Le Liban vit de sa diplomatie
Qui se rappelle de la phrase célèbre de l’homme d’Etat
libanais, Fouad Ammoun, ancien secrétaire général
des Affaires étrangères, membre de la Cour internationale
de Justice à La Haye?
Celui-ci avait déclaré haut et clair: “Le Liban vit de
sa diplomatie et non de son armement.”
Il paraphrasait, ainsi, la non moins célèbre phrase de
Staline: “Le Vatican? Combien de divisions?”
Or, que se passe-t-il, aujourd’hui, aux Affaires étrangères?
Quoique ce ne soit pas ce ministère qui soit directement en cause
- mais subit, malheureusement, les répercussions de la politique
et de la logique du parlement libanais?
Messieurs les députés, pour satisfaire à certains
désirs exprimés par d’autres députés, n’ont
rien trouvé de mieux que de concocter sur mesure une loi pour permettre
aux “attachés de l’Emigration” (attachés à rien du
tout en fait) d’intégrer le corps diplomatique, une Carrière
tant convoitée!
Hâtons-nous de dire que ces dix-neuf attachés de l’Emigration
admis au concours, ne sont visés, ni de près ni de loin,
par ces critiques.
Ces critiques visent le mélange ou la salade libanaise concoctée
pour faire du sur mesure dans le recrutement.
Ces attachés de l’Emigration, fruit d’un ministère “inventé”
par le précédent Cabinet pour complaire à une personnalité
politique, ont été jusqu’à présent les dindons
de la farce.
Ils ont, pour la plupart, démissionné de leurs postes
au Liban pour être nommés “Attachés de l’Emigration”
auprès de nos ambassades dans les pays où se trouvent de
fortes communautés d’ascendance libanaise.
Première aberration, car la quasi-majorité des émigrés
libanais ont acquis une autre nationalité! Celle du pays de leur
choix.
Mais au Liban, on corrige une bêtise en commettant une autre.
Pour nos responsables, deux négations sont une affirmation, c’est-à-dire:
moins plus moins font un plus!
Non contents de les affecter au ministère des Affaires étrangères,
nos astucieux députés leur donnent, aussi, un rétroactif
de leurs traitements depuis la date de leur réussite au concours.
Ce qui, en fait, leur donne un droit absolu de priorité sur les
diplomates recrutés, ultérieurement, à la suite d’un
concours autrement plus difficile!
Sauvegarder les droits des uns, ne doit pas se faire au détriment
du droit des autres.
Et comment juger ce tour de passe-passe du Législatif pour permettre
à l’Exécutif d’opérer ces nominations?
Est-ce constitutionnel? Est-ce cela l’Etat de Droit?
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Est-ce un secret d’Etat?
Depuis que l’on parle de “transparence”, on n’a jamais été
plus “opaque” au Liban.
Il semble que les fonctionnaires surveillent le moindre de leurs propos,
ce qui est admirable, mais gardent le plus souvent un mutisme hermétique,
ce qui est moins admirable, en ne répondant pas à n’importe
quelle question que posent les citoyens.
Dans tous les pays du monde, on affiche longtemps à l’avance
les dates de concours organisés pour le recrutement des fonctionnaires.
On indique, aussi, les endroits, les jours et les heures où on peut
obtenir de plus amples informations concernant ces concours.
Au Liban, c’est la croix et la bannière pour arracher à
des responsables de la Fonction publique, les programmes des connaissances
exigées pour les concours, en sus du diplôme connu!
Quant à la date des examens, la réponse est: “On ne le
sait pas encore”.
A la question de savoir quel préavis serait donné aux
candidats, la réponse est toujours: “On l’ignore”.
Pourquoi tous ces secrets?
Pourquoi ne le publie-t-on pas dans la Presse et non seulement au Journal
Officiel?
S’agit-il d’un secret d’Etat?
Ou est-ce juste pour ajouter un autre faux problème à
tous les vrais que les Libanais subissent?
La devise de l’ENA en France (Ecole Nationale d’Administration Publique)
est: “Servir l’Etat sans s’asservir...”
On pourrait ajouter et ceci est valable pour tous les fonctionnaires
du monde; y compris le Liban: “Sans se servir”.
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De Gaulle: Clarté et concision
Le temps n’a pas d’importance au Proche-Orient, en général,
et, au Liban, en particulier.
Preuve en est la longueur des diatribes et les discours-fleuve (dans
un désert d’idées) des responsables, des commentateurs, à
la TV, à la radio et dans la presse.
Plus c’est long, mieux ça vaut! Du moins le croit-on.
On demandait au général de Gaulle, le temps qu’exigeait
l’écriture d’un discours.
“Cela dépend, essentiellement, de la durée de mon intervention”,
répondit-il.
“Pour une demi-heure de discours, je compte deux ou trois jours. Pour
une allocution de cinq minutes, une semaine au moins m’est nécessaire.
“Et pour parler deux heures, je peux vous le faire tout de suite.”
Comme le disait, aussi, Bernard Shaw: “Un discours est comparable à
une histoire d’amour: n’importe quel imbécile peut la démarrer,
mais il faut être rudement fort pour la conclure.”
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Le nouveau visage du Liban
1) Les jeunes Libanais sont de plus en plus nombreux à quitter
le pays?
- Qu’importe! On les remplacera par les nouveaux naturalisés.
2) Le visage du Liban change?
- Qu’importe! La nouvelle physionomie des Libanais se fondra mieux
dans le paysage régional.
3) Les gens n’en peuvent plus. La classe libérale est à
bout. Elle fait figure de paria et de mendiante?
- Qu’importe! Il y en aura davantage pour moins de gens.
4) La culture et l’esprit sont mal appréciés?
- Qu’importe! Les personnes cultivées et “spirituelles”, auraient
déjà dû quitter le pays.
Qu’importe! Qu’importe! Qu’importe tout cela si nos politiciens, eux,
restent.
C’est cela l’important!