolution
de la conjoncture régionale.”
AMBIANCE CORDIALE À BAABDA
Pour en revenir à l’audience que le chef de l’Etat a accordée
à MM. Hariri et Joumblatt, rien de précis n’en a transpiré,
d’autant que, contrairement à son habitude, le “bureau médiatique”
de M. Hariri n’a diffusé aucun communiqué à ce sujet.
Par contre, les milieux proches de M. Joumblatt ont qualifié
de “cordiale” l’ambiance de la rencontre, ce qui porte à penser
que le “maître de Moukhtara” a normalisé ses rapports avec
le palais de Baabda.
Quant au projet de la loi électorale, son étude sera
entamée la semaine prochaine et on présume qu’il sera ratifié
avant la fin du mois courant. De ce fait, les candidats éventuels
aux législatives commenceront leur campagne électorale dès
le début de l’an prochain. Il y a lieu de rappeler que les fonctionnaires
désireux de poser leur candidature, devront démissionner
de leurs postes dès janvier 2000, soit six mois avant la date du
scrutin.
Rappelons que le gouvernement fera suivre prochainement un autre projet
déterminant le plafond des dépenses que tout candidat aux
législatives pourra engager, de même le nombre d’heures auxquelles
il a droit à l’antenne, dans les stations radiophoniques et de télévision.
De plus, le Cabinet Hoss a institué la carte électorale.
L’ÉTAT NEUTRE
Enfin, le président Emile Lahoud a défini sa position
envers la prochaine consultation populaire, en déclarant devant
ses visiteurs que “l’Etat se maintiendra à égale distance
de tous les candidats, qu’ils soient opposants ou loyalistes.”
Le président de la République a, également, promis
un scrutin exemplaire et invité les hommes politiques et les candidats
aux législatives, à faire montre de rectitude, en se conformant
dans leur campagne aux règles démocratiques, afin d’assurer
une véritable représentation nationale.
Par ailleurs, il y a lieu de faire état de la position adoptée
envers le projet de loi électorale par S.Em. le cardinal Nasrallah
Sfeir qu’il a accueilli favorablement, disant qu’il assure le plus d’égalité
possible entre les régions et les électeurs que par le passé.
Le cardinal-patriarche a précisé que s’il s’est prononcé
pour le caza, c’est en raison de l’absence de partis et de blocs politiques
organisés, permettant à l’électorat de faire un bon
choix de ses représentants sous l’hémicycle.
Mgr Sfeir estime que les prochaines élections générales
revêtiront une grande importance, suite à la relance du processus
de paix au Proche-Orient.
Cette prise de position du chef de la communauté maronite incitera,
sans doute, les membres de cette communauté à participer
en grand nombre à l’opération électorale et à
ne pas la boycotter comme ils l’ont fait en 1992 et 96. D’ores et déjà,
la Ligue maronite s’est rangée à l’avis de Bkerké.