KOFI ANNAN ET LE
SÉRIEUX DES NATIONS UNIES
Les
Nations-Unies se trouvent en butte à des problèmes sans limites.
Bien des Etats membres ne respectent pas leurs engagements administratifs
et financiers, l’Amérique en tête. Et Kofi Annan suscite le
doute quant à sa capacité de gérer les affaires, comme
cela est exigé d’un responsable administratif et du premier fonctionnaire
du monde.
Du Kosovo à l’Irak, en passant par le
Timor oriental, les Nations-Unies s’assurent une présence. Cinquante
années après leur fondation dans un monde étrange
réclamant, d’une manière désespérée,
des règles régissant leur action et leurs charges, les Nations
Unies paraissent nécessaires et, en même temps, objet de critique
plus qu’aucun jour. Leur gestion incarne, d’une façon flagrante,
l’antagonisme existant entre l’idéalisme de leur charte et la vérité
d’une action qui apparaît toujours au bord de la paralysie.
S’il est convenable de ne pas exagérer
l’évaluation des résultats du sommet de l’Organisation mondiale
pour le Commerce à Seattle, l’émergence d’une société
civile divisée et ambiguë constitue une vérité
nouvelle. Elle réclame la réduction de la disparité
criarde et le contrôle des risques croissants. Ces deux revendications
se retournent contre les Nations-Unies et leur secrétaire général,
Kofi Annan.
Ainsi, les Nations-Unies sont devenues l’organe
de travail des nations non unies. Elles reposent, depuis leur fondation,
sur le principe du respect absolu de la souveraineté des Etats,
même si l’application livre des peuples entiers aux comportements
sauvages et inconséquents de présidents et de leaders n’ayant
pas foi en la démocratie.
Nous ne devons pas oublier que le principe de
la souveraineté que l’Europe cherche à dépasser dans
ce continent, apparaît pour maints Etats du Sud, l’Inde, par exemple
comme quelque chose qu’on ne peut violer. Dans les Etats ayant acquis leur
liberté depuis cinquante ans, l’idée de souveraineté
va de pair avec la liberté. La volonté légale d’appliquer
la constitution du Conseil de Sécurité à des vérités
de l’an 2000, ne concorde pas - au contraire - d’une manière parfaite
avec la volonté de transformer la manière de leur gestion.
Pour utiliser la formule habituelle de l’Union
européenne, les partisans du changement veulent un élargissement
sans profondeur; c’est-à-dire flottant.
Les Nations-Unies étant affligées
de la réclamation de la souveraineté et prisonnières
du principe de l’indépendance, interviennent en permanence après
terme. Autrement dit, quand leur intervention ne sert plus à rien.
Les Etats ne sont pas disposés à
conférer au secrétaire général un pouvoir d’intervention
rapide, lequel suppose l’existence d’une arme de répression, le
legs des années de colonialisme paralysant l’évolution vers
un internationalisme véritable.
Cependant, le grand obstacle empêchant
les Nations-Unies d’assurer une gestion saine, réside dans la mauvaise
qualité de leurs relations avec les Etats. Le symbole de la paix
et de la justice - les Nations Unies et l’autorité réelle
- et les Etats-Unis, se contredisent au lieu de se compléter.
Par rapport à beaucoup d’Etats, qu’ils
soient membres du Conseil de Sécurité ou pas, les Nations-Unies
ont un rôle principal, celui de garantir l’équilibre de l’organisation
internationale. C’est un objectif légitime mais, en réalité,
elles s’orientent vers un immobilisme coûteux, comme ce fut le cas,
dernièrement, au Kosovo ou vers l’intervention de l’OTAN.
Il est de notoriété publique que
l’intervention humaine, même avec la conduite unitariste, est préférable
à l’indifférence des Nations Unies, d’autant que le Congrès
américain qui se base sur une opinion, d’habitude négative
et indifférente, pousse de nouveau vers l’isolationnisme, contrairement
à la position du président.
C’est pourquoi, la marge de manœuvre pour Kofi
Annan est très étroite. Pour redonner une nouvelle légitimité
à l’organisation dont il est le secrétaire général
et non le président, il peut transformer sa faiblesse en force.
Et ce, en s’adressant aux peuples par-delà les Etats, en dénonçant
les comportements inacceptables et en mobilisant avec intelligence la puissance
de l’information à cette fin, pour condamner le fait rejeté
et bénir l’acte valable. Kofi Annan peut raviver les sentiments
mais, uniquement, sur la marge et rien que sur la marge.
Car les Etats n’hésiteront pas à
l’inviter avec force à s’exécuter, s’il prend avec sérieux
sa mission en tant que secrétaire général et valorise
les principes de la charte qu’il représente et protège. |
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